Je n'ai jamais adoré La Vie est belle de Frank Capra, mais s'il y a bien un film intouchable, c'est celui-ci. En fait, j'ai toujours eu un problème avec le réalisateur: je n'aime pas spécialement le rythme qu'il donne à ses histoires, ni les personnages manichéens qui foisonnent dans son univers, à quelques exceptions près dont Megan Davis. Mais La Vie est belle est considéré comme un tel classique intemporel que j'étais resté sur l'idée qu'il s'agissait vraiment d'un chef-d’œuvre, depuis mon premier visionnage quand j'avais environ seize ans. Qu'a donné la revisite?
Eh bien, ça confirme l'impression initiale, celle d'un relatif ennui de part et d'autre, mais également celle que le film regorge de grandes qualités. Par où commencer? Parmi les points négatifs, on relèvera que la construction narrative sous forme de flashback est trop longue: on sait qu'un ange va intervenir dès la première seconde, mais... il faut attendre une heure trois quarts pour que celui-ci daigne pointer le bout de son nez. Il faut certes présenter les bases afin de comprendre pourquoi George Bailey va se suicider en ce soir de Noël, mais puisque la réponse à la question initiale ne démarre qu'après une durée digne d'un film entier, on a le sentiment d'un déséquilibre. En fait, le point le plus original et captivant de l'histoire est précisément la rencontre de l'ange et du héros, afin de voir comment aurait été la vie sans lui, et l'on regrette que tout cela soit rejeté dans le dernier quart d'heure. Tout y est pourtant bien traité, en premier lieu la critique des modes de vie contemporains quand le village se transforme en Babylone du stupre, mais on passe tout de même trop vite sur la vie parallèle des personnages, tous encore plus clichés que dans leur réelle destinée: on a à peine le temps d'apercevoir la mère aigrie qu'on passe à la vieille fille à lunettes ou au barman bourrin, et tout va finalement trop vite dans cette seconde partie. A l'inverse, l'interminable premier acte n'en finit pas de parler de banques et remboursements, si bien qu'on ne peut manquer de s'ennuyer en attendant l'ange. Tous ces sujets sont utiles, mais on aurait pu raccourcir certains dialogues qu'ils n'auraient rien perdu de leur pertinence. Idem pour les longs passages romantiques avec Donna Reed, où il faut attendre pendant près de dix minutes que les amoureux transis se disent quelque chose en rapport avec leurs sentiments!
En revanche, s'il est une chose qu'on ne peut certainement pas reprocher au film, ce sont ses personnages manichéens. Pour le coup, ceux-là ne me posent pas problème car It's a Wonderful Life s'assume pleinement comme un conte de Noël, à grand renfort de cloches et de sapins, et il faut précisément que les personnages correspondent à ce contexte. Frank Capra reste ainsi très fidèle à son idéologie de cinéma: le héros a le cœur sur la main et se bat pour les opprimés, le méchant est très méchant et en plus il se déplace en chaise roulante pour bien montrer qu'il n'est pas gentil du tout, la fiancée est super sympa et très compréhensive, la mère charmante comme tout, la bonne noire a évidemment son lot de répliques croustillantes, la blonde aguicheuse également, etc. Or, rien de tout cela ne pose problème: on s'attache malgré tout à ces caractères emplis de clichés, et l'on a réellement envie que tout continue à bien aller pour eux, malgré la présence d'un avatar d'Ebenezer Scrooge dans la ville. On reprochera simplement la présence d'enfants pleurnichards aux noms de chiens, mais autrement, tout le monde est touchant. La seule chose qui ne passe vraiment pas pour moi, c'est le retour à la vie une fois que George a été sauvé: entre les sauts de joie ridicules dans la neige et l'épilogue dégoulinant de sucre, c'est indigeste tant c'est appuyé. Mais d'un autre côté, ça fait du bien d'observer un monde parallèle où l'entraide et la fraternité existent encore, ce qui fait cruellement défaut à l'humanité en temps normal. Autrement, j'aime l'idée de ce héros plein de rêves qui laisse les autres les réaliser à sa place: ce parcours tombe constamment juste et m'évoque deux ou trois choses personnelles qui me touchent.
Eh bien, ça confirme l'impression initiale, celle d'un relatif ennui de part et d'autre, mais également celle que le film regorge de grandes qualités. Par où commencer? Parmi les points négatifs, on relèvera que la construction narrative sous forme de flashback est trop longue: on sait qu'un ange va intervenir dès la première seconde, mais... il faut attendre une heure trois quarts pour que celui-ci daigne pointer le bout de son nez. Il faut certes présenter les bases afin de comprendre pourquoi George Bailey va se suicider en ce soir de Noël, mais puisque la réponse à la question initiale ne démarre qu'après une durée digne d'un film entier, on a le sentiment d'un déséquilibre. En fait, le point le plus original et captivant de l'histoire est précisément la rencontre de l'ange et du héros, afin de voir comment aurait été la vie sans lui, et l'on regrette que tout cela soit rejeté dans le dernier quart d'heure. Tout y est pourtant bien traité, en premier lieu la critique des modes de vie contemporains quand le village se transforme en Babylone du stupre, mais on passe tout de même trop vite sur la vie parallèle des personnages, tous encore plus clichés que dans leur réelle destinée: on a à peine le temps d'apercevoir la mère aigrie qu'on passe à la vieille fille à lunettes ou au barman bourrin, et tout va finalement trop vite dans cette seconde partie. A l'inverse, l'interminable premier acte n'en finit pas de parler de banques et remboursements, si bien qu'on ne peut manquer de s'ennuyer en attendant l'ange. Tous ces sujets sont utiles, mais on aurait pu raccourcir certains dialogues qu'ils n'auraient rien perdu de leur pertinence. Idem pour les longs passages romantiques avec Donna Reed, où il faut attendre pendant près de dix minutes que les amoureux transis se disent quelque chose en rapport avec leurs sentiments!
En revanche, s'il est une chose qu'on ne peut certainement pas reprocher au film, ce sont ses personnages manichéens. Pour le coup, ceux-là ne me posent pas problème car It's a Wonderful Life s'assume pleinement comme un conte de Noël, à grand renfort de cloches et de sapins, et il faut précisément que les personnages correspondent à ce contexte. Frank Capra reste ainsi très fidèle à son idéologie de cinéma: le héros a le cœur sur la main et se bat pour les opprimés, le méchant est très méchant et en plus il se déplace en chaise roulante pour bien montrer qu'il n'est pas gentil du tout, la fiancée est super sympa et très compréhensive, la mère charmante comme tout, la bonne noire a évidemment son lot de répliques croustillantes, la blonde aguicheuse également, etc. Or, rien de tout cela ne pose problème: on s'attache malgré tout à ces caractères emplis de clichés, et l'on a réellement envie que tout continue à bien aller pour eux, malgré la présence d'un avatar d'Ebenezer Scrooge dans la ville. On reprochera simplement la présence d'enfants pleurnichards aux noms de chiens, mais autrement, tout le monde est touchant. La seule chose qui ne passe vraiment pas pour moi, c'est le retour à la vie une fois que George a été sauvé: entre les sauts de joie ridicules dans la neige et l'épilogue dégoulinant de sucre, c'est indigeste tant c'est appuyé. Mais d'un autre côté, ça fait du bien d'observer un monde parallèle où l'entraide et la fraternité existent encore, ce qui fait cruellement défaut à l'humanité en temps normal. Autrement, j'aime l'idée de ce héros plein de rêves qui laisse les autres les réaliser à sa place: ce parcours tombe constamment juste et m'évoque deux ou trois choses personnelles qui me touchent.
Sur la forme, c'est un peu plus décevant. La photographie n'est pas brillante, avec peu d'images vraiment mémorables, et si les décors ont la réputation de compter parmi les plus impressionnants à avoir été construits pour un film, le résultat à l'écran ne dépasse pas les qualités d'un Alice Adams ou autres petites œuvres de la sorte. On apprécie en revanche les étoiles qui conversent entre elles, et Frank Capra a tout de même concocté assez de séquences inoubliables pour donner du brillant à son film, dont la danse dans la piscine, le peignoir dans les hortensias, ou la déclaration d'amour en gros plan devant un téléphone.
