Au programme:
* Joan Crawford - Possessed
* Susan Hayward - Smash-Up: The Story of a Woman
* Dorothy McGuire - Gentleman's Agreement
* Rosalind Russell - Mourning Becomes Electra
* Loretta Young - The Farmer's Daughter
A y regarder de près, cette sélection n'a rien de très surprenant. En effet, la nomination de Dorothy McGuire était quasiment assurée puisque Gentleman's Agreement était considéré comme le film de l'année, ce dont témoignent ses trois Oscars dont meilleur film et meilleur réalisateur sur huit nominations, même si dans le cas de l'actrice c'est moins la question du travail qui a primé que celle du buzz autour de l'ensemble. De son côté, Joan Crawford était encore toute auréolée du succès de son comeback entériné par Mildred Pierce, ce qui ajouté à un rôle de semi-folle tel que l'époque les affectionnait devait la conduire de facto sur le chemin d'une seconde nomination, bien que sa victoire deux ans plus tôt n'ait pas fait d'elle la favorite pour cette cérémonie. Susan Hayward venait quant à elle d'obtenir son premier grand rôle après dix ans de figuration et de films médiocres, aussi cette révélation ne pouvait être snobée par l'Académie, selon la même logique qui valut à Jane Wyman sa nomination l'année précédente. Sans compter que dans ce film, Hayward jouait une alcoolique, aussi l'inclusion dans la sélection officielle allait-elle de soi. Néanmoins, c'est entre les deux autres concurrentes que se joua la victoire, et c'est à la stupeur générale que Rosalind Russell perdit, après avoir fait la course en tête pendant toute la saison. Il faut dire que son talent n'était plus à prouver, et au bout de trois nominations, il semblait tout naturel de la récompenser. Mais c'était sans compter sur Loretta Young, vétérane plus ancienne encore que Russell, qui figurait dans un grand succès populaire prouvant à nouveau le primat du critère "engouement" sur le critère "overdue" les soirs de remises de prix.
Quoi qu'il en soit, voici une sélection tout à fait charmante qui ne me pose pas vraiment problème, bien que je préfère malgré tout m'orienter vers des choix différents, de quoi me pousser à...
Quoi qu'il en soit, voici une sélection tout à fait charmante qui ne me pose pas vraiment problème, bien que je préfère malgré tout m'orienter vers des choix différents, de quoi me pousser à...
... retirer:
Dorothy McGuire - Gentleman's Agreement: Je l'avais trouvée absolument insignifiante la première fois, mais c'est le type de performance qui gagne à être revue. En effet, on se rend bien compte que l'actrice tente de travailler son personnage avec le peu à sa disposition, et sa capacité à imposer sa présence alors que le scénario ne lui facilite vraiment pas la tâche est déjà un effort à louer. Le problème, c'est qu'elle se fait systématiquement voler la vedette par le reste du casting, souffrant notamment de la comparaison avec la tornade Celeste Holm, mais il faut de surcroît noter qu'elle ne parvient pas à rendre plus limpide toute l'intrigue laborieuse concernant Kathy. En effet, elle ne semble jamais à l'aise avec cet exercice du "je ne suis pas antisémite, mais...", et n'en résulte qu'un personnage assez lourd pour lequel on n'arrive à ressentir ni sympathie, ni antipathie. De fait, elle résume bien mon sentiment envers le film : la démarche est louable quoiqu'un peu naïve, mais les personnages ont trop valeur de prétexte pour séduire, et si la seule qui m'a plu est Anne, c'est bien parce que Celeste Holm est l'une des rares à donner de la profondeur à son rôle. D'où mon impression très mitigée sur McGuire qui tente quand même quelque chose pour se tirer vers le haut, même si l'on reste entièrement sur sa faim avec Kathy.
Rosalind Russell - Mourning Becomes Electra: Voilà bien longtemps que je n'ai pas revu le film, en partie à cause de sa très longue durée pour une histoire aussi statique, bien que passionnante, mais je me souviens avoir été assez impressionné par la force des deux rôles féminins pour pouvoir en dire du bien, même si dans les faits je ne suis pas totalement sensible à ces personnages. Ces réflexions posées, j'aurai bien du mal à parler très en détail du travail de Russell ici, mais la théâtralité exacerbée de son jeu n'en reste pas moins une véritable claque pour le spectateur, rythmant de façon bienvenue ces trois heures de fiction. Concernant Lavinia, il est encore à mettre au crédit de l'actrice que le personnage n'est jamais brossé avec complaisance, la noirceur de l'héroïne n'étant d'ailleurs jamais agaçante, comme en témoigne cette scène poignante où Lavinia semble momentanément lumineuse après son retour de voyage aux côtés d'Orin. Il me faudra aller revoir le film pour m'en refaire une idée plus précise, mais dans l'immédiat je préfère vraiment d'autres performances de l'actrice, et même si j'aurais adoré la savoir oscarisée, je n'aurais pas été plus enthousiaste que ça si ç'avait été pour ce rôle.
Joan Crawford - Possessed: Je l'enlève uniquement parce que je préfère mettre 1947 à profit pour sélectionner des actrices que je nomme moins souvent qu'à l'accoutumée, mais comme on parle de Joan Crawford, il va de soi que je suis nécessairement séduit par cette performance. Il faut dire qu'une fois de plus, la star ressort le grand jeu, et pas une expression extrêmement démonstrative ne manque, qu'il s'agisse de son air ahuri dans les scènes introductives ou de son visage terrifiant lors du passage de la brosse et de l'escalier, sans parler de ce sourire machiavéliquement jouissif qui passe sur ses lèvres alors qu'elle tient un revolver à la main. En somme, Crawford fait du Crawford puissance mille, et sait parfaitement qu'on regarde ce film davantage pour admirer la star qu'un personnage dont la folie est toutefois bien soulignée, quoique de façon paroxystique. Ceci dit, j'ai découvert Possessed moins de vingt-quatre heures après avoir vu Humoresque, et force est de reconnaître que le premier souffre de la comparaison. Car rien, absolument rien, ne survit à Joan Crawford dans Humoresque. Et puis, on retrouvera l'actrice à d'autres reprises, aussi peut-elle bien rester dans l'ombre cette année.
Ma sélection:
Susan Hayward - Smash-Up: Le premier rôle où j'ai découvert Susan Hayward et... What a performance! Très clairement, c'est elle qui domine la sélection officielle puisque lorsqu'il s'agit de faire évoluer un personnage, elle se révèle imbattable dans cet exercice. En effet, elle part d'une approche très calme qui fait bien ressentir toute la sensibilité de l'héroïne, avant de faire venir le drame de façon progressive, au point que tous les passages la montrant prise au piège de l'alcool sonnent entièrement justes. Elle nous entraîne ainsi dans sa descente aux enfers avec une précision qui suscite de facto la compassion, et s'impose par-là même comme l'une des interprètes les plus émouvantes de l'année. D'ailleurs, le caractère touchant du personnage est encore renforcé par ses attitudes maternelles très crédibles qui s'insèrent parfaitement dans cette histoire poignante à souhait. En somme, voilà une très grande performance, qui témoigne que Susan Hayward est vraiment la meilleure de toutes pour incarner les affres de l'alcoolisme.
Jane Greer - Out of the Past: Dans ce qui reste probablement le rôle de sa vie, Jane Greer donne vie à une femme fatale absolument mythique qui m'a fait comprendre pourquoi j'en avais toujours beaucoup entendu parler en bien. Pour commencer, sa présence à l'écran est extraordinaire, et tous ses regards perçants accrochent irrésistiblement le spectateur, de quoi prouver que si l'héroïne est aussi marquante, c'est bien parce que l'actrice a le charisme et le talent nécessaires pour la faire rentrer dans la légende, en plus d'un pouvoir de séduction qui fait des merveilles. Mais ce qui fait par-dessus tout la force de cette interprétation, c'est que Jane Greer donne de multiples dimensions au personnage : parfois dure, parfois enfantine, on ne sait jamais ce qu'il y a réellement derrière la façade, à l'image de ce mirifique climax où elle parvient à sourire de façon presque machiavélique en regardant ses partenaires masculins se battre, avant d'arborer une expression innocente qui paraît finalement sincère. Tant de réussites au sein d'un chef-d'oeuvre du film noir ne pouvaient décemment pas être ignorées.
