Au programme :
* Nancy Carroll - The Devil's Holiday
* Ruth Chatterton - Sarah and Son
* Greta Garbo - Anna Christie
* Greta Garbo - Romance
* Norma Shearer - The Divorcee
* Norma Shearer - Their Own Desire
* Gloria Swanson - The Trespasser
Toujours en train de tâtonner ces premières années, l'Académie sélectionna cette fois-ci cinq actrices pour cependant sept rôles. Avec un tel schéma, il ne fait aucun doute que la victoire devait se jouer entre Norma Shearer et Greta Garbo, les deux stars les plus populaires de la MGM qui bénéficiaient également d'une grande renommée internationale. Et c'est finalement Shearer qui l'emporta, probablement en raison de son rôle juteux de divorcée, thème délicieusement pré-Code tranchant avec les habituelles héroïnes victimes de la destinée, de quoi confirmer le succès de ce film nommé dans trois autres catégories principales (meilleur film, meilleur réalisateur, meilleur scénario adapté). Sans compter que Shearer était l'épouse d'Irving Thalberg, bras droit de Louis B. Mayer, même si pour être parfaitement honnête je crois davantage que c'est sa performance et l'essence même de son rôle qui lui permirent de récupérer la statuette. En face, Garbo avait beau avoir réussi sa transition au parlant avec grand fracas, Anna Christie (le film pour lequel elle aurait gagné) fut sans doute moins soutenu par le studio, comme le prouve l'absence d'une nomination en tant que meilleur film. De toute façon, les électeurs ont pu penser que la talentueuse Suédoise aurait certainement gagné une autre année vu l'habituelle qualité de ses prestations, ce qui ne fut hélas pas le cas. Quant aux autres candidates, je n'ai absolument aucune idée de leur ordre d'arrivée lors du comptage des voix : les trois étaient très populaires à l'époque et Swanson comme Chatterton en étaient à leur deuxième nomination. Si l'on considère le très bon accueil critique fait aux performances de Chatterton, il est possible qu'elle soit passée devant Swanson qui, elle, était déjà sur la pente savonneuse après le très sulfureux Queen Kelly.
Quoi qu'il en soit, ces sept nominations me donnent du pain sur la planche, alors attelons-nous dès à présent à la tâche.
Toujours en train de tâtonner ces premières années, l'Académie sélectionna cette fois-ci cinq actrices pour cependant sept rôles. Avec un tel schéma, il ne fait aucun doute que la victoire devait se jouer entre Norma Shearer et Greta Garbo, les deux stars les plus populaires de la MGM qui bénéficiaient également d'une grande renommée internationale. Et c'est finalement Shearer qui l'emporta, probablement en raison de son rôle juteux de divorcée, thème délicieusement pré-Code tranchant avec les habituelles héroïnes victimes de la destinée, de quoi confirmer le succès de ce film nommé dans trois autres catégories principales (meilleur film, meilleur réalisateur, meilleur scénario adapté). Sans compter que Shearer était l'épouse d'Irving Thalberg, bras droit de Louis B. Mayer, même si pour être parfaitement honnête je crois davantage que c'est sa performance et l'essence même de son rôle qui lui permirent de récupérer la statuette. En face, Garbo avait beau avoir réussi sa transition au parlant avec grand fracas, Anna Christie (le film pour lequel elle aurait gagné) fut sans doute moins soutenu par le studio, comme le prouve l'absence d'une nomination en tant que meilleur film. De toute façon, les électeurs ont pu penser que la talentueuse Suédoise aurait certainement gagné une autre année vu l'habituelle qualité de ses prestations, ce qui ne fut hélas pas le cas. Quant aux autres candidates, je n'ai absolument aucune idée de leur ordre d'arrivée lors du comptage des voix : les trois étaient très populaires à l'époque et Swanson comme Chatterton en étaient à leur deuxième nomination. Si l'on considère le très bon accueil critique fait aux performances de Chatterton, il est possible qu'elle soit passée devant Swanson qui, elle, était déjà sur la pente savonneuse après le très sulfureux Queen Kelly.
Quoi qu'il en soit, ces sept nominations me donnent du pain sur la planche, alors attelons-nous dès à présent à la tâche.