Côté interprétation, on est agréablement surpris de voir que les acteurs arrivent à donner vie à leurs personnages à clichés. James Stewart est en particulier très bon: il reprend son rôle d'individu lambda et l'agrémente de tourments et de colère, ce qui ajoute de multiples dimensions à son personnage et apparaît comme un choix somme toute osé, pour un héros de conte de Noël. Sa bonne humeur générale fait par ailleurs plaisir à voir, et vraiment, tout fonctionne à merveille, à l'exception de deux ou trois grimaces filmées en très gros plan à la fin. On tentera également d'oublier les petits sauts de joie dans la neige... Par contre, autant Stewart est assez exceptionnel dans le rôle, avec une interprétation encore plus riche que dans The Shop Around the Corner, autant je reste sidéré par tous les gens qui nomment Henry Travers comme second rôle: il ne fait strictement rien à part déclamer ses répliques angéliques. Les autres acteurs composent des personnages attachants mais ne les font pas sortir des sentiers battus, tandis que Lionel Barrymore reste dans la pure caricature de méchant, sans autres couleurs à donner à l'infâme Potter.
En résumé, It's a Wonderful Life est certainement un bon film, armé d'un scénario original et d'une foi en l'humanité particulièrement plaisante, mais ce n'est pas un chef-d’œuvre dans mon propre univers. Capra n'arrive pas tout à fait à bien équilibrer ses deux actes, ni à contenir une certaine dose d'ennui devant des aventures quotidiennes décevantes par rapport aux attentes créées par l'introduction fantastique. Le jeu sur les cloches tout au long du film est en revanche très bien trouvé. Bref, It's a Wonderful Life regorge de bonnes choses, mais ni le fond ni la forme ne comptent parmi ce que le cinéma a produit de meilleur en 1946: je trouve par exemple A Matter of Life and Death nettement plus beau, original et généreux. 7+.
En résumé, It's a Wonderful Life est certainement un bon film, armé d'un scénario original et d'une foi en l'humanité particulièrement plaisante, mais ce n'est pas un chef-d’œuvre dans mon propre univers. Capra n'arrive pas tout à fait à bien équilibrer ses deux actes, ni à contenir une certaine dose d'ennui devant des aventures quotidiennes décevantes par rapport aux attentes créées par l'introduction fantastique. Le jeu sur les cloches tout au long du film est en revanche très bien trouvé. Bref, It's a Wonderful Life regorge de bonnes choses, mais ni le fond ni la forme ne comptent parmi ce que le cinéma a produit de meilleur en 1946: je trouve par exemple A Matter of Life and Death nettement plus beau, original et généreux. 7+.
Je retrouve enfin ton blog ! Je ne me souvenais plus du nom, et impossible de retrouver dans l'historique...
RépondreSupprimer(Ex-Visiteur des lieux, je change de pseudo parce que ça sonne snob. D'un autre côté, m'attribuer les noms de Stanwyck et Julie London est un peu présomptueux aussi, mais bon...)
C'est curieux, je n'ai pas le souvenir des défauts du film comme le problème du rythme : j'ai dû le voir vers quinze ans, et comme c'était un des premiers classiques que j'ai vu j'ai tout de suite été conquis - excepté pour le personnage de Potter, vraiment beaucoup trop mesquin pour passer. D'accord, la fin est niaiseuse, mais ça marche plutôt bien (après, il suffit de me passer une jolie orchestration d'Auld Lang Syne et je baisse les armes !)
A revoir pour me faire une idée, à l'occasion.
Hmm... A quinze / seize ans j'étais fasciné par les reprises d'Auld Lang Syne dans les films américains des années 30/40. C'était même ma chanson préférée à une époque...
SupprimerCe ne fut hélas pas suffisant pour me faire adorer le film dans son ensemble. Capra n'est pas tout à fait ma tasse de thé, mais je préfère vraiment Mr. Smith ou The Bitter Tea.
Tiens, c'était aussi mon cas !
RépondreSupprimerMr. Smith Goes to Washington est très supérieur à It's a Wonderful Life, aucun doute là-dessus ; quant au Thé du général, je n'ai toujours pas mis la main dessus à vrai dire.