Wendy Hiller - I Know Where I'm Going! Le film date de 1945 mais comme vous le savez, je me base sur les dates de sortie aux Etats-Unis, ce qui le rend éligible pour cette année, d'autant que ça ne fait en tout qu'un décalage d'un an et demi, ce qui reste fort correct pour considérer ce chef-d'oeuvre comme encore dans l'air du temps, bien que ça corse le jeu entre deux héroïnes de Powell et Pressburger dans une même liste (voir ci après). Quoi qu'il en soit, l'immense Wendy Hiller est exceptionnelle dans ce très beau rôle fort bien écrit, et je suis absolument ravi de la distinguer pour, sans doute, sa meilleure performance. En effet, non contente de faire absolument honneur à une héroïne fort complexe dont les certitudes quant à son avenir s'ébranlent peu à peu, l'actrice réussit l'exploit de suggérer toute cette confusion sans jamais surjouer la moindre émotion, et restant tout à fait fidèle à l'esprit de Joan Webster, qui reste ainsi toujours maîtresse d'elle-même et déterminée, tout du moins en apparence. Wendy saisit en outre l'équilibre très fragile entre le degré de sympathie qu'on est censé éprouver pour le personnage et une certaine hauteur sans doute assez désagréable à certains, et c'est bien par ce balancement que son jeu s'en trouve nuancé constamment sans jamais dévier de la ligne à laquelle elle doit se tenir. Ainsi, Joan peut très bien être assez autoritaire, et parfois très directe dans sa façon d'interroger d'autres personnages, mais tout est parfaitement équilibré pour ne jamais franchir la ligne du snobisme. Intrépide et curieuse d'aventure, Joan reste également sujette au doute, ce que l'actrice ne s'autorise à montrer que dans les moments où elle est seule dans sa chambre dans la première partie, avant de laisser se fissurer cette carapace progressivement lors d'un bal écossais, et plus encore lors d'une dangereuse escapade sur l'eau. Par ailleurs, sa réaction face à la fillette qui la questionne sans discrétion reste formidable d'humour tant l'actrice parvient à noyer son léger agacement dans un sourire toutefois bienveillant. A la fin, on s'intéresse constamment aux états d'âme de l'héroïne qui reste formidablement sympathique malgré ses défauts, et cette performance reste tellement subtile que l'exploit est à saluer mille fois.
Wendy Hiller - I Know Where I'm Going! Le film date de 1945 mais comme vous le savez, je me base sur les dates de sortie aux Etats-Unis, ce qui le rend éligible pour cette année, d'autant que ça ne fait en tout qu'un décalage d'un an et demi, ce qui reste fort correct pour considérer ce chef-d'oeuvre comme encore dans l'air du temps, bien que ça corse le jeu entre deux héroïnes de Powell et Pressburger dans une même liste (voir ci après). Quoi qu'il en soit, l'immense Wendy Hiller est exceptionnelle dans ce très beau rôle fort bien écrit, et je suis absolument ravi de la distinguer pour, sans doute, sa meilleure performance. En effet, non contente de faire absolument honneur à une héroïne fort complexe dont les certitudes quant à son avenir s'ébranlent peu à peu, l'actrice réussit l'exploit de suggérer toute cette confusion sans jamais surjouer la moindre émotion, et restant tout à fait fidèle à l'esprit de Joan Webster, qui reste ainsi toujours maîtresse d'elle-même et déterminée, tout du moins en apparence. Wendy saisit en outre l'équilibre très fragile entre le degré de sympathie qu'on est censé éprouver pour le personnage et une certaine hauteur sans doute assez désagréable à certains, et c'est bien par ce balancement que son jeu s'en trouve nuancé constamment sans jamais dévier de la ligne à laquelle elle doit se tenir. Ainsi, Joan peut très bien être assez autoritaire, et parfois très directe dans sa façon d'interroger d'autres personnages, mais tout est parfaitement équilibré pour ne jamais franchir la ligne du snobisme. Intrépide et curieuse d'aventure, Joan reste également sujette au doute, ce que l'actrice ne s'autorise à montrer que dans les moments où elle est seule dans sa chambre dans la première partie, avant de laisser se fissurer cette carapace progressivement lors d'un bal écossais, et plus encore lors d'une dangereuse escapade sur l'eau. Par ailleurs, sa réaction face à la fillette qui la questionne sans discrétion reste formidable d'humour tant l'actrice parvient à noyer son léger agacement dans un sourire toutefois bienveillant. A la fin, on s'intéresse constamment aux états d'âme de l'héroïne qui reste formidablement sympathique malgré ses défauts, et cette performance reste tellement subtile que l'exploit est à saluer mille fois.
Gene Tierney - The Ghost and Mrs. Muir: J'avais tellement adoré le rôle la première fois que je restais convaincu qu'il s'agissait d'une grande performance. En revoyant le film hier soir, j'ai réalisé que ce n'est pas le cas, comme en témoigne cette première partie bourrée de tics et de petits sourires mécaniques qui seraient devenus très vite agaçants si Mankiewicz n'était intervenu pour corriger cette première lecture du personnage. De même, Tierney livre de nombreuses expressions parfois trop forcées pour être crédibles, à l'instar de sa rencontre avec le capitaine. Cependant, malgré ces petits défauts de fabrication, un charme incomparable opère, et si cette magie tient sans doute davantage du film que de l'actrice, ça n'a finalement aucune importance tant celle-ci parvient à fasciner à travers cette héroïne extrêmement sympathique. Elle est par exemple idéale pour restituer la malice de cette jeune veuve, de quoi rendre ses dialogues avec Rex Harrison particulièrement savoureux. Et puis, cerise sur le gâteau, Tierney s'arrange, comme dans Heaven Can Wait quatre ans plus tôt, pour donner le meilleur d'elle-même en dame mûre, et rien que pour ça elle mérite amplement de figurer dans ma liste.