Je retire :
Ruth Chatterton - Sarah and Son : Une fois de plus, j'ai un problème avec les performances pour lesquelles Ruth Chatterton a été nommée aux Oscars, et ce en raison d'un type de jeu excessivement théâtral qui, au sein de films déjà très statiques, rend le tout plus indigeste qu'autre chose. Alors, vous me direz que certes, on n'en était qu'aux débuts du parlant et que bon nombre d'interprétations n'étaient pas encore entièrement adaptées à l'objet cinéma, mais il reste bien difficile de nier que pour un spectateur contemporain les choix faits par l'actrice à l'époque paraissent vraiment trop datés. Par ailleurs, dans le cas précis de Sarah and Son, je ne peux m'empêcher de bloquer sur son phrasé étranger: d'un côté Chatterton a le mérite de restituer un accent d'inspiration germanique au rendu toutefois quelque peu douteux, mais de l'autre, ce travail confère à son timbre des intonations trop enfantines pour que le personnage parvienne à rester totalement crédible. Pour le reste, le film a beau resservir une énième variante de la "femme miséreuse à la recherche de son enfant", l'actrice réussit néanmoins à s'attacher toute notre sympathie sans esquisser une héroïne trop piteuse, ce qui est tout à son honneur. Mais certainement pas au point de rentrer dans ma sélection.
Norma Shearer - Their Own Desire : Dans un rôle où elle semble parfaitement à l'aise, Norma Shearer crève littéralement l'écran, tout du moins dans la première partie. En effet, j'aime beaucoup son personnage de socialite enjouée, et l'actrice est précisément idéale pour incarner ce type d'héroïnes, comme le prouve son autre nomination pour The Divorcee. Dans Their Own Desire, on retrouve également Robert Montgomery et il est très plaisant de constater que l'alchimie entre les deux acteurs fonctionne à merveille. Norma a notamment des réactions vivantes et spontanées dans les scènes de séduction, ou lorsqu'elle découvre l'identité de son partenaire, ce qui donne un certain éclat à sa performance déjà riche en grands moments, à l'instar de ses regards naturels lorsque Lucia apprend le divorce de ses parents. Le problème, c'est que le personnage comme le jeu de l'actrice s'essoufflent rapidement dans la seconde moitié, la faute étant en partie imputable à des revirements de situation assez lourds, ce dont témoigne cette scène de naufrage totalement improbable bien qu'au goût du jour vu qu'on nous fait le même coup dans Sarah and Son. Quoi qu'il en soit, Norma livre ici une performance très honorable avec notamment un début très solide, mais quitte à choisir entre ses deux grands rôles de la saison, The Divorcee l'emporte haut la main.
Greta Garbo - Anna Christie : Garbo talks! Et bien entendu, la voix de la Divine est particulièrement plaisante, son timbre légèrement grave tinté d'un délicieux accent suédois collant idéalement au personnage d'Anna. Mais ce n'est évidemment que la moindre de ses qualités, car Garbo livre vraiment une bonne prestation dans ce rôle de femme rustre qui tranche avec ses héroïnes habituellement plus distinguées, ce dont témoigne cette entrée fracassante qui voit l'actrice commander un whisky. Ainsi, la première partie est menée de main de maître mais, là où la performance pèche quelque peu, c'est lorsque la Divine a tendance à dériver méchamment vers le mode diva, de quoi donner l'impression d'un personnage pas forcément très bien construit sur la durée. Par exemple, un "Oh, what's the use!" accompagné d'un rabattement de bras plus affecté que jamais, entre autres nombreuses répliques du même acabit, alimente ce décalage notoire entre la fille des bas-fonds et l'actrice qui se détache un peu trop du personnage, mais avouons que mon admiration pour Garbo ne me donne pas l'objectivité nécessaire pour m'en offusquer. Dès lors, je vois surtout en cette performance une réussite incontestable, quoique imparfaite, et je sais d'ailleurs gré à l'actrice d'élever clairement le niveau de son film, à l'aide de Marie Dressler, face à des protagonistes masculins insupportables et un scénario ultra statique.
Greta Garbo - Romance : Certes, la Cavallini n'est pas son plus grand rôle, mais le personnage est tellement charmant que je ne peux m'empêcher de l'adorer, et de passer un excellent moment en sa compagnie. Il faut dire que cette cantatrice italienne se montre toujours vivace et pleine de charme, à l'image de son flirt lors de la réception de départ, sans oublier sa spontanéité naturelle lorsqu'elle parle aux musiciens italiens depuis sa fenêtre, de quoi me séduire amplement. Par ailleurs, l'actrice sait éviter le mélodrame dans les moments les plus sérieux, au point qu'elle rayonne toujours tout au long du film, d'où un ravissement qui va de pair avec cette ambiance extrêmement divertissante de vacances hivernales à New York, malgré la platitude étonnante de la réalisation de Clarence Brown. Quoi qu'il en soit, Garbo illumine le film de sa personnalité tout en composant réellement son personnage, ce qui suffit à me faire passer un excellent moment pour moi qui aime autant l'actrice que l'héroïne. Ceci dit, force est de reconnaître que tout n'est pas au point dans cette interprétation, à commencer par cet accent suspect au possible dont les "r" gutturaux roulés sur plusieurs secondes n'ont rien de suave ni de latin, mais il me faut avouer que le charme général qui se dégage de ce rôle éminemment sympathique suffit à estomper ces quelques défauts de fabrication. On contourne également la séquence d'opéra sans prendre de gants, mais Garbo n'ayant pas de formation musicale, on le pardonnera volontiers. Par ailleurs, sa performance trouve le moyen de sortir constamment grandie par l'incessante comparaison qui s'impose entre l'actrice et son partenaire masculin franchement indigeste, voire avec le reste d'une distribution assez peu subtile, entre les sœurs aigries et un Lewis Stone trop égal à lui-même. Dès lors, Rita Cavallini n'est peut-être pas Marguerite Gautier, Romance est peut-être bien loin d'égaler Camille, mais il n'en reste pas moins que le film comme le personnage laissent une impression entièrement positive qui donne envie d'y revenir assez souvent.
