mercredi 25 mai 2022

Hiéroglyphes et caméras


Après Gourdon, je me suis dirigé vers la deuxième sous-préfecture du Lot, Figeac, que j'avais déjà vue dans les années 1990 à l'occasion de la visite du musée Champollion, mais dont je n'avais aucun souvenir. Tout fut donc à redécouvrir, et il y a de quoi s'occuper, puisque la ville regorge d'ogives et de colombages témoins d'un riche passé médiéval. Pour ma part, je suis arrivé dans la place en fin d'après-midi : beaucoup de monuments étaient déjà dans la pénombre du soir pour justifier un mitraillage photographique en règle, mais la visite n'en fut pas moins intéressante au gré des rues anciennes. Dommage qu'une odeur persistante d'urine dans de trop nombreux recoins ait franchement gâché la promenade.


En contrepartie, les gens ont l'air vraiment agréable dans ces pays occitans, loin de la mentalité des Agenais et des Girondins. Par exemple, alors que je photographiais cette jolie tour carrée de l'hôtel du Viguier du Roy, ornée d'une tourelle du XIVe siècle, une passante s'est arrêtée pour me laisser le temps d'immortaliser le cliché. Et comme je suis très sociable quand je me sens en confiance, je lui ai retourné son sourire en la priant de ne pas interrompre sa course pour moi, d'autant plus que j'étais en train de zoomer sur le haut du bâtiment. "Il y a peu de chance que j'atteigne le cadre, alors", me répondit-elle d'une manière tout à fait charmante. J'ai fait des rencontres similaires dans les rues de Rodez et d'Albi, preuve que les gens de cette région sont beaucoup plus détendus qu'en Aquitaine, ce qui fait un bien fou quand on a eu le malheur de connaître l'enfer bordelais.


L'hôtel de la Monnaie, le palais Balène, les vieilles maisons de la rue Gambetta : Figeac regorge décidemment d'attraits, qui datent pour la plupart des XIIIe et XIVe siècles, mais qui s'apprécieront mieux encore un peu plus tôt dans l'après-midi. La place Carnot n'est pas en reste : sa halle de la toute fin du XIXe siècle ne masque nullement la beauté médiévale des bâtiments alentour, des façades à colombages sur fond de briques…


… à la tourelle étroite de cette maison qui veille sur l'animation de la place en début de soirée.


Le cœur de la ville reste cependant la place Champollion, où se dressent de merveilleux monuments dentelés d'ogives, dont la maison natale du plus célèbre citoyen de Figeac, la maison du Griffon, considérée comme le plus vieil édifice de la cité, et cette superbe demeure gothique du XIVe siècle. Le héros de la ville, Jean-François Champollion, est considéré comme le père de l'égyptologie moderne et reste le premier à avoir déchiffré avec succès les mystérieux hiéroglyphes du temps des pharaons, malgré des tentatives antérieures remontant au Xe siècle. Il était trop tard pour faire la visite du musée ce soir-là, mais je me souviens avoir été très marqué dans mon enfance par les répliques de la pierre de Rosette qu'on pouvait y voir.


Plus éblouissante encore, la reproduction géante en granite noir disposée sur la place des Écritures se marie finalement très bien aux ogives médiévales et aux pierres blanches du Quercy. Très attaché au pays antique qui le fascinait, Champollion avait déclaré : « Je suis tout à l'Égypte, elle est tout pour moi. » Eh bien de mon côté, j'en connais certaines qui vont encore plus loin et qui prétendent sans détours…


… être l'Égypte ! Assurément une noble ambition.


Claudette Colbert nous rappelle surtout qu'un autre de ses compatriotes, avec qui elle partagea notamment l'affiche dans les décevants Mondes privés et Tovarich, quitta également la France pour mener une brillante carrière cinématographique aux États-Unis. Un festival a visiblement rendu hommage à Charles Boyer l'année dernière, 122 ans après sa naissance à Figeac. J'espère qu'Elle et Lui, L'Étrangère, Par la porte d'or, Hantise et Madame de… ont fait partie de la sélection.


Des remparts médiévaux aux collines verdoyantes de l'autre côté du Célé, en passant par des hôtels particuliers foisonnant dans tout le centre historique, au son des échos lointains d'Amon-Rê et d'Hollywood, Figeac est assurément une ville captivante qui mérite le détour. Je lui ai préféré l'ocre sérénité de Gourdon, mais Figeac n'en reste pas moins, par la richesse de son patrimoine, la plus belle ville du département.

Et maintenant, une question pour toi, cher lecteur amoureux du camp et des divas flamboyantes : qui est ta pharaonne préférée au cinéma ? Anne Baxter ou Claudette Colbert ? 

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