Wendy Hiller - I Know Where I'm Going!
Pour conclure, la minute Sylvia Fowler, quant aux performances...
dignes d'un Oscar: Jane Greer (Out of the Past), Wendy Hiller (I Know Where I'm Going!), Susan Hayward (Smash-Up), Deborah Kerr (Black Narcissus): voir ci-dessus.
dignes d'une nomination: Joan Crawford (Possessed): voir ci-dessus. Joan Fontaine (Ivy): une très grande surprise où l'actrice joue à contre-emploi pour composer un personnage peu scrupuleux malgré son aura romantique et ses robes en dentelle. Si l'année n'était pas tant chargée, elle serait clairement mon sixième choix. Rosalind Russell (Mourning Becomes Electra), Gene Tierney (The Ghost and Mrs. Muir): voir ci-dessus.
séduisantes: Loretta Young (The Farmer's Daughter) (The Bishop's Wife): j'ai adoré le second film, et je me demande même si je ne préfère pas l'actrice dans celui-ci. Marlene Dietrich (Golden Earrings): d'accord, ce jeu outrancier est l'une de choses les plus insondables au monde, mais la séduction de l'ensemble suffit à faire son petit effet. Irene Dunne (Life with Father): parce que c'est Irene Dunne et que c'est toujours très bon, même si on est loin de ses meilleurs rôles. Myrna Loy & Shirley Temple (The Bachelor and the Bobby-Soxer): bien que la grande différence d'âge empêche de croire totalement à ces deux sœurs, les actrices sont si charmantes qu'elles font passer un très bon moment. Surtout Myrna qui éblouit à nouveau sans quasiment rien faire. Claire Trevor (Born to Kill): une performance captivante à souhait et une très bonne idée de casting, même si en toute honnêteté je ne suis pas aussi enthousiaste que je l'aurais imaginé.
sans saveur: Ida Lupino (Deep Valley): je-je n'ai rien contre cette performance dans l'absolu. Je-Je trouve même qu'Ida Lupino fait bien la fille rustre et timorée. Mais com-combien de temps peut-on tenir devant une héroïne qui commence toutes ses phrases en bégayant de façon ultra mécanique, le tout dans un film franchement décevant? En définitive on ne ressent pas grand chose pour elle. Dorothy McGuire (Gentleman's Agreement): voir ci-dessus. Lana Turner (Green Dolphin Street): Lana qui escalade une falaise pour se retrouver dans un couvent, entre deux heures de commérages sur l'économie néo-zélandaise. Tout va bien.
à découvrir: Joan Bennett (The Macomber Affair), Claudette Colbert (The Egg and I), Maureen O'Hara (Miracle on 34th Street), Ann Sheridan (Nora Prentiss), Claire Trevor (Born to Kill), Teresa Wright (Pursued)
séduisantes: Loretta Young (The Farmer's Daughter) (The Bishop's Wife): j'ai adoré le second film, et je me demande même si je ne préfère pas l'actrice dans celui-ci. Marlene Dietrich (Golden Earrings): d'accord, ce jeu outrancier est l'une de choses les plus insondables au monde, mais la séduction de l'ensemble suffit à faire son petit effet. Irene Dunne (Life with Father): parce que c'est Irene Dunne et que c'est toujours très bon, même si on est loin de ses meilleurs rôles. Myrna Loy & Shirley Temple (The Bachelor and the Bobby-Soxer): bien que la grande différence d'âge empêche de croire totalement à ces deux sœurs, les actrices sont si charmantes qu'elles font passer un très bon moment. Surtout Myrna qui éblouit à nouveau sans quasiment rien faire. Claire Trevor (Born to Kill): une performance captivante à souhait et une très bonne idée de casting, même si en toute honnêteté je ne suis pas aussi enthousiaste que je l'aurais imaginé.
sans saveur: Ida Lupino (Deep Valley): je-je n'ai rien contre cette performance dans l'absolu. Je-Je trouve même qu'Ida Lupino fait bien la fille rustre et timorée. Mais com-combien de temps peut-on tenir devant une héroïne qui commence toutes ses phrases en bégayant de façon ultra mécanique, le tout dans un film franchement décevant? En définitive on ne ressent pas grand chose pour elle. Dorothy McGuire (Gentleman's Agreement): voir ci-dessus. Lana Turner (Green Dolphin Street): Lana qui escalade une falaise pour se retrouver dans un couvent, entre deux heures de commérages sur l'économie néo-zélandaise. Tout va bien.
à découvrir: Joan Bennett (The Macomber Affair), Claudette Colbert (The Egg and I), Maureen O'Hara (Miracle on 34th Street), Ann Sheridan (Nora Prentiss), Claire Trevor (Born to Kill), Teresa Wright (Pursued)
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