Norma Shearer - The Divorcee : En parlant de divorcées, j'ai davantage de goût pour sa Mary Haines de The Women, mais impossible de nier que Jerry Martin reste l'un de ses plus grands rôles, d'autant que c'est arrivé à une bonne époque pour l'actrice qui désirait changer son image qu'elle jugeait alors trop "saine". Pourtant, tout le monde lui a déconseillé de jouer ce personnage, et Irving Thalberg lui-même pensait qu'elle n'avait pas la personnalité requise pour jouer une divorcée, thème sulfureux pour l'époque. Il a donc fallu une séance de photos osées pour que Norma parvienne à convaincre la MGM de lui laisser le rôle, ou tout du moins de l'arracher des mains de cette satanée Joan Crawford, et bien lui en a pris, car l'héroïne lui va comme un gant. En effet, Norma brille de mille feux dans l'aspect léger du film, faisant un sort à une série de répliques coquines parfaitement savoureuses ("I can't scream!"), et n'hésitant pas à flirter avec la gent masculine une fois sa liberté retrouvée, avec en prime un délicieux sourire lors de la fête du nouvel an. On notera aussi qu'elle est très à l'aise en socialite épanouie, ce qu'on avait déjà pu voir auparavant dans Their Own Desire, de quoi ajouter au charme de cette performance. Néanmoins, si la partie comédie révèle une véritable fraîcheur dans son jeu d'actrice, la partie plus sérieuse a malheureusement tendance à souligner quelque peu les limites de son interprétation, Norma partant parfois dans des envolées lyriques un peu mièvres, notamment lorsqu'elle tente de retenir Chester Morris, et ne nous épargnant pas certains gestes ampoulés un peu maladroits. Mais même dans ces moments-là, elle garde malgré tout une classe folle, surtout lors de ses retrouvailles avec Dot où l'on apprécie sincèrement la noblesse de l'héroïne, et avouons que les défauts de cette performance s'effacent très rapidement au profit de ses qualités, puisque ce sont principalement les passages enjoués qui retiennent l'attention. De toute façon, malgré les réserves énoncées, on tient là une délicieuse composition typiquement pré-Code, et lorsque les critiques professionnels définissent Norma Shearer comme "the first American film actress to make it chic and acceptable to be single and not a virgin on screen", ce n'est que trop vrai, et ce rôle rend tout à fait justice à une telle description.
Gloria Swanson - The Trespasser : Juste après son dernier rôle muet dans le scandaleux mais jouissif Queen Kelly, Gloria Swanson est elle aussi passée au parlant, et force est de reconnaître que la transition est plutôt réussie. Il est cependant dommage que pour ce faire elle n'ait pas bénéficié d'un meilleur support car, si j'avoue prendre un malin plaisir devant le film, ça n'en reste pas moins un drame féminin convenu à souhait comme l'époque les aimait, avec de surcroît un final qui laisse quelque peu perplexe. Mais concernant la performance de la star à proprement parler, j'avoue qu'en grand fan j'y trouve toujours de quoi me ravir au plus haut point, même si The Trespasser est objectivement loin d'être son meilleur rôle de ces années-là. En effet, si Swanson parvient à dégager un charme certain tout au long du film, notamment au début lorsqu'elle annonce sa démission pour aller se marier, son jeu n'en reste pas moins un peu trop pesant pour emporter totalement l'adhésion, à l'image de ces regards figés et mains levées au ciel lors de la scène du "divorce", sans parler de ces nombreuses répliques récitées de façon très théâtrales. Ceci dit, c'est une performance que j'aime beaucoup et que j'ai pris plaisir à découvrir. Mais si je veux nommer Swanson pour ses premiers parlants, je préfère me tourner vers ses performances comiques dans Indiscreet ou Tonight or Never.
Ma sélection :
Nancy Carroll - The Devil's Holiday : A nouveau, j'ai beaucoup apprécié Nancy Carroll, petite boule de charisme dans le corps d'une poupée de porcelaine, atout qui me met d'emblée dans de très bonnes dispositions à son égard. En effet, son travail d'actrice n'a peut-être rien de resplendissant, j'admire la façon dont elle attaque le personnage à bras le corps sans jamais laisser retomber l'attention, et sans jamais laisser apparaître de moments fades. Sa présence à l'écran apporte ainsi une force considérable à un film qui aurait pu ne rester qu'une expérience insipide, et rien que pour cet aspect, sa nomination me semble amplement méritée. Par ailleurs, on a beau être dans la théâtralisation à outrance et le sur-jeu, ça passe finalement comme une bouffée d'air frais comparé au reste d'un casting trop ampoulé pour être crédible, et à plus grande échelle, on est loin de la pesanteur du jeu d'une Ruth Chatterton. Ceci dit, Nancy Carroll ne peut empêcher une scène mal écrite de sombrer dans le grotesque: par exemple, lorsque David tombe une première fois dans les escaliers, Hallie se félicite de pouvoir le laisser entre la vie et la mort pour la modique somme de 50.000 $, mais lorsque le pauvre chou fait une rechute sur un tapis quelques mois plus tard, on a droit à un plus qu'improbable: "Non! David! Je réalise à quel point je t'aime!" Ahem. Heureusement, ce passage est rapidement épongé par une grande scène de confession tout en retenue.
Mary Duncan - City Girl: J'ai toujours considéré City Girl comme un chef-d'oeuvre, certes pas au point de surpasser Sunrise ou Nosferatu, mais chef-d'oeuvre quand même, ce qui confirme par ailleurs mon goût pour les histoires rurales, après ma déclaration d'amour ardente à The Stranger's Return. Quoi qu'il en soit, Mary Duncan rend parfaitement justice à l'excellence du film et, autant j'ai pu la trouver un peu fade auparavant, autant City Girl apparaît clairement comme le rôle de sa vie. En effet, elle éblouit dès son entrée en scène au restaurant, en se moquant de Charles Farrell qui récite ses grâces, surpassant au passage sa collègue qui préfère surjouer en écarquillant les yeux, alors que Mary reste parfaitement subtile et naturelle. La rencontre entre les deux héros permet encore à l'actrice de faire des étincelles, puisqu'elle se montre à la fois entreprenante et séduisante, quoiqu'un peu rude, contrastant joliment avec la personnalité réservée de Farrell, et l'on admirera surtout sa façon de dissimuler ses véritables émotions, surtout lorsqu'elle fait bien sentir qu'elle est contente de ses échanges avec son nouveau client, bien qu'elle tente de le masquer pour ne pas perdre la face devant les habitués plus cyniques du fast-food. D'ailleurs, c'est seulement après être rentrée chez elle qu'elle dévoile ses réelles intentions, en se révélant particulièrement touchante dans son désir d'évasion depuis sa chambre glauque. Autrement, tout ce qui est amené dans la première partie est parfaitement restitué par la suite: l'émotion est toujours là dès que les regards ne sont pas braqués sur elle (sa façon poignante de regarder la mère et le fils s'embrasser), elle crée toujours très facilement une bonne alchimie avec les autres personnages (son charme quand elle donne la cage à oiseaux à Anne Shirley), et force est de constater que même en arrière plan, notamment lors des disputes père-fils, sa présence reste incontestable. Mais en définitive, c'est surtout son répondant face aux hommes qui marque le plus les esprits, qu'il s'agisse pour elle de relâcher l'étreinte de son agresseur, de provoquer son mari faible ou d'impressionner par son expressivité flamboyante face à son beau-père qui la rejette. En somme, un très beau rôle pour une bien belle histoire, et une exquise performance silencieuse au crépuscule du muet.
