En intitulant mon article sur Dancers in the Dark "Déception", j'ai aussitôt regretté de n'avoir pas réservé ce titre pour A Gentleman After Dark, un film de série B totalement quelconque d'Edwin Marin, le réalisateur attitré des Maisie. Mais à la réflexion, déception n'aurait pas été un terme approprié: je n'attendais rien du film, et il m'a d'ailleurs fallu de longs mois avant de me décider à tenter l'expérience.
En fait, je n'ai même pas grand chose à dire: l'histoire est extrêmement misogyne en présentant un personnage féminin très noir et superficiel, si bien que le film perd tout intérêt d'entrée de jeu, et l'on se demande bien ce que Miriam Hopkins est allée faire dans cette galère. Certes, elle devait être avide de tourner après avoir commencé à chuter de son piédestal depuis la fin des années 1930, mais le résultat est plutôt une erreur de casting flagrante, le rôle étant d'abord prévu pour Ilona Massey. Non que Miriam ne soit pas désirable avec son visage marqué par la quarantaine, mais le personnage est si en-dessous de ses capacités qu'elle ne prend même pas la peine de lui apporter la moindre nuance: quand on la découvre après son accouchement, elle se contrefiche d'ores et déjà de son bébé; quand son mari lui offre un bijou de luxe, elle le lui arrache des mains les yeux luisants de désir; et elle passe ensuite le reste du film à se balader dans son appartement avec son amant, avant de revenir dans le second acte pour faire chanter sa fille. On retrouve dans Flo Melton des traits communs à d'autres héroïnes hopkinsiennes, dont l'absence de scrupules de Becky Sharp et la rédemption victimaire des blondes flamboyantes de 1931, mais il n'y a curieusement rien à tirer du personnage: Flo est simplement mauvaise et l'actrice ne fait que le strict minimum en gardant systématiquement un air maussade tout du long.
Les autres acteurs ne sont guère meilleurs, en particulier Brian Donlevy qui, tout crédible soit-il en père attendri et naïf au départ, perd toute cohérence en se transformant subitement en meurtrier diabolique qui agit de sang froid pour protéger sa fille des griffes de sa mère. Pour que ce virage à 180° mène quelque part, il aurait fallu que l'acteur laisse davantage planer le doute quant à ses soupçons envers son épouse, mais comment le prendre au sérieux alors qu'il n'a pas l'air de se rendre compte de la relation de celle-ci avec son amant alors qu'ils frayent toujours ensemble sous son nez depuis le début? Non, rien de tout cela ne fait sens, et l'on décroche complètement à partir du second acte, lorsque la fille adulte plus que transparente tente d'organiser ses fiançailles dans la famille richissime qui l'a recueillie. La mise en scène n'aide pas, pour sa part, à donner plus de vigueur au film, même si les premières images de boulevards au Nouvel An et d'ours en peluche envahissant l'appartement semblent plutôt prometteuses de prime abord. Il y a bien un plan où Miriam Hopkins se félicite de sa taille de guêpe après l'accouchement en contemplant son reflet dans un miroir, tandis que son amant coupe la scène de façon symétrique, mais comme leur liaison sera révélée à la face du monde sans aucune subtilité par la suite, l'intérêt d'un tel plan devient subitement caduque.
Je n'ai pas grand chose à ajouter. A Gentleman After Dark m'a ennuyé au bout de dix minutes et le caractère ultra mineur du projet est en soi très décevant. Le seul intérêt du film est de souligner que Miriam Hopkins était en chute libre en 1942, mais c'est tellement négatif que je ne veux pas y penser! Le fait qu'elle n'ait plus fait que deux seconds rôles pour tout le reste de la décennie est déprimant, quoiqu'elle y soit heureusement fabuleuse et dans deux registres très différents qui plus est. Hélas, ce gentleman mérite vraiment de rester dans l'obscurité de son titre, et je suppose que la note finale tourne autour d'un petit 4, sans être vraiment sûr que ça mérite autant.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire