mercredi 22 septembre 2021

Rendez-vous manqués en Brivadois


À propos de mon périple estival, nous en étions restés au milieu des ruines vellaves de Polignac. Deux directions s'offraient alors à moi : soit filer vers l'abbaye de La Chaise-Dieu, soit m'en aller à Brioude. L'abbaye est considérée par tous les guides comme un incontournable absolu, mais c'est aussi le siège d'un festival de musique, où j'aimerais beaucoup chanter un jour si j'avais l'audace d'oser pousser les portes et bousculer les conventions, au lieu de stagner dans une zone hyper locale. Cette pensée me chagrinant quelque peu, n'ayant nulle envie d'être rongé de jalousie et n'ayant de toute façon rien réservé, je m'en suis donc allé à Brioude, dans l'espoir de voir les fresques et vitraux très colorés de la basilique Saint-Julien. Ce fut un échec total! Tout ce que j'ai vu de Brioude, c'est la station-service où j'ai fait le plein, la faute à un festival ayant conduit la municipalité à fermer le centre-ville à la circulation. J'aurais pu me garer au loin pour gagner le centre à pieds, ce que je fais habituellement dans les grandes villes, mais la vision de multiples barrages de police, le sentiment d'avoir débarqué en une contrée inconnue après la descente la plus interminable du cosmos sur la N102, et la perspective de ne pas me plaire dans un paysage plat qui n'est autre que la continuité de la triste Limagne, ont eu raison de ma patience. Je me suis enfui de Brioude sans demander mon reste. Les monts du Livradois-Forez se découpant sur l'horizon oriental me faisaient bien de l'œil, mais la fatigue du voyage m'a plutôt encouragé à regagner l'ouest de l'Auvergne, plus proche de la Dordogne. J'avais surtout très envie de regagner les monts du Cantal où je m'étais tant plu auparavant.

Mais sortir de Brioude n'est pas chose facile : on avait beau être un dimanche après-midi, il y avait autant de circulation qu'un vendredi soir aux heures de pointe, et pour moi, hors de question de prendre l'autoroute. Les vacances sont faites pour errer hors des sentiers battus, et se laisser surprendre par des lieux dont on ne soupçonnait pas l'existence. Mais pour ce faire, il faut emprunter de tous petits chemins, où les panneaux de signalisation ne vous indiquent pas toujours la ville la plus proche! Bref, heureusement que j'avais passé une excellente matinée à Polignac, car cet après-midi fut un fiasco total : je me suis égaré dans un paysage morne, que seule la façade du prieuré clunisien de Bournoncle-Saint-Pierre a su égayer quelque peu. Après cela, plusieurs panneaux m'ont invité à prendre la direction de Blesle pour y admirer un patrimoine intéressant, mais comme je pensais qu'il ne s'agissait que d'une énième église, j'ai fait l'impasse dessus alors que je n'étais qu'à cinq kilomètres. Mal m'en a pris : il suffisait de faire quelques pas de plus pour se retrouver dans un paysage vallonné nettement plus attrayant, et se promener dans l'un des "plus beaux villages de France" aux maisons à pans de bois. Pile ce qu'il m'aurait fallu! Mon ignorance sur la question m'a joué un très vilain tour, et je m'en veux quelque peu, car je ne suis pas sûr du tout d'avoir envie de repasser dans le coin exprès pour voir Blesle et la basilique Saint-Julien de Brioude. Quoique... Mon côté compulsif pourrait tout à fait me conduire à faire amende honorable auprès de ces deux cités dédaignées, mais retourner en Brivadois n'est pas non plus ma priorité.

Cela dit, voyons le côté positif des choses, puisque deux rayons de soleil ont éclairé mon après-midi! Le second, c'est la traversée du tunnel du Lioran dans l'autre sens, qui m'a permis de me retrouver dans les monts du Cantal libres de tout nuage! Un peu à la manière du Docteur Jivago qui découvre le soleil après avoir passé l'Oural avant lequel tout n'était que grisaille et désolation. Sauf que du côté auvergnat, la bande-son n'était pas à l'heure de Maurice Jarre mais de Bonnie Tyler : l'entrée dans le tunnel au son de l'irrésistible Faster Than the Speed of Night était complètement euphorisante! Mais avant cela, la lumière de l'après-midi fut la découverte absolument fortuite de la charmante bourgade de Vieille-Brioude. J'ai ainsi découvert qu'il y a deux Brioude! Venant de Polignac, et voyant un panneau indiquant cette direction, je pensais naïvement qu'il s'agissait du centre historique de la sous-préfecture, alors qu'il s'agit bien d'une commune différente. On entre dans la ville par un pont assez vertigineux sur l'Allier, qui offre ce joli point de vue sur le jardin de curé de l'église Sainte-Anne, et sur de jolies maisons en vieilles pierres qui s'étagent en terrasse le long de la rivière. Le tout s'admire de manière agréable le temps qu'il faut. Il n'y a finalement pas lieu de se lamenter si l'on atterrit en Brivadois, même si les choses qui me touchent sont trop parsemées dans ce désert d'ennui.

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