Mary Duncan - City Girl: J'ai toujours considéré City Girl comme un chef-d'oeuvre, certes pas au point de surpasser Sunrise ou Nosferatu, mais chef-d'oeuvre quand même, ce qui confirme par ailleurs mon goût pour les histoires rurales, après ma déclaration d'amour ardente à The Stranger's Return. Quoi qu'il en soit, Mary Duncan rend parfaitement justice à l'excellence du film et, autant j'ai pu la trouver un peu fade auparavant, autant City Girl apparaît clairement comme le rôle de sa vie. En effet, elle éblouit dès son entrée en scène au restaurant, en se moquant de Charles Farrell qui récite ses grâces, surpassant au passage sa collègue qui préfère surjouer en écarquillant les yeux, alors que Mary reste parfaitement subtile et naturelle. La rencontre entre les deux héros permet encore à l'actrice de faire des étincelles, puisqu'elle se montre à la fois entreprenante et séduisante, quoiqu'un peu rude, contrastant joliment avec la personnalité réservée de Farrell, et l'on admirera surtout sa façon de dissimuler ses véritables émotions, surtout lorsqu'elle fait bien sentir qu'elle est contente de ses échanges avec son nouveau client, bien qu'elle tente de le masquer pour ne pas perdre la face devant les habitués plus cyniques du fast-food. D'ailleurs, c'est seulement après être rentrée chez elle qu'elle dévoile ses réelles intentions, en se révélant particulièrement touchante dans son désir d'évasion depuis sa chambre glauque. Autrement, tout ce qui est amené dans la première partie est parfaitement restitué par la suite: l'émotion est toujours là dès que les regards ne sont pas braqués sur elle (sa façon poignante de regarder la mère et le fils s'embrasser), elle crée toujours très facilement une bonne alchimie avec les autres personnages (son charme quand elle donne la cage à oiseaux à Anne Shirley), et force est de constater que même en arrière plan, notamment lors des disputes père-fils, sa présence reste incontestable. Mais en définitive, c'est surtout son répondant face aux hommes qui marque le plus les esprits, qu'il s'agisse pour elle de relâcher l'étreinte de son agresseur, de provoquer son mari faible ou d'impressionner par son expressivité flamboyante face à son beau-père qui la rejette. En somme, un très beau rôle pour une bien belle histoire, et une exquise performance silencieuse au crépuscule du muet.
Jeanette MacDonald - The Love Parade : Forcément, une collaboration Ernst Lubitsch / Jeanette MacDonald, la première qui plus est, ça m'émerveille à un point tel qu'il me paraîtrait complètement inenvisageable de ne pas nommer l'actrice pour ce rôle hilarant à souhait. Sans compter que j'adore plus que de raison les chansons qui lui permettent de briller dans le registre musical, de l'évaporé Dream Lover à la radicale Marche des Grenadiers; autant d'airs qui m'enchantent au quotidien. Mais si j'aime autant cette performance, c'est aussi parce que Jeanette est tout simplement brillante dans la première partie. Elle est par exemple drôlissime lorsqu'elle dévoile ses jambes en conseil des ministres, et son charisme est tel qu'on jubile en permanence de la voir dominer entièrement un Maurice Chevalier heureusement un peu moins cabotin qu'à l'accoutumée. L'interaction entre les deux acteurs fait d'ailleurs des merveilles, à grand renfort de regards en coin et de sourires espiègles, entre autres très bons moments. Malheureusement, je dois avouer que je trouve toujours la seconde partie plus décevante en ce qui concerne l'actrice, puisque le retournement de situation et l'inversion des rôles tendent à mettre l'héroïne plus en retrait. Or, Jeanette adopte alors un jeu plus fade qu'au début, à l'instar de cette scène de larmes forcée au possible qui tranche un peu trop avec le caractère habituellement plus volontaire de la princesse. Mais à l'image du film, ce rôle reste indéniablement charmant et constitue une expérience délicieuse à laquelle s'adonner sans modération.
Helen Morgan - Applause : J'avoue que le début m'a fait un peu peur en raison du caractère excessif de son jeu, encore que ça colle finalement plutôt bien à cette diva du burlesque, mais heureusement sa performance devient de plus en plus naturelle au fur et à mesure de l'intrigue. Pour commencer, l'actrice est parfaitement crédible en femme alcoolique et complètement perdue, sa gestuelle suggérant très bien le mode de vie sordide du personnage, et ses regards expressifs rendant tout le pathétique de la situation. On appréciera tout particulièrement la façon dont Kitty s'illusionne quant à un futur à Broadway plus que chimérique, tout en soulignant qu'elle a bien conscience, dans le fond, de cette impossibilité. D'autre part, outre le côté très touchant que confèrent à l'héroïne les scènes où elle réconforte sa fille, Helen Morgan sait se montrer assez maternelle pour ne jamais faire douter du rapport entre les deux protagonistes, bien que les actrices avaient sensiblement le même âge. Mais le meilleur, c'est cette grande scène où Morgan regarde les photos des différents personnages en arborant des expressions différentes à chaque fois, et le regard ravi absolument phénoménal qu'elle lance au portrait de sa fille renforce toute la sympathie qu'on peut ressentir pour Kitty. Il est simplement dommage que ses meilleurs moments soient concentrés à la fin et que le reste du film ne lui permette pas de détailler le personnage outre mesure, mais dans l'ensemble c'est très réussi.
Barbara Stanwyck - Ladies of Leisure: Donner une seconde chance aux films a toujours du bon, car à l'instar de Casablanca, It Happened One Night et The Philadelphia Story, autres chefs-d'oeuvre universellement adorés qui viennent de faire une remontée considérable dans mon estime, Ladies of Leisure a gagné de très nombreux points la seconde fois, en partie grâce à la mise en scène inspirée de Frank Capra, et principalement grâce à la phénoménale performance de Barbara Stanwyck dans son premier grand rôle. Il faut dire qu'elle crève l'écran dès son apparition un brin gouailleuse ("Yep, do you have a cigarette?") et impose d'emblée un personnage doté d'une forte personnalité, qui rechigne par exemple lors des séances de pose pour l'artiste, et répond de façon ironique aux gens de la haute société ("Take a good look, it's free", dit-elle à l'homme qui la dévisage). Elle est encore très drôle lorsqu'elle se moque des manières du peintre, mais on admirera surtout sa façon de ne jamais reculer devant les aspects les plus antipathiques de Kay, qui conserve longtemps une certaine vulgarité en parlant d'argent. Par ailleurs, toujours excellente, l'actrice n'oublie pas d'esquisser l'évolution du personnage avec une grande cohérence puisqu'elle passe d'abord par une certaine dose d'exaspération lorsqu'elle s'aperçoit que Ralph Graves ne l'appelle toujours pas par son prénom malgré leur nombreuses séances, avant d'éblouir de façon extrêmement impressionnante lors de la nuit qu'elle passe à l'atelier: elle fait monter les larmes en réalisant que l'artiste tient vraiment à elle, mais elle ne les lui montre pas, quitte à redevenir un peu gouailleuse face à lui, afin de mieux pleurer une fois seule, en mordant la couverture avec un sourire déchirant qui en dit long sur le passé de l'héroïne. Une autre séquence très marquante, c'est aussi la confrontation avec la mère de son hôte, à qui Barbara tient parfaitement tête tout en restant très polie, de quoi conduire à une fin absolument pas mélodramatique malgré la tonalité du film dans sa conclusion. On évite alors tout pathos, les larmes sont savamment dosées, et l'on est finalement bien en peine de trouver le moindre défaut à cette performance. Bon, peut-être un "I wish I was dead" un peu exagéré, comme les aimait l'époque, ou un petit cri de diva lorsque l'héroïne se fait arracher ses faux cils, mais ce ne sont là que d'infimes détails qui n'ont aucun poids devant le degré d'excellence de cette brillante composition.
Barbara Stanwyck - Ladies of Leisure: Donner une seconde chance aux films a toujours du bon, car à l'instar de Casablanca, It Happened One Night et The Philadelphia Story, autres chefs-d'oeuvre universellement adorés qui viennent de faire une remontée considérable dans mon estime, Ladies of Leisure a gagné de très nombreux points la seconde fois, en partie grâce à la mise en scène inspirée de Frank Capra, et principalement grâce à la phénoménale performance de Barbara Stanwyck dans son premier grand rôle. Il faut dire qu'elle crève l'écran dès son apparition un brin gouailleuse ("Yep, do you have a cigarette?") et impose d'emblée un personnage doté d'une forte personnalité, qui rechigne par exemple lors des séances de pose pour l'artiste, et répond de façon ironique aux gens de la haute société ("Take a good look, it's free", dit-elle à l'homme qui la dévisage). Elle est encore très drôle lorsqu'elle se moque des manières du peintre, mais on admirera surtout sa façon de ne jamais reculer devant les aspects les plus antipathiques de Kay, qui conserve longtemps une certaine vulgarité en parlant d'argent. Par ailleurs, toujours excellente, l'actrice n'oublie pas d'esquisser l'évolution du personnage avec une grande cohérence puisqu'elle passe d'abord par une certaine dose d'exaspération lorsqu'elle s'aperçoit que Ralph Graves ne l'appelle toujours pas par son prénom malgré leur nombreuses séances, avant d'éblouir de façon extrêmement impressionnante lors de la nuit qu'elle passe à l'atelier: elle fait monter les larmes en réalisant que l'artiste tient vraiment à elle, mais elle ne les lui montre pas, quitte à redevenir un peu gouailleuse face à lui, afin de mieux pleurer une fois seule, en mordant la couverture avec un sourire déchirant qui en dit long sur le passé de l'héroïne. Une autre séquence très marquante, c'est aussi la confrontation avec la mère de son hôte, à qui Barbara tient parfaitement tête tout en restant très polie, de quoi conduire à une fin absolument pas mélodramatique malgré la tonalité du film dans sa conclusion. On évite alors tout pathos, les larmes sont savamment dosées, et l'on est finalement bien en peine de trouver le moindre défaut à cette performance. Bon, peut-être un "I wish I was dead" un peu exagéré, comme les aimait l'époque, ou un petit cri de diva lorsque l'héroïne se fait arracher ses faux cils, mais ce ne sont là que d'infimes détails qui n'ont aucun poids devant le degré d'excellence de cette brillante composition.
