mercredi 10 août 2016

The Dark Mirror (1946)


De ce film noir de Robert Siodmak, je gardais un assez bon souvenir pour ses effets spéciaux d'une part, et pour le double-rôle d'Olivia de Havilland en jumelles angélique et maléfique de l'autre. Malheureusement, ce qui tendait déjà vers le médiocre en phase de découverte le devient encore plus après revisite. Pourquoi?

Déjà, parce que l'ambiance "noire" qui aurait dû servir de fil directeur est massacrée par l'usage récurent d'une musique guillerette à chaque nouveau rebondissement. Par exemple, quand le détective, Thomas Mitchell, découvre l'existence de la seconde jumelle, la voilà introduite sur un petit jingle ridicule. Et quand on cherche à démêler le faux du vrai (l'une des deux sœurs ayant commis un meurtre, il faut déterminer laquelle alors que chacune ment pour protéger l'autre), chaque hochement de tête est accompagné d'une sonorité de sitcom du plus mauvais aloi. Rien qu'avec ça, l'atmosphère est brisée dans les dix premières minutes, à tel point qu'on se demande si la coupable n'a pas tué sa victime au rythme de bruitages comiques à la trompette! L'autre gros défaut du film, c'est d'avoir inventé une histoire d'amour sulfureuse entre le psychiatre employé pour différencier les sœurs, et l'une des jumelles. Cette problématique trouve un écho plus tard dans l'intrigue, mais ça n'en est pas moins ridicule et hors de propos: difficile de croire qu'un médecin effacé devienne amoureux transi en moins d'une journée juste en montrant des taches d'encre à deux sosies. En outre, on se contrefiche de ses sentiments: on veut juste savoir qui a fait le coup... ce qui n'est pas bien difficile à deviner au demeurant.

Ne lisez pas plus loin à cause des révélations, mais il n'y a pas vraiment de suspense. En effet, l'une des sœurs est si immédiatement hargneuse, nerveuse et dominatrice, et l'autre si calme et posée, que le mystère s'évapore au bout d'un quart d'heure seulement. Quand on cherche à déterminer leurs alibis, la gentille regarde sa sœur telle une oie blanche pour mieux répéter sagement ce qu'elle lui dit, si bien qu'on ne comprend même pas pourquoi les détectives vont mettre plus d'une heure à trouver laquelle a fait le coup. Olivia de Havilland livre tout de même une performance digne d'intérêt, en révélant la faiblesse du caractère de la méchante et la force cachée de la gentille, mais ce n'est plus nécessairement un rôle que j'apprécie. A vrai dire, je trouve Bette Davis nettement meilleure dans A Stolen Life, ne serait-ce que pour sa capacité à nuancer mieux encore la mauvaise jumelle, plus immature que vraiment maléfique.

Autrement, la mise en scène de Robert Siodmak assure à l'ensemble une certaine cohérence, malgré ses choix musicaux désastreux. On appréciera entre autres l'usage de reflets dans le miroir, qui accentue la dualité de la relation fraternelle. Les effets spéciaux sont eux aussi une réussite, en particulier pour le plan des deux sœurs enlacées, mais on sera en droit de préférer la virtuosité de Stolen Life, avec son passage de cigarette de main en main. C'est hélas tout ce que j'ai à dire sur la question: The Dark Mirror m'a profondément ennuyé en cette revisite, Lew Ayres manque cruellement de piquant et Thomas Mitchell n'est qu'égal à lui-même, de telle sorte que seuls les défauts du film ont mobilisé mon attention. Olivia de Havilland ne démérite pas, mais elle est tout de même beaucoup plus intéressante dans To Each His Own la même année, malgré un rôle moins alléchant sur le papier. 5+.

2 commentaires:

  1. Je l'ai vu il n'y a pas longtemps, sur ton conseil d'ailleurs, et je dois dire que j'ai apprécié. Evidemment, le point noir est le manque de suspense flagrant. Mais la réalisation est réussie (j'aime bien Siodmak), j'ai pris plaisir à l'ambiance et Olivia offre une jolie performance.
    D'ailleurs par moments la "gentille" jumelle me faisait furieusement penser à... Joan Fontaine ! Ce qui n'est pas très étonnant...
    Je reconnais que ce n'est pas le meilleur film dans le genre "psychologique" (Lizzie est bien plus abouti), mais j'en ai vu suffisamment pour apprécier.

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    1. Siodmak n'est pas mon réalisateur préféré, mais je lui reconnais un certain talent. J'avais d'ailleurs aimé le film la première fois, sans le trouver excellent.

      Lizzie me semble très réussi du côté de l'histoire et de la performance, mais ça ne m'avait pas trop plu au niveau de la forme et de l'ambiance. Ça méritera une revisite. Pour ne l'avoir vu qu'une fois, mon sentiment est que Lizzie remportait le match du scénario et de l'interprétation, tandis que Three Faces of Eve remportait celui de l'atmosphère "de prestige". A revoir!

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