A mettre à jour.
Norma: Je vous remercie infiniment pour cette récompense que je dédie à mon époux, mon cher Irving, qui a toujours su reconnaître mon talent sans jamais faire preuve envers moi d'un quelconque favoritisme, à part une fois ou deux, peut-être... En tout cas, je lui sais gré de m'avoir donné un rôle si juteux écrit sur mesure pour moi, et... Mais pourquoi cette sous-figurante de troisième ordre tente-t-elle de me tabasser avec mon Oscar?
Joan: Parce que c'est MON Oscar! Car le rôle a tout d'abord été écrit pour MOI! Et cette [série d'insultes que nous refusons de retranscrire] de Norma ne l'a obtenu que parce qu'elle couche avec le patron et qu'elle a montré ses fesses. La preuve en images.
Tallulah: Dahling, un peu de retenue voyons, vous pourriez donner des envies à certaines.
Joan: Peu importe! J'ai la rage! Tskrprskskskcrpkcrprpr! Il faut que je passe mes nerfs sur quelque chose!
Tallulah: En ce cas, prenez cette hache dahling, j'ai justement un baobab à faire couper dans mon jardin.
Orfeo: Pas sûr que donner une hache à Joan soit une bonne idée. Quoi qu'il en soit, la parole est maintenant à Sylvia Fowler, afin de classer les performances...
dignes d'un Oscar : Barbara Stanwyck (Ladies of Leisure): là aussi, revoir les films a du bon, puisque j'ai été cette fois-ci totalement conquis par la mise en scène de Capra, et surtout par le jeu extraordinaire de l'actrice qui qui se montre à la fois vulgaire et séduisante, ou encore rieuse et vulnérable, avec un incroyable brio et une justesse constante. Il faut que je réécrive cet article à l'aune de ces nouvelles redécouvertes, mais je n'ai pas le temps dans l'immédiat.
dignes d'une nomination : Nancy Carroll (The Devil's Holiday), Mary Duncan (City Girl): j'avais oublié à quel point elle était merveilleuse avec cette héroïne volontaire qui n'a pas peur de dire les choses en face, d'autant qu'elle use d'un jeu sobre qui renforce énormément le côté émotionnel de sa performance, et agrémente joliment cet excellent Murnau. Jeanette MacDonald (The Love Parade), Helen Morgan (Applause), Norma Shearer (The Divorcee): voir ci-dessus.
séduisantes : Norma Shearer (Their Own Desire), Gloria Swanson (The Trespasser), Greta Garbo (Anna Christie) et (Romance): voir ci-dessus. Toujours concernant Garbo, citons encore le très charmant The Kiss, passionnante intrigue policière où la Divine au pic de sa beauté ne manque pas de crever l'écran. Nina Mae McKinney (Hallelujah!): parce qu'elle chante et danse tout en ayant beaucoup de présence à l'écran du haut de ses dix-sept ans. Joan Peers (Applause): pas vraiment expérimentée, elle part trop souvent dans un sur-jeu outrancier, mais des scènes plus solides et son personnage dynamique font qu'on apprécie pleinement son rôle, bien que les regards soient entièrement tournés vers Helen Morgan. Barbara Stanwyck (The Locked Door): juste parce que c'est Barbara et que pour son premier vrai rôle elle montre déjà toute l'étendue de son charisme.
sans saveur : Mary Pickford (The Taming of the Shrew): un timbre rauque et une théâtralité exacerbée qui me font définitivement préférer ses personnages muets. Ruth Chatterton (Sarah and Son): c'est vraiment dommage car contrairement à beaucoup, elle fait vraiment l'effort de composer un personnage, mais le rendu est hélas trop crispant pour me donner envie de l'homologuer.
à découvrir : Jean Arthur (The Saturday Night Kid), Claudette Colbert (The Big Pond) (Manslaughter) (Young Man of Manhattan), Joan Crawford (Our Blushing Brides), Marion Davies (Not So Dumb), Kay Francis (Raffles), Janet Gaynor (Lucky Star)
grandes performances en langue étrangère : Louise Brooks (Die Büchse der Pandora) (Tagebuch einer Verlorenen): les deux rôles les plus mythiques d'une actrice non moins légendaire, que je ne nomme pas pour les raisons évoquées plus haut mais qui devrait être honorée tout son content dans une prochaine liste de prix internationaux.
Norma: Je vous remercie infiniment pour cette récompense que je dédie à mon époux, mon cher Irving, qui a toujours su reconnaître mon talent sans jamais faire preuve envers moi d'un quelconque favoritisme, à part une fois ou deux, peut-être... En tout cas, je lui sais gré de m'avoir donné un rôle si juteux écrit sur mesure pour moi, et... Mais pourquoi cette sous-figurante de troisième ordre tente-t-elle de me tabasser avec mon Oscar?
Joan: Parce que c'est MON Oscar! Car le rôle a tout d'abord été écrit pour MOI! Et cette [série d'insultes que nous refusons de retranscrire] de Norma ne l'a obtenu que parce qu'elle couche avec le patron et qu'elle a montré ses fesses. La preuve en images.
Tallulah: Dahling, un peu de retenue voyons, vous pourriez donner des envies à certaines.
Joan: Peu importe! J'ai la rage! Tskrprskskskcrpkcrprpr! Il faut que je passe mes nerfs sur quelque chose!
Tallulah: En ce cas, prenez cette hache dahling, j'ai justement un baobab à faire couper dans mon jardin.
Orfeo: Pas sûr que donner une hache à Joan soit une bonne idée. Quoi qu'il en soit, la parole est maintenant à Sylvia Fowler, afin de classer les performances...
dignes d'un Oscar : Barbara Stanwyck (Ladies of Leisure): là aussi, revoir les films a du bon, puisque j'ai été cette fois-ci totalement conquis par la mise en scène de Capra, et surtout par le jeu extraordinaire de l'actrice qui qui se montre à la fois vulgaire et séduisante, ou encore rieuse et vulnérable, avec un incroyable brio et une justesse constante. Il faut que je réécrive cet article à l'aune de ces nouvelles redécouvertes, mais je n'ai pas le temps dans l'immédiat.
dignes d'une nomination : Nancy Carroll (The Devil's Holiday), Mary Duncan (City Girl): j'avais oublié à quel point elle était merveilleuse avec cette héroïne volontaire qui n'a pas peur de dire les choses en face, d'autant qu'elle use d'un jeu sobre qui renforce énormément le côté émotionnel de sa performance, et agrémente joliment cet excellent Murnau. Jeanette MacDonald (The Love Parade), Helen Morgan (Applause), Norma Shearer (The Divorcee): voir ci-dessus.
séduisantes : Norma Shearer (Their Own Desire), Gloria Swanson (The Trespasser), Greta Garbo (Anna Christie) et (Romance): voir ci-dessus. Toujours concernant Garbo, citons encore le très charmant The Kiss, passionnante intrigue policière où la Divine au pic de sa beauté ne manque pas de crever l'écran. Nina Mae McKinney (Hallelujah!): parce qu'elle chante et danse tout en ayant beaucoup de présence à l'écran du haut de ses dix-sept ans. Joan Peers (Applause): pas vraiment expérimentée, elle part trop souvent dans un sur-jeu outrancier, mais des scènes plus solides et son personnage dynamique font qu'on apprécie pleinement son rôle, bien que les regards soient entièrement tournés vers Helen Morgan. Barbara Stanwyck (The Locked Door): juste parce que c'est Barbara et que pour son premier vrai rôle elle montre déjà toute l'étendue de son charisme.
sans saveur : Mary Pickford (The Taming of the Shrew): un timbre rauque et une théâtralité exacerbée qui me font définitivement préférer ses personnages muets. Ruth Chatterton (Sarah and Son): c'est vraiment dommage car contrairement à beaucoup, elle fait vraiment l'effort de composer un personnage, mais le rendu est hélas trop crispant pour me donner envie de l'homologuer.
à découvrir : Jean Arthur (The Saturday Night Kid), Claudette Colbert (The Big Pond) (Manslaughter) (Young Man of Manhattan), Joan Crawford (Our Blushing Brides), Marion Davies (Not So Dumb), Kay Francis (Raffles), Janet Gaynor (Lucky Star)
grandes performances en langue étrangère : Louise Brooks (Die Büchse der Pandora) (Tagebuch einer Verlorenen): les deux rôles les plus mythiques d'une actrice non moins légendaire, que je ne nomme pas pour les raisons évoquées plus haut mais qui devrait être honorée tout son content dans une prochaine liste de prix internationaux.
← Best Actress 1928/1929 Best Actress 1929/1930 Best Actress 1930/1931 →
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire