mercredi 30 décembre 2015

Christmas scarole


♪♫♪ Joy to the world, the Loy is come! Let earth receive her queen! ♪♫♪

Ce qu'il y a de bien en fin d'année, c'est que même si je ne fête pas personnellement la Nativité, sauf d'un point de vue professionnel, ça me permet de voir un peu ma famille et de rentrer me reposer à la campagne. De quoi me laisser pas mal de temps libre pour regarder des films à la télévision, afin de rattraper mon retard. Or, l'automne dernier, j'ai découvert une chaîne enfin utile, sur laquelle on peut voir à l'heure qu'on veut des films actuellement diffusés sur le câble: j'en ai donc honteusement profité pour compléter mes lacunes récentes de ces dernières années. Voici les quatre exemples visionnés entre d'inestimables promenades dans les bois:

Gloria (2013): Un film que je tenais à voir grâce à l'Ours d'argent attribué à Paulina García à Berlin, et je dois dire que niveau interprétation, je ne suis nullement déçu. L'actrice a un superbe visage sur lequel chaque émotion s'imprime avec clarté, sans aucun effet, depuis le dynamisme souriant de l'introduction dansée à la catharsis finale, en passant par toutes les phases de la déception, dont le point culminant restera cette séquence de repas de famille à la conclusion particulièrement embarrassante pour Gloria. En fait, l'intégralité du film repose sur la performance d'actrice, et j'aime beaucoup sa façon de montrer pourquoi l'héroïne continue de se forcer d'y croire encore tout en sachant qu'elle va droit dans le mur, à travers une sensation de manque fort bien rendue. Le scénario est également digne d'intérêt en prenant le parti de montrer un corps féminin mûr sans aucun jugement, ce qui change des canons étouffants plus habituels au cinéma. Autrement, je n'ai pas grand chose à dire sur le film: l'interprétation en est clairement le centre de gravité mais si je ne suis pas entièrement captivé par cette histoire, je suis absolument ravi d'avoir découvert un film chilien. Un 6+, voire un petit 7, me semble mérité, et Paulina García vient sans surprise de décrocher une nomination sur la prestigieuse liste des Orfeoscars 2013.

Philomena (2013): A l'inverse, je ne garderai pas Judi Dench dans ma sélection de l'année pour son rôle nommé aux Oscars, car sans que j'aie aucun reproche à lui faire, elle ne me semble pas être exceptionnelle au point de mériter reconnaissance pour un personnage qu'elle aurait pu jouer les yeux fermés. Mais elle n'est absolument pas mauvaise au demeurant, et elle détaille son parcours de manière intéressante, en restant toujours fidèle à ses convictions religieuses malgré les souffrances engendrées par son passé. Il est dommage, en revanche, que le scénario soit assez lourd, d'une part en jugeant ses personnages avec dédain, à l'image de ce film débile que Philomena préfère regarder au lieu de visiter le mémorial de Lincoln, chose qui n'apporte absolument rien à l'histoire à part faire chanter à Steve Coogan un couplet sur les ravages de la télévision; et d'autre part en alignant les maladresses dans le rapport à la sexualité et à la religion. Dans ce dernier cas, Martin Sixsmith est transformé en une caricature d'athée qui se sent constamment obligé de tout critiquer en permanence, et certaines répliques de l'héroïne en deviennent de leur côté atrocement naïves, Philomena révélant qu'elle ne savait même pas qu'elle avait un clitoris... Rappelons qu'elle avait tout de même dix-sept ans lors de son premier rapport, ça semble tellement étrange. Autrement, la quête se suit avec intérêt et le film n'est pas déplaisant du tout dans son ensemble. Mais j'en resterai à un 6-, Stephen Frears étant capable de mieux.

The Babadook (2014): Présenté comme le grand film d'horreur de la décennie, cette production australo-canadienne est incontestablement réussie, mais je vous avouerai être assez las de ces films où les personnages sont possédés par une force obscure, et où un enfant qui mériterait des baffes se met à crier à n'en plus finir. Mais le parti-pris ne manque pas de piquant, en particulier grâce à une photographie volontairement sombre qui restitue les couleurs du livre d'où sort le fameux Babadook, et qui illustre surtout à merveille les névroses d'une mère étouffante elle-même étouffée par des souvenirs morbides. On appréciera surtout le choix de la scénariste-réalisatrice, Jennifer Kent, de montrer un personnage maternel loin d'être exempt de tout reproche, et qui n'aime finalement pas son enfant outre mesure bien qu'elle lui laisse tout passer, de quoi donner du grain à moudre à Essie Davis, réellement saisissante avec une performance versant de plus en plus dans la folie meurtrière, bien que ce soit un type d'interprétation qui me touche peu. Finalement, The Babadook n'est pas tout à fait ma tasse de thé, et ça ne révolutionne absolument pas le genre, mais l'ensemble est bien maîtrisé. J'en reste à un 6+.

Nightcrawler (2014): A priori pas mon style non plus, mais contre toute attente, j'ai beaucoup aimé. Vraiment. Le scénario de Dan Gilroy est captivant et l'on se demande toujours jusqu'où le personnage sera capable d'aller dans le voyeurisme malsain, sans compter que certaines images choc tiennent constamment en haleine, y compris lors des revers de fortune quand le sujet traité ne plaît pas assez à la chaîne pour être exploité. Par ailleurs, je craignais que la performance de Jake Gyllenhaal soit très technique à cause de sa perte de poids ostentatoire, mais par bonheur, il est nettement plus reconnaissable dans le film que sur les photos de promotion, et son interprétation n'est jamais appuyée, à l'exception d'une scène devant un miroir, de quoi révéler au mieux l'état d'esprit d'un sociopathe n'ayant absolument aucun problème avec ce qu'il fait. En réalité, l'acteur réussit l'exploit de nous intéresser au sort de ce qui n'est finalement rien d'autre qu'un pauvre type, au point qu'on a toujours envie de le voir réussir même lorsqu'il va trop loin. Sa relation avec Rene Russo est encore très bien exploitée, et l'actrice reste elle aussi une candidate de choix pour les remises de prix en trouvant le parfait équilibre entre l'absence de scrupules de cette pro de la communication et les fêlures démasquées d'une femme constamment sur la sellette dans une maison de production prête à la licencier à la moindre chute d'audience. En filigrane, la satire des chaînes d'info en continu tombe constamment juste, au point que j'hésite entre un 7+ ou un joli 8.

♪♫♪ Do ré mi ♪♫♪


Mais ce qu'il y a d'également amusant avec Noël, c'est qu'étant le seul adulte de la famille à n'avoir ni trente ans, ni mari, ni enfants, c'est toujours moi qu'on vient chercher pour servir de compagnon de jeu à tous les petits marmots qui gravitent dans le cousinage. Les derniers jours de décembre me voient donc systématiquement troquer ma dignité de baronne contre un tablier de gouvernante afin d'inventer de nouveaux rôles pour les peluches, chanter dans les prairies et jouer à chat perché dans le jardin. Pour couronner le tout, comme les collatéraux se sont tous mis en tête d'épouser des Britanniques ces dernières années, me voilà à présent transformé en véritable Mary Poppins: je ne sais pas comment je dois le prendre, mais je n'en ai pas honte! Après tout, j'estime que pour être pleinement adulte, il ne faut surtout pas se séparer de son esprit fantaisiste d'enfant, et tant pis pour tous les jeunes cyniques de mon âge qui me regardent de travers en se donnant le genre sérieux de quadragénaires carriéristes, qui me parlent de téléphones et de voitures et commencent tous à se reproduire à la chaîne parce que "Oulala! Mes amis ont déjà des enfants et pas moi! Vite!" Bref. Tout ça pour dire que dans le pavillon des enfants, nous avons regardé un film précisément fantaisiste pour petits et grands, je veux parler de...

Cendrillon (2015): Un film ayant bonne presse, réalisé par le légendaire Kenneth Branagh et interprété par Cate Blanchett dans un rôle de méchante marâtre, ce devrait être un bon moment, me suis-je dit en installant la platine dans le lecteur. Eh bien, mes chers amis, je suis au regret de vous annoncer que c'est l'un des pires films que j'aie vus ces derniers temps! Pour de vrai! Sans mentir, visuellement, c'est une horreur, avec des couleurs criardes qui jurent de partout (même les coquelicots dès le premier plan sont rouge vif), des décors d'une laideur sans nom avec un manoir et une cour de ferme sortis tout droit d'un coffret de Polly Pocket, et des costumes pompés sur les dessins animés de princesses des années 1990 (même si deux ou trois robes de la belle-mère sont pas mal, avouons-le). Le palais est quant à lui un véritable musée des horreurs où le fluorescent et le dispute au phosphorescent, et mieux vaut ne pas s'étendre sur les effets spéciaux, d'autant que c'est complètement crétin de la part des scénaristes de faire tout un foin sur la robe rose que l'héroïne veut garder pour le bal pour sa valeur sentimentale si c'est pour la transformer en gigantesque chiffon scintillant tout bleu... Ah oui, et les chaussures en plastique qui brillent comme une boule de discothèque, c'est une catastrophe. Par ailleurs, le scénario n'a aucun intérêt: ça reprend la version animée de 1950 au pied de la lettre sans jamais donner le moindre souffle novateur à l'intrigue, et à la fin, l'héroïne complètement passive qui reste chanter à sa fenêtre sera sauvée par des souris gloutonnes, bienvenue au XVIIe siècle! Même les enfants avec qui j'ai vu ça ont détesté, et j'échangerai pour ma part toutes les Cendrillons du monde contre une Maléfique certes entourée d'effets spéciaux très vilains, mais pour laquelle on peut au moins ressentir quelque chose. Pour conclure, on jettera un voile pudique sur l'interprétation, le pire étant atteint par Cate Blanchett qui massacre toutes ses scènes avec une lourdeur que même un public enfantin a trouvé grotesque: Eleanor Audley était cent fois plus subtile avec quelques éclats de voix jadis. Bref, un film où Lily James est le MVP n'est pas bon signe du tout... Un 3 me semble déjà trop généreux...

Heureusement, pour estomper cette horrible expérience, j'ai trouvé un DVD pas cher du tout à la librairie, ce qui me permettra de terminer cet article sur une note plus positive:

The Belly of an Architect (1987): Un film de Peter Greenaway, avec un scénario plutôt intéressant sur la paranoïa progressive d'un artiste persuadé que ses brûlures d'estomac sont provoquées par un empoisonnement lors d'un séjour à Rome, alors que son épouse le trompe allègrement avec le premier venu entre deux ou trois antiquités. En soi, le programme est alléchant, mais il est dommage que le rythme ne suive pas: certaines séquences très longues suscitent l'ennui par moments, et pour le coup, ça parle un peu trop de ci de là, malgré une bonne performance de Brian Dennehy. Ceci dit, artistiquement, c'est assez génial: la photographie symétrique des beautés de Rome nous plonge d'emblée dans la psyché "architecturale" d'un héros obnubilé par son idole, le gâteau d'anniversaire en forme de cénotaphe est une trouvaille passionnante, les décors de chambre ou d'atelier, avec tous ces plans étalés par terre, fourmillent de bonnes idées et la musique de Wim Mertens insuffle pas mal de dynamisme au film quand le rythme pèche par endroits. En somme, un projet plus intéressant que parfaitement réussi, mais je ne suis pas mécontent du tout de la découverte. Je monte à 6+.

vendredi 25 décembre 2015

These Are a Few of My Favorite Things


Ça y est, j'en ai momentanément fini avec la musique sacrée, les messes et les chants de Noël, alors prenons quelques jours de répit pour bloguer, en commençant par nous rappeler ce que nous aimons le plus au cinéma. Voici la liste, non exhaustive, de tout ce qui me vient le plus spontanément à l'esprit parmi les œuvres du septième art. En bleu, le film qui m'a le plus marqué, ou me cause le plus de plaisir, une année donnée.

1920: Les décors expressionnistes du Cabinet du Docteur Caligari et du Golem. Le maquillage abject de John Barrymore dans Dr. Jekyll & Mr. Hyde. Les ogives du Monastère de Sandomir. Le catfight de Gloria Swanson et Bebe Daniels dans Why Change Your Wife?

1921: Les décors contemporains dans Camille. L'ubiquité de Mary Pickford dans Little Lord Fauntleroy. La reconstitution du vieux Paris dans Orphans of the Storm. Le bal costumé à l'opéra et la folie d'Alfred Abel dans Sappho.

1922: Le voyage entre mer, montagne et désert dans Beyond the Rocks. La plume au vent de Max Schreck dans la campagne désolée de Nosferatu. Les jolis coloris surannés de Toll of the Sea.

1923: Le charme d'Adolphe Menjou dans A Woman of Paris, et la spontanéité de Norma Shearer dans Lucretia Lombard.

1924: L'ingéniosité de Pola Negri pour mettre les hommes à sa hauteur dans Forbidden Paradise. Tous les plans du parfait Gösta Berlings saga. Le rire forcé de Lon Chaney dans He Who Gets Slapped. Marie Prevost déclarant son désir à travers une partition dans The Marriage Circle.

1925: Louise Dresser qui reluque des petits jeunes dans L'Aigle noir. Les plumes de Norma Shearer dans Lady of the Night. La dernière réplique d'Irene Rich dans L'éventail de Lady Windermere. Pola Negri fumant une cigarette dans A Woman of the World.

1926: Greta Garbo tournant le calice pour toucher des lèvres l'endroit où a bu son amant dans La Chair et le Diable. 

1927: Les décors de Metropolis. La photographie de l'Aurore. L'apparition mystérieuse d'Ivor Novello dans The Lodger. Le WTF total de Love, entre les regards lubriques de la bohémienne et les rires en boîte de la bande-son! Mary Pickford faisant tomber ses affaires sur une avenue new-yorkaise dans My Best Girl. Norma Shearer buvant gaiement une chope de bière dans The Student Prince in Old Heidelberg. La tristesse contenue de Pola Negri dans Barbed Wire et Hotel Imperial.

1928: Chaque apparition d'Ernest Torrence dans The Cossacks. La plongée sur les multiples bureaux dans The Crowd. Les femmes désabusées et la séduction longiligne de Gustav von Seyffertitz dans The Docks of New York. Les décors princiers animés dans L'horloge magique. La séquence du train dans The Last Command. La ressemblance de Baclanova avec Madonna dans The Man Who Laughs. L'effrayante cour martiale prussienne dans The Mysterious Lady. La déception de Joan Crawford dans Our Dancing Daughters. Bien des choses dans La Passion de Jeanne d'Arc. Les imitations hilarantes de Marion Davies dans The Patsy. Le chapeau de Gloria Swanson dans Sadie Thompson. Les décors dans The Wedding March. Le cheval fantôme dans The Wind. Le clin d’œil de Garbo dans A Woman of Affairs. Quelle merveilleuse année!

1929: La comtesse lesbienne dans La Boîte de Pandore. Corinne Griffth chantant Loch Lomond au clair de Lune dans The Divine Lady. La séduction de Greta Garbo dans The Kiss. Les yeux cernés de noir et le charme exquis de Basil Rathbone dans The Last of Mrs. Cheyney. La réplique finale de Jeanne Eagels dans La Lettre. "Dream Lover" et la "Marche des grenadiers" dans The Love Parade. L'exotisme fantasmé dans Prapancha Pash. Gloria Swanson perdant son "sang froid" dans Queen Kelly. Mon dépucelage muet avec Le Journal d'une fille perdue il y a une dizaine d'années. Les décors et costumes des merveilleux mensonges de Nina Petrowna.

1930: Le charme de Chester Morris dans The Big House. La photographie du Far West dans The Big Trail. Le baiser dans les blés dans City Girl. Norma Shearer embrassant des inconnus dans les cotillons du nouvel an de La Divorcée. La fête privée au premier étage dans Holiday. L'atelier du peintre dans Ladies of Leisure. Fredric March et Nancy Carroll déguisés en ours dans Laughter! La fête foraine lumineuse dans Liliom. Jeanette MacDonald ébouriffée dans Monte Carlo. Marlene Dietrich travestie dans Morocco. Les décors florissants dans Reaching for the Moon. Le petit singe de Greta Garbo dans Romance.

1931: La fin émouvante de City Lights. Marlene trouvant le temps de se remaquiller dans Dishonored. Tous les plans de Dr. Jekyll and Mr. Hyde. Le charisme de Lynn Fontanne dans The Guardsman. Les ombres effrayantes dans M. Le doublage français de Garbo dans Mata-Hari! Norma Shearer se débattant dans Private Lives. "Jazz Up Your Lingerie" dans The Smiling Lieutenant. Le verger dans Tao hua qi xue ji. Les confessions de Mae Clarke dans Waterloo Bridge.

1932: La comtesse qui n'est pas la comtesse, qu'on reconnaît ou non en regardant de près, dans As You Desire Me. Le gorille dans Blonde Venus! Marion Davies imitant Greta Garbo dans Blondie of the Follies. La rencontre explosive entre John Barrymore et Joan Crawford dans Grand Hotel. La chaîne musicale sur "Isn't It Romantic?" et les bonds du cerf dans Love Me Tonight. La tête de Jeanette MacDonald dans la scène des étiquettes, les douleurs insoutenables de Genevieve Tobin sur son canapé et le valet qui drague son employeur dans One Hour with You. Les décors surréalistes du Sang d'un poète. Ann Dvorak revolver en main dans Scarface. Les costumes et Anna May Wong rentrant dans le QG des méchants comme dans un moulin dans Shanghai Express. Miriam Hopkins se retenant de voler des bijoux dans Trouble in Paradise.

1933: Les chorégraphies de Busby Berkeley dans 42nd Street, Footlight Parade et Gold Diggers of 1933. La musique de l'entrée du labyrinthe dans Alice au pays des merveilles. Les chinoiseries dans The Bitter Tea of General Yen. Les peintures contemporaines de l'atelier dans Design for Living. Les réorchestration des vieux airs dans Little Women. La partie de cartes dans La Vie privée d'Henry VIII. L'inspection de la chambre et les raisins dans La Reine Christine. L'ombrelle de Mary Pickford dans Secrets. La robe blanche sous les saules dans The Song of Songs. La complicité autour d'une cigarette dans The Stranger's Return.

1934: "Will Thou Have My Hand?" dans The Barretts of Wimpole Street. Claudette Colbert riant au nez de César dans Cléopâtre. La géographe transformée en reine des Amazones dans le consternant Four Frightened People. Alice Brady encombrante dans La Joyeuse Divorcée. L'envie de manger des crêpes provoquée par Images de la vie. Claudette Colbert sur une barrière dans It Happened One Night. Margaret Sullavan dans Et demain? Myrna Loy sautant dans la voiture de William Powell dans Manhattan Melodrama. Jeanette MacDonald souriant aux hommes du restaurant de La Veuve joyeuse. Les chinoiseries du Voile des illusions. Marlene cernée d'épées dans L'Impératrice rouge. Les lumières de Shanghai dans Shen nu.

1935: Le limage des menottes dans Les 39 Marches. Basil Rathbone dans Anna Karénine . Le sucre d'orge de Miriam Hopkins dans Becky Sharp! Le goût de l'aventure dans Captain Blood. Fredric March au pic de sa séduction et l'usage de la musique dans The Dark Angel. Marlene Dietrich masquée dans les ballons du Devil Is a Woman. La tour de Venise dans La Kermesse héroïque. Les costumes de rêve dans Le Songe d'une nuit d'été. L'exotisme et les grandes voiles dans Les Révoltés du Bounty. Le château de contes de fées dans Peter Ibbetson. L'avalanche d'Art déco dans Top Hat.

1936: Le charme exquis de Robert Taylor et Greta Garbo dans Camille. Les objets précieux de Rosalind Russell dans l'Obsession de Madame Craig. Marlene Dietrich attendant une visite avec force naturel dans Désir. La niaiserie absolue du Jardin d'Allah. Myrna Loy suspicieuse dans Libeled Lady. L'ivresse de Miriam Hopkins dans Men Are Not Gods. Jean Arthur dans Mr. Deeds Goes to Town. Les rouages géants dans Modern Times. Toutes les répliques de My Man Godfrey. Le charisme de Leslie Howard dans La Forêt pétrifiée. Carole Lombard capable de porter tout un film en imitant Garbo dans The Princess Comes Across. Le temple en ruine et le campanile dans Roméo et Juliette. Jeanette MacDonald chantant à cœur joie dans San Francisco. "Ol' Man River" dans Show Boat. La métamorphose d'Irene Dunne dans Theodora Goes Wild. L'uniforme d'étudiantes de Miriam Hopkins et Merle Oberon dans These Three.

1937: L'arrivée d'Irene Dunne chez les Vance dans The Awful Truth. Maria Ouspenskaya humiliant Napoléon dans Conquest. Erich von Stroheim et "Si tu veux Marguerite" dans La Grande Illusion. Marlene fuyant son palais russe en robe blanche dans Le Chevalier sans armure. Olivia de Havilland derrière son journal dans It's Love I'm After. Les images de la forêt et "Thirsty? Have a drink!" dans Blanche-Neige. Le duel de divas dans Stage Door. Barbara Stanwyck regardant sa fille se marier dans Stella Dallas. Miriam Hopkins dans des branches, ou dans une baignoire, dans Wise Girl et Woman Chases Man.

1938: Les atours de Basil Rathbone et la scène des archers dans Robin des Bois. Le baiser à l'oignon dans Barbe-Bleue. Toutes les tentatives de drague de Katharine Hepburn dans Bringing Up Baby! La girafe amovible dans Holiday. "Raise a Ruckus Tonight" dans Jezebel. Le charme de Michael Redgrave dans The Lady Vanishes. Les réflexions stupides des amies de Barbara Stanwyck et Hattie McDaniel grincheuse dans Miss Manton. La notion très particulière de Norma Shearer de "se quitter en amis" dans Marie-Antoinette. Myrna Loy brossant un portrait de Clark Gable sous son nez dans Test Pilot. Deanna Durbin chantant "My Own" dans That Certain Age. Ginger Rogers qui plante une épingle dans les fesses de sa rivale dans Vivacious Lady.

1939: La scène de l'écurie dans Dark Victory. Le renversement des genres dans Destry Rides Again. Deanna Durbin qui se croit invitée à chanter dans First Love, ou sautant sur son lit dans Three Smart Girls Grow Up. La Géorgie aux pieds de Scarlett au pique-nique d'Autant en emporte le vent. La fête des fous dans un Paris médiéval de rêves dans Notre-Dame. La perruque de Norma Shearer dans Idiot's Delight. L'élégance de Brian Aherne et l'arrivée du couple impérial dans Juarez. Irene Dunne jetant une pellicule à l'eau dans Love Affair. A peu près tout dans La Baronne de minuit, et plus encore les aristocrates qui dansent la conga. Le rire de Greta Garbo dans Ninotchka, et plus particulièrement le petit ricanement nerveux devant ses émissaires, le lendemain. Miriam Hopkins demandant à sa fille d'être gentille avec Tante Charlotte dans La Vieille Fille. Le bleu des fenêtres et la séduction d'Errrrol Flynn en bottes dans Elizabeth and Essex. Bien des choses dans La Règle du jeu. Monument Valley dans Stagecoach. Les fantasmes médiévaux dans La Tour de Londres. Toutes les séquences dans The Women: on ne peut rien isoler, c'est plus que parfait, mais s'il fallait ne retenir qu'une scène, ce serait celle de la morsure de jambe de Paulette Goddard. Quoique le téléphone dans la salle de bains... Aaaah! Dans tous les cas, une scène avec Rosalind Russell! Geraldine Fitzgerald défiant l'avalanche de gifles de Merle Oberon dans Wuthering Heights.

1940: Le globe terrestre dans Le Dictateur. Les pégases olympiens et les chardons russes dansant le kazatchok dans Fantasia. Le charme de George Sanders dans Foreign Correspondent. L'ensemble à rayures de Rosalind Russell dans His Girl Friday. Les décors à rayures et la cape de dentelle dans La Lettre. Les amours du chat et du poisson dans Pinocchio. La chambre de la première épouse dans Rebecca. Les vieilles cartes, la séquence sépia et le petit singe trop mignon qui fait pouffer la reine dans l'Aigle des mers. L'atmosphère hongroise dans The Shop Around the Corner. Les décors colorés dans Le Voleur de Bagdad. "Battle Cry of Freedom" dans Virginia City. La scène de la gare dans Waterloo Bridge. "The doors made me do it! Hahahahahahahahaha!" dans They Drive by Night.

1941: Xanadu dans Citizen Kane. Marlene Dietrich jouant à la vierge effarouchée dans The Flame of New Orleans. La réaction d'Olivia de Havilland face à Paulette Goddard dans Hold Back the Dawn. Les jolies images dans How Green Was My Valley. Les escaliers et les peintures géantes dans It Started with Eve. Le superbe bonnet grec à pompon et Barbara Stanwyck racontant des blagues aux invités dans The Lady Eve. Les confessions de Birdie dans The Little Foxes. La griffe sur le visage dans Le Faucon maltais. La rencontre dans la maison de disques dans Penny Serenade. Les coiffures d'Ona Munson dans The Shanghai Gesture: le rêve! Olivia de Havilland qui se prend un vent sur la piste et qui mange de l'oignon dans They Died with Their Boots On. Lana Turner s'effondrant dans les escaliers de Ziegfeld Girl. Joan Crawford giflant passionnément Osa Massen dans A Woman's Face.

1942: Les couleurs de la forêt dans Bambi. Les lanternes marocaines dans Casablanca. Les décors et la séquence dansée sur "A Geogia Camp Meeting" dans La Splendeur des Amberson. La croisière de luxe dans Now, Voyager. Le numéro musical de Greer Garson en kilt dans Random Harvest. Les chapeaux à voiles de Claudette Colbert dans The Palm Beach Story et Greer Garson dans Mrs. Miniver. L'exquise robe de Carole Lombard dans To Be or not To Be. Les numéros dynamiques de Yankee Doodle Dandy. Ginger Rogers avalant sa cigarette dans The Major and the Minor, rugissant dans Tales of Manhattan et dansant sur des talons de trois mètres dans Roxie Hart. Sans oublier Charles Laughton et la veste qui craque Tales of Manhattan.

1943: Le dynamisme de Joan Fontaine dans The Constant Nymph. Les doigts encrés dans Le Corbeau. Les perles au générique dans The Hard Way. Les décors gothiques dans Jane Eyre. Jean Arthur organisant sa matinée dans The More the Merrier. La bataille Bette Davis / Miriam Hopkins dans Old Acquaintance. Le pèlerinage des cierges dans Le Chant de Bernadette. Les murs blancs dans Vredens dag.

1944: Deanna Durbin donnant une parfaite imitation de moi conduisant dans la campagne dans Can't Help Singing. Barbara Stanwyck derrière la porte dans Double Indemnity. Les décors italiens dans Gaslight. Tallulah qui fait son shopping parmi les débris d'un paquebot dans Lifeboat. L'introduction très colorée des saisons dans Meet Me in St. Louis. Janie Clarkson dans Mr. Skeffington. "Ke Ai De Zao Chen" et "Bu Bian De Xin" par Zhou Xuan dans Meilleures moitiés. Les accents de Greensleeves dans National Velvet. L'affiche coquine de Claudette Colbert dans Since You Went Away.

1945: Ingrid Bergman ne pouvant réprimer un rire dans Les Cloches de Sainte-Marie. Les manigances de María Casares dans Les Dames du Bois de Boulogne. Le train de rêve dans Je sais où je vais. Deanna Durbin déguisée en fauteuil dans Lady on a Train. Le vert et le bleu du lac dans Leave Her to Heaven. La rencontre avec Jane Wyman dans The Lost Weekend. L'acharnement de Joan Crawford dans Mildred Pierce. La merveilleuse décoration de très bon goût dans Le Portrait de Dorian Gray! Tallulah qui drague des petits jeunes dans Scandale à la cour. L'hystérie grotesque d'Ingrid Bergman dans Saratoga Trunk: "Hahahahahahahahahahahahahahahahaha!" La séquence rêvée dans Spellbound. La passion incestueuse de Geraldine Fitzgerald dans Uncle Harry. Patricia Roc giflant enfin Margaret Lockwood dans The Wicked Lady!

1946: Joan Crawford dans Humoresque. Les décors et la photographie dans La Belle et la Bête. La rencontre corrosive entre Joan Crawford et John Garfield dans Humoresque. Myrna Loy et Dana Andrews dans The Best Years of Our Lives. Les lunettes de Joan Crawford dans Humoresque. Vincent Price et le manoir gothique dans Dragonwyck. Joan Crawford dans Humoresque. L'érotisme brûlant d'une Rita Hayworth masquée ou gantée dans Gilda. La séquence de bord de mer dans Humoresque. La descente de l'ange dans It's a Wonderful Life. Toutes les séquences impliquant Joan Crawford dans Humoresque. Je vous ai déjà dit que j'aimais Humoresque?

1947: Les décors peints et les sourires énigmatiques de Deborah Kerr dans Black Narcissus. La sensation de l'air marin dans The Ghost and Mrs. Muir. Le contre-emploi de Joan Fontaine dans Ivy. La scène des miroirs dans La Dame de Shanghai. Simone Renant et Louis Jouvet qui n'ont "pas de chance avec les dames" dans Quai des Orfèvres.

1948: Jean Arthur et la danse ridicule de l'Iowa dans A Foreign Affair. Les voyages sur papier peint dans Lettre d'une inconnue. Zhou Xuan et l'appareil-photo dans L'histoire secrète de la cour des Qing. La couleur délicieusement typique de l'époque dans Les Chaussons rouges. Ida Lupino chantant "Again" au piano dans Road House. Le sous-texte homosexuel dans Rope. Walter Huston dans Le Trésor de la Sierra Madre. Lana Turner dans Les Trois Mousquetaires.

1949: Le générique d'ouverture de Banshun, qui met dans de très bonnes dispositions pour apprécier l'âge d'or du cinéma japonais. Les grimaces de Katharine Hepburn et Spencer Tracy sous la table dans Adam's Rib. Patricia Neal dans l'ascenseur au-dessus de la ville dans The Fountainhead. Miriam Hopkins qui tente d'arranger des liens à son idiote de nièce dans L'héritière. Le charisme de Susan Hayward dans House of Strangers. Les dialogues entre femmes dans A Letter to Three Wives.

1950: Toute la performance de Bette Davis dans All About Eve, mais aussi le cynisme de George Sanders et le fou-rire de Celeste Holm. Judith Anderson et les ciseaux dans The Furies. La forêt en noir et blanc dans Rashōmon. Gloria Swanson emplumée repoussant un micro dans Sunset Boulevard. Le jardin en bord de mer dans Le Portrait de Madame Yuki.

1951: Les décors peints dans Un Américain à Paris. Le labyrinthe et les roses peintes en rouge dans Alice au pays des merveilles. Le confessionnal improvisé dans l'Auberge rouge. La descente d'avion de diva de Miriam Hopkins dans The Mating Season. La voix et la diction d'Edwige Feuillère dans Olivia. La séduction entre Jeanne Crain et Cary Grant dans People Will Talk. Robert Walker dans Strangers on a Train.

1952: Lana Turner dessinant des moustaches sur le casque dans The Bad and the Beautiful. L'écoulement du temps réel dans High Noon. Ginger Rogers courant dans un couloir dans Monkey Business. Danielle Darrieux dans un champ et la séquence de danse nocturne dans Le Plaisir: s'il existait encore une boîte de nuit jouant des airs du Second Empire aujourd'hui, je deviendrais l'homme le plus festif du monde et sortirais tous les soirs. Nous voulons de la vraie musique pour nous amuser! Les couleurs de l'Irlande et la flamboyante chevelure de Maureen O'Hara dans The Quiet Man. La rousseur très cinématographique d'Eleanor Parker dans Scaramouche. Les mimiques de Jean Hagen dans Singin' in the Rain. Joan Crawford haletant dans un placard dans Sudden Fear.

1953: Danielle Darrieux passant ses affaires en revue en chantonnant dans Madame de..., mais aussi "ce n'est pas moi qu'il faut regarder." Le charme incroyable de Jennifer Jones dans Beat the Devil. Les cris stridents de Gloria Grahame dans The Big Heat. La nostalgie de "Soothe My Lonely Heart" dans Fort Bravo. Michyo Kogure dans Gion Bayashi. La gouaille d'Ava Gardner dans Mogambo. Les beautés de Rome dans Roman Holiday. La tension toujours palpable dans Le Salaire de la peur.

1954: Joan Crawford, robe blanche au piano sur fond de roche, dans Johnny Guitar. Les robes de Grace Kelly dans Fenêtre sur cour: il me faut les mêmes! Le gilet de Nina Foch dans Executive Suite. La blancheur du costume d'Eleanor Parker sur fond de verdure tropicale dans The Naked Jungle. La retenue d'Hideko Takamine et la musique dans Vingt-Quatre Prunelles.

1955: Chaque plan de l'incomparablement parfait Tout ce que le ciel permet. Tout, mais principalement les séquences "Mon cœur s'ouvre à ta joie" et "Waltzing Matilda" dans Interrupted Melody. L'angoisse de Véra Clouzot dans Les Diaboliques. Le jeu survolté de Susan Hayward dans I'll Cry Tomorrow. Lillian Gish, fusil en main, dans La Nuit du chasseur. L'observatoire dans La Fureur de vivre. James Dean dans A l'est d'Eden. Tous les costumes, XVIIIe ou contemporains, dans To Catch a Thief. La photographie vénitienne dans Summertime. Quand j'ai découvert que le déjà grotesque Many Rivers to Cross était doublé en marseillais sur mon DVD...

1956: Les décors et costumes Renaissance dans Diane: fantasme!!! Samantha dans Friendly Persuasion et, je plaide coupable, le joli minois de Peter Mark Richman en uniforme. La grâce de Liz Taylor âgée et les regrets de Carroll Baker dans la voiture dans Géant. Le sourire d'Eleanor Parker mijotant quelque chose en écoutant ses consœurs chanter "In the Sweet By and By" dans The King and Four Queens. Les décors dans Le Roi et moi. Les bougies sur le chapeau dans Lust for Life. "Mosssseeeeeeees!" dans Les Dix Commandements. L'ouragan Dorothy Malone dans Written on the Wind.

1957: Les réticences de Lee J. Cobb dans Douze Hommes en colère. "Tomorrow Land" dans An Affair to Remember. L'exotisme de la jungle dans Le Pont de la Rivière Kwai et Dieu seul le sait. L'ivresse de Kay Kendall et les dames d'honneur qui couinent dans Les Girls. Les traits d'Eleanor Parker se durcissant subitement lors des changements de personnalité de Lizzie. La danse de Giulietta Masina dans Les Nuits de Cabiria. Les flots de mélodrame assumé et Lana Turner frigide dans Peyton Place. A peu près tout dans Les Fraises sauvages. Les costumes dans Le Septième Sceau. L'entrée en scène ultra charismatique de Marlene Dietrich dans Témoin à charge.

1958: Jeanne Moreau dans les rues de Paris d'Ascenseur pour l'échafaud, et la nuit à la campagne dans Les Amants. Les chinoiseries de Rosalind Russell dans Auntie Mame. L'ouverture des Grands Espaces. Les mouvements d'Elizabeth Taylor et les yeux bleus de Paul Newman dans La Chatte sur un toit brûlant: une grande révélation dans mon adolescence. Les névroses de Rita Hayworth dans Tables séparées. Marlene Dietrich au son du pianola dans La Soif du mal. La coiffure de Madeleine dans Vertigo.

1959: Le petit chien trop mignon dans Autopsie d'un meurtre. Le thème d'amour dans Ben-Hur. La voix d'Emmanuelle Riva qui a "tout vu à Hiroshima". Le clin d’œil d'Eleanor Parker dans A Hole in the Head. Le ruban bleu de Lana Turner dans Imitation of Life. Le Mont Rushmore dans North by Northwest. Marilyn "pas très maline" dans Some Like It Hot. Les arbres bien taillés et Maléfique qui se moque du prince dans La Belle au Bois dormant. Le jardin tropical dans Soudain l'été dernier.

1960: La raquette de tennis dans The Apartment. Le dynamisme de Sophia Loren dans La ciociara. La fontaine de Trevi dans La dolce vita, et l'arrivée d'Anouk Aimée en lunettes de soleil. Le mouvement de bras très cinématographique de Vera Miles dans la cave de Psychose. Les enseignes lumineuses dans When a Woman Ascends the Stairs. Grace Chang glissant sur le banc et chantant "Jajambo" dans The Wild, Wild Rose.

1961: Les confessions de Shirley MacLaine dans La Rumeur. Le parc en noir et blanc dans Les Innocents. Le regard de possédée de Lucyna Winnicka dans Matka Joanna od aniolów. Les décors et costumes Renaissance (!) et les toits de Chambord (!) dans La Princesse de Clèves: orgasme! Natalie Wood dans Splendor in the Grass. La déclaration d'amour sur les toits dans West Side Story.

1962: La musique des vacances dans Jules et Jim. L'élégance de Leslie Caron dans The L-Shaped Room. Les couleurs du désert dans Lawrence d'Arabie. Les excentricités de Shelley Winters dans Lolita. Les "recommandations" d'Angela Lansbury à son fils dans The Manchurian Candidate. La diva Geraldine Page dans Sweet Bird of Youth. "Oh really?! Did she like it?" dans Baby Jane.

1963: Rossella Falk et Anouk Aimée dans 8 1/2. Les déplacements en toute simplicité d'Elizabeth Taylor dans Cléopâtre. La décoration d'intérieur dans La Maison du diable. La photographie dans Hud. L'insupportable héroïne sûre d'elle qui se mange une mouette en barque dans Les Oiseaux. Les tricheries de Madame Mim et le loup débile dans The Sword in the Stone.

1964: Chistopher Plummer au bain dans La Chute de l'empire romain. La gavotte d'Ascot dans My Fair Lady. La tache rouge sur un chemisier blanc dans Marnie. "Feed the Birds" dans Mary Poppins. Constance Towers dans The Naked Kiss. Les palmiers en noir et blanc dans La Nuit de l'iguane. La très agréable surprise que furent Les Parapluies de Cherbourg, alors que je m'attendais à détester. Les gros plans sur Anne Bancroft déprimée dans The Pumpkin Eater. Les montagnes de sable angoissantes dans Suna no onna.

1965: La séduction de Terence Stamp dans The Collector. La blondeur de Julie Christie et le retour du printemps dans Docteur Jivago. La soirée totalement WTF dans Darling. Tallulah en dévote fanatique dormant avec un ours en peluche dans Die! Die! My Dahling! La scénographie dans le merveilleux mais politiquement toxique Dongfang hong. "The Sweetheart Tree" dans The Great Race. Jozef Kroner dans Le Miroir aux alouettes. My Favorite Things et l'élégance monstrueuse d'Eleanor Parker dans The Sound of Music. Brigitte Bardot, qui me fait hurler de rire dans Viva Maria, sans manquer en outre d'être sexy en diable en haut de forme. Et Thunderball a beau être une horreur sexiste sans nom, la scène où la méchante se pointe comme une fleur sur la piste de danse m'a fait hurler de rire, également.

1966: Le sentiment de se sentir intelligent devant Andreï Roublev, même s'il faut plus d'un mois pour digérer l'information. Le rire de Vanessa Redgrave dans Blow Up. La lionne dans Born Free. Le gorille débarquant en plein mariage dans Morgan. Les confessions sur la plage dans Persona. L'apparition rocambolesque de Lila Kedrova dans Torn Curtain. Sandy Dennis qui "danse comme le vent" et "C'est vous la pute!" dans Virginia Woolf. La méchante et ses cornes ridicules dans The Witches.

1967: Les charmantes excentricités de Mildred Natwick dans Barefoot in the Park. Tout sauf Estelle Parsons dans Bonnie and Clyde. Les décors, les bougies du mariage, l'extrême séduction de Richard Harris et la coquinerie de Vanessa Redgrave dans le merveilleux Camelot, qui vaut nettement mieux que sa réputation actuelle. Anne Heywood chantant "Roll It Over" à la guitare dans The Fox. Le rire d'Anne Bancroft en guise de réponse dans Le Lauréat, et la bande-son de Simon & Garfunkel. Les images exotiques dans Le Livre de la jungle. La galerie de fous dans Marat/Sade. Elizabeth Taylor fouettant Marlon Brando dans Reflets dans un œil d'or.

1968: La symétrie dans 2001: Odyssée de l'espace. La tête de Vanessa Redgrave découvrant son nouveau pianiste dans Isadora. Les névroses des personnages dans Un Lion en hiver. O-O dans Rachel, Rachel. La musique et les vues de Vérone dans Roméo et Juliette. La sublimation de Faye Dunaway dans L'Affaire Thomas Crown.

1969: L'énorme charisme de Barbra Streisand dans Hello, Dolly!, pour moi la meilleure performance d'actrice dans une comédie musicale au cinéma. Le dernier plan sur Dustin Hoffman dans Midnight Cowboy. Les apparitions miraculeuses de Diana Rigg dans Au Service secret de sa majesté, de loin la seule performance potable sur l'ensemble de la saga. Maggie Smith se croyant sublime devant Celia Johnson dans Miss Brodie. Les illusions douchées de Susannah York dans On achève bien les chevaux. Glenda Jackson dansant au milieu des vaches, ou Alan Bates et Jennie Linden se roulant dans les fleurs des champs dans Women in Love.

1970: Berlioz pinçant la queue de sa sœur avec les touches du piano dans Les Aristochats. "The Girl in No Man's Land" et "Whistling Away the Dark" dans Darling Lili. Karen Black dans Five Easy Pieces. Les chemises blanches des jolis garçons dans Le Jardin des Finzi-Contini. Les paysages américains dans Little Big Man. Glenda Jackson se roulant dans la folie dans The Music Lovers. Delphine Seyrig qui manigance son propre mariage dans Peau d'âne. L'extraordinaire photogénie de Faye Dunaway dans Puzzle of a Downfall Child. Les teintes bleutées de la mer dans Ryan's Daughter. Joan Crawford qui joue comme dans Mildred Pierce face au singe préhistorique de Trog. Joanne Woodward au son de Glory Road dans WUSA.

1971: Le rire fou de Vanessa Redgrave dans les décors ultra stylisés des Diables. Le premier acte joyeux, et le second qui brise le cœur, dans Un Violon sur le toit. Margaret Leighton en son jardin dans The Go-Between. Cloris Leachman dans The Last Picture Show. Les joutes royales dans Mary, Queen of Scots. Julie Christie au son de Leonard Cohen dans McCabe and Mrs. Miller. Les tentures bleues et l'orgie finale de Raspoutine dans Nicholas and Alexandra. Jessica Walter interrompant la conversation avec l'éditrice dans Play Misty for Me, et qui prend évidemment bien soin de mettre les pieds dans le plat. Lynn Carlin bourrée (!) puis Lynn Carlin défoncée (!!) dans Taking Off. La photographie du bush dans Walkabout.

1972: L'air à la guitare et les relations électriques d'Eileen Heckart et Goldie Hawn dans Butterflies Are Free. Marisa Berenson qui fait sa vierge effarouchée dans Cabaret, et les réactions de Liza Minnelli qui vont avec. Les convives se retrouvant subitement sur scène dans Le Charme discret de la bourgeoisie. Romy Schneider sous la neige ou dans la grotte wagnerienne de Ludwig. La photographie dans Nybyggarna. Le labyrinthe dans Sleuth. L'aube dans le parc et le verre cassé d'Ingrid Thulin dans Cris et chuchotements.

1973: L'usage de Gassenhauer dans Badlands. Pas mal de choses dans Paper Moon, même si j'ai du mal à définir lesquelles dans l'immédiat. L'évasion des sacs d'or dans Robin des bois. L'inclusion du Tramway nommé Désir dans Sleeper. Sylvia Sidney se moquant de sa fille dans Summer Wishes, Winter Dreams. L'ambiance estudiantine dans The Way We Were.

1974: Les chapeaux de Faye Dunaway dans Chinatown. Valerie Perrine dans Lenny. Les plumes de Wendy Hiller et le regard défiant de Vanessa Redgrave dans Le Crime de L'Orient-Express. Liv Ullmann dans Scènes de la vie conjugale. Jennifer Jones et la rampe d'escalier dans La Tour infernale. Le retour de la clinique dans Une Femme sous influence.

1975: Incontestablement, la photographie dans Barry Lyndon. Marie-France Pisier dans Cousin, cousine. Karen Black dans Le Jour du fléau. Isabelle Adjani arpentant les rues de Bridgetown dans L'histoire d'Adèle H. Diane Keaton et ses amants, la comtesse frémissante, "You must be Don Antonio's sister" et finalement tout le reste dans l'hilarant Guerre et amour. La salle du trésor dans L'Homme qui voulut être roi. "Dues" dans Nashville. Tous les plans du mystérieux Pique-nique à Hanging Rock. Ann-Margret faisant passionnément l'amour à un traversin dans de la purée de pois cassés dans Tommy.

1976: L'orgasme de Faye Dunaway dans Network. Lenny Baker dans Next Stop, Greenwich Village. Les lumières de la ville dans Taxi Driver.

1977: La fille qui commente son propre assassinat par un piano, la tête gourmande qui tente de manger les fesses de sa copine, la belle-mère éthérée foulard au vent et la tante qui habite dans son frigo dans Hausu: une pure merveille! L'angoisse du voyage en train dans Julia. Gena Rowlands qui se cogne la tête contre les murs dans Opening Night.

1978: Les répliques de Bette Davis à Maggie Smith et les turbans d'Angela Lansbury dans Mort sur le Nil. Le shooting disco des Yeux de Laura Mars. Les couleurs de l'automne dans la Sonate de Bergman. Geraldine Page entre quatre murs et les tensions entre Mary Beth Hurt et Maureen Stapleton dans Intérieurs. Le cri d'Olivia de Havilland dans The Swarm: "Ouuuuuuuuh!"

1979: Quand Sigourney Weaver se rend compte qu'elle n'est pas seule dans la navette d'Alien. Roy Scheider et la séquence "Bye Bye Life" dans All That Jazz. Shirley MacLaine et l'onanisme dans Being There. Hanna Schygulla dans Le Mariage de Maria Braun. Meryl Streep dans Kramer vs. Kramer. New York en noir et blanc dans Manhattan. La réunion des actrices dans Les Sœurs Brontë. La nature et les saisons dans Tess.

1980: Susan Sarandon dans Atlantic City. La musique de fin du Dernier Métro. La stressante révolution industrielle en noir et blanc dans The Elephant Man. Les décors du Roi et l'oiseau.

1981: Toutes les répliques de Faye Dunaway dans Mommie Dearest, notamment "the respect that I'm entitled to!". Le style documentaire de Reds. Le regard lubrique de Julie Andrews en petit chaperon rouge dans S.O.B. Sissy Spacek et la danse du balais dans Raggedy Man.

1982: Karen Black transidentitaire dans Jimmy Dean, Jimmy Dean. Le générique en cartes postales de Meurtre au soleil. Les excentricités de Glenn Close dans Garp. Le stress du passage de la charrue dans Le Secret de NIMH. La maison rose, la folie de Kevin Kline et les confessions de Meryl Streep dans Le Choix de Sophie. Dustin Hoffman dans Tootsie. Beaucoup de choses dans Le Verdict. "Le Jazz Hot" et "Crazy World" dans Victor Victoria.

1983: La musique et les accessoires géants dans Meurtre dans un jardin anglais. La gouaille de Julie Walters dans Educating Rita. Woody Allen qui fait la causette à Carole Lombard et James Cagney dans Zelig.

1984: L'arrivée de diva de la première chanteuse à sa répétition dans Amadeus. Les robes blanches de Vanessa Redgrave dans Les Bostoniennes. L'ambiance achats de Noël et librairie new-yorkaise dans le ridicule Falling in Love. Peggy Ashcroft et les couleurs de La Route des Indes. Kathleen Turner au bout d'une liane dans Romancing the Stone.

1985: L'ouverture danoise d'Out of Africa. Norma Aleandro dans L'Histoire officielle. L'ambiance obscure dans Le Baiser de la Femme-Araignée. Meryl Streep qui déchiquette sa tapisserie dans Plenty. Jeff Daniels sortant de l'écran dans La Rose pourpre du Caire. Les regards intenses de Kelly McGillis et la musique du montage de grange dans Witness.

1986: Les décors animés dans An American Tail. L'effroi provoqué par les séquences finales de La Mouche et Blue Velvet: j'en tremble encore. Ratigan jouant de la harpe dans Basil détective privé. Dianne Wiest dans Hannah et ses sœurs. La visite aux grands-parents dans Peggy Sue s'est mariée. Toutes les séquences du parfait Chambre avec vue.

1987: Les sourires psychopathes de Glenn Close dans Fatal Attraction. Les deux sœurs vieillissantes dans Le Festin de Babette. Joan Chen qui mange des fleurs dans Le Dernier Empereur. L'homoérotisme champêtre et la visite nocturne dans Maurice. L'image fondante de Sally Kirkland dans Anna.

1988: Sandy Dennis se sentant exclue au bar dans Another Woman. Isabelle Adjani dans l'atelier inondé de Camille Claudel. L'intégralité des plans des absolument parfaites Liaisons dangereuses. Les gentils Gorilles dans la brume. Le balcon coloré dans Femmes au bord de la crise de nerfs. Maria Aitken et Jamie Lee Curtis dans Un Poisson nommé Wanda. La chanson ridicule des Toons dans Roger Rabbit. Les gratte-ciel new-yorkais au son de "Let the River Run" dans Working Girl.

1989: Anjelica Huston et Martin Landau sur la plage de Crimes et délits. L'arrivée de Michelle Pfeiffer à l'hôtel dans The Fabulous Baker Boys. Sean Connery caquetant devant les mouettes dans Indiana Jones et la dernière croisade. La musique d'ouverture dans La Petite Sirène. Kathleen Turner défonçant une voiture de sang froid dans La Guerre des Roses. Fabia Drake dans Valmont! Les saisons new-yorkaises dans When Harry Met Sally...

1990: Le jardin du château et la danse sous la neige dans Edward Scissorhands. Mamie Baba qui perd la boule dans le Trésor de la lampe perdue. La métamorphose de Mia Farrow dans Alice. Le vol à dos d'aigle dans The Rescuers Down Under.

1991: Le prologue de La Belle et la Bête, entre vitraux et forêt sur les accords magiques et ténébreux d'Alan Menken. A peu près tout dans Épouses et concubines. Le dynamisme de Mary Stuart Masterson dans Fried Green Tomatoes. L'ensemble rouge de Marisa Paredes dans Talons aiguilles. La séquence finale de Thelma and Louise.

1992: La métamorphose de Michelle Pfeiffer dans Batman Returns. Le maquillage de Gary Oldman et le "superbe" accent de Keanu Reeves dans Dracula. Vanessa Redgrave complètement perdue au débat dans Howards End. L'orientalisme d'Orlando.

1993: Argh... les décors, les costumes et Michelle Pfeiffer dans The Age of Innocence. La séquence "Dreams" dans Arizona Dream. L'angoissante arrivée au pouvoir des communistes dans Adieu ma concubine, avec les drapeaux rouges flottant dans les rues. Sigourney Weaver démasquant Kevin Kline dans Dave. Le montage téléphonique dans Manhattan Murder Mystery. Les retrouvailles sur la jetée dans Les Vestiges du jour. Tout, sauf cet horrible mariage qui donne envie de fuir toutes les cérémonies en courant dans Garçon d'honneur.

1994: Les conseils littéraires de Chazz Palminteri dans Bullets Over Broadway. Johnny Depp travesti dans Ed Wood. Les confessions de Kristin Scott Thomas dans Four Weddings and a Funeral. Kate Winslet se retournant dans la séquence rêvée d'Heavenly Creatures. Toutes les jolies images d'Immortal Beloved. L'apparition inattendue d'Ashka, l'idole de mon enfance, dans la boutique de mariage de Muriel's Wedding!!! Quelle bonne surprise! Isabelle Adjani dans les couloirs du Louvre et Virna Lisi au chevet du roi dans La Reine Margot.

1995: Les rues de Vienne de nuit dans Before Sunrise. La classe de Sean Connery en roi Arthur dans First Knight. Le dernier plan sur Sandrine Bonnaire dans La Cérémonie. Les images de Provence dans Le Hussard sur le toit. Le raton-laveur, le ciel rose et la séquence colorée du vent dans Pocahontas. Gong Li et les grands numéros de shídàiqǔ dans Shanghai Triad: bonheur!

1996: Les minarets maghrébins et les fenêtres quadrillées dans Le Patient anglais. New York sous la neige et Goldie Hawn s'envolant dans Everyone Says I Love You. Le graphisme des vieilles rues parisiennes et de la cathédrale dans The Hunchback of Notre-Dame. La rencontre à travers l'aquarium dans Romeo + Juliet. La dame de la rue du Paradis dans Temptress Moon.

1997: L'impératrice douairière badass qui donne des coups de pied à Raspoutine sur la rivière gelée, puis rattrape un train en marche au pas de course dans Anastasia. Joan Cusack en robe de mariée dans In & Out. Le chapeau violet de 384km de diamètre dans Titanic. La photographie vénitienne des Ailes de la colombe. La musique de Gattaca. La séquence "I Won't Say I'm in Love" dans Hercules. Joan Allen dans la voiture givrée dans The Ice Storm. La tension portée à son comble dans l'ouverture de Paradise Road, pour le coup un film manipulateur qui m'a néanmoins beaucoup marqué. Les regrets de Vanessa Redgrave dans Mrs. Dalloway. La chapellerie dans On connaît la chanson.

1998: Ian McKellen réclamant l'effeuillage du journaliste dans l'interview de Gods and Monsters. Les deux filles coincées dans les toilettes dans Fucking Åmål. Joan Allen découvrant la couleur dans Pleasantville. Kathy Bates castratrice dans Primary Colors. Les statues géantes en plein désert dans Le Prince d'Egypte. Imelda Staunton arrachant les moustaches de Gwyneth Paltrow dans Shakespeare in Love. Les décors dans The Truman Show. Les costumes dans Velvet Goldmine. Et je sais que The Avengers est un énorme navet, mais Ralph Fiennes en sueur dans un sauna...

1999: Le sarcasme de Catherine Keener dans Being John Malkovich. Les rayons bleus dans les yeux de Chloë Sevigny dans Boys Don't Cry. Les costumes rétro, la luxueuse ambiance italienne, le charisme de Cate Blanchett et la suspicion de Gwyneth Paltrow dans The Talented Mr. Ripley. L'immense affiche de Marisa Paredes dans Todo sobre mi madre. Miranda Richardson cueillant des fleurs à l'orée d'un bois brumeux dans Sleepy Hollow. Le grotesque ultime de Sophie Marceau "Tu m'attraperas pas! Nananèreuh!" dans Le Monde ne suffit pas, et de Reese Witherspoon cheveux au vent dans sa grosse voiture dans Cruel Intentions: deux des plus mauvais films du monde, mais c'est tellement abyssal que c'en devient très drôle. Les baleines au clair de Lune dans Fantasia 2000. La première fois lesbienne de Juliane Köhler dans Aimée & Jaguar.

2000: La séquence "I've Seen It All" de Dancer in the Dark. Julia Roberts qui se moque de l'avocate BCBG dans Erin Brockovich. La démarche de Maggie Cheung dans In the Mood for Love. La tentation de Joaquin Phoenix dans Quills. Le bulletin météo d'Elaine May dans Small Time Crooks. Les paysages de Tigre et Dragon.

2001: Les rondelles de concombre de Maggie Smith dans Gosford Park. Le dynamisme de Gene Hackman dans The Royal Tenenbaums. Nicole Kidman lampe en main dans Les Autres. La séquence éléphantine dans Moulin Rouge! L'humiliation dévastatrice de Naomi Watts sur les hauteurs de Mulholland Drive, une situation que je ne souhaite à personne de vivre, c'est bien plus dur que ce qu'on peut imaginer.

2002: Le traumatisme à vie laissé par un unique visionnage du Pianiste. Une expression farfelue de Catherine Zeta-Jones dans Chicago. Meryl Streep regardant ses orteils dans Adaptation. Les couleurs vives de Hero et Frida. Les couleurs de l'automne dans Far from Heaven. La crise de nerfs de Meryl Streep dans sa cuisine et de Nicole Kidman sur le quai de gare dans The Hours. Les couleurs de la maison, l'orgueil de Catherine Deneuve, la métamorphose d'Isabelle Huppert, les bouffées de cigarettes de Fanny Ardant, la danse d'Emmanuelle Béart et les confessions de Danielle Darrieux dans Huit Femmes.

2003: Renée Zellweger agacée par la niaiserie des amants dans Cold Mountain. La scène noire de Dogville. Le bleu de la palette de Vermeer dans La Jeune Fille à la perle. Le voyage à Kyoto dans Lost in Translation. Holly Hunter dans Thirteen. Suzanne Flon qui laisse tomber un cadavre dans La Fleur du mal.

2004: Les petits pois bleu fluo dans The Aviator. Le gros plan sur Nicole Kidman et les yeux perçants d'Anne Heche dans Birth. La plage blanche dans Eternal Sunshine of the Spotless Mind. La déglutition traumatisante dans Maria Full of Grace. Virginia Madsen dans Sideways. Le jeu des sons dans Le Secret des poignards volants.

2005: La seconde scène d'amour entre Heath Ledger et Jake Gyllenhaal dans Brokeback Mountain: contrairement à beaucoup je n'aime pas le film outre mesure, mais j'avais dix-sept ans au moment de sa sortie en salles... Les couleurs du Chien jaune de Mongolie. La scène finale de Corpse Bride. La nullité absolue de Monica Bellucci dans Les Frères Grimm: il faut le voir pour le croire, c'est tellement mauvais que nous en riions encore un an après! Le spectacle de la nature dans Le Nouveau Monde. La salle des sculptures d'Orgueil et Préjugés.

2006: La photographie honteusement touristique dans Casino Royale. Meryl Streep et les questions ennuyeuses dans Le Diable s'habille en Prada. La photographie chinoise du Voile des illusions. La parade multicolore dans Paprika. L'air totalement blasé d'Helen Mirren forcée d'écouter les divagations de son premier ministre dans The Queen. Carmen Maura sous le lit dans Volver. L'intégralité des plans dans Marie Antoinette: le film de ma vie, et mon premier âge d'or.

2007: Julie Christie qui "part" dans Away from Her. La chaleur estivale du jardin anglais d'Atonement, et la conclusion redgravienne dévastatrice. Les séquences "Au Parc", "Brooklyn Bridge" et "Je n'aime que toi" des Chansons d'amour. Irene Dunne dans Lust, Caution. La fin musicale de Naissance des Pieuvres. Rémi sur les toits de Paris dans Ratatouille.

2008: Le regard ému de Wall-E.

2009: Karin Viard prête à conquérir Hollywood dans Le Bal des actrices. Les papillons dans Bright Star. Les cadavres dans la forêt de La Comtesse. L'introduction musicale dans An Education. Ash ne souhaitant pas partager sa chambre dans Fantastic Mr. Fox. Anne Dorval remettant à sa place son insupportable rejeton dans J'ai tué ma mère. La séquence homoérotique en noir et blanc dans A Single Man. Les crises de larmes systématiques suscitées par Where the Wild Things Are.

2010: Les plumes du générique de fin de Black Swan. La drôlerie d'Isabelle Huppert dans Copacabana. Les saisons milanaises sur la musique de John Adams dans Io sono l'amore. Pas mal d'intrigues des Mystères de Lisbonne. Yoon Jeong-hee contemplant la nature dans Poetry. Les poèmes ridicules de Catherine Deneuve dans Potiche. L'indécision de Raiponce découvrant le monde pour la première fois dans Tangled: c'est tellement moi!

2011: Sissy Spacek riant de son horrible fille dans The Help. L'ambiance générale, saisissante, dans Une Séparation.

2012: Jennifer Ehle ayant enfin du temps d'écran dans Zero Dark Thirty. Comme pour 2011, pas mal de bons films, mais rien qui me fasse particulièrement plaisir autrement.

2013: Greta Gerwig courant dans les rues de Frances Ha. Les décors de Gravity. Agata Kulesza qui fume dans Ida. Emma Thompson faisant la morale à Mickey dans Saving Mr. Banks.

2014: La hargne de la critique de théâtre dans Birdman. La scène de la voiture dans Deux jours, une nuit. Les décors sucrés du Grand Budapest Hotel. Meryl Streep qui s'énerve dans Into the Woods. Pas mal de choses dans Pride.

2015: début de réponse le mois prochain.

Et vous? Des "favorite things" à partager?

dimanche 13 décembre 2015

Nouvelles en vrac

J'ai plein d'articles en préparation (seconds rôles 1940 et 1941, mon classement définitif pour déterminer qui est lead ou supporting quand une performance peut prêter à confusion, mon panthéon d'actrices toutes périodes confondues) mais n'ai pas du tout le temps de les mettre en forme. J'ai quelques jours libres après le 25 et j'essaierai de bloguer à ce moment-là, alors voici quelques nouvelles en vrac pour patienter.

J'ai revu Sappho (1921) ce mois-ci. Ce film de Dimitri Buchowetzki a longtemps été mon œuvre-phare des années 1920, avec tout ce qu'il faut d'amants fous furieux, de courtisanes emperlées, de bals costumés à l'opéra et de teintes multicolores pour me ravir au plus haut point, et ce fut un réel plaisir que de découvrir cet ensemble, porté par une musique volontairement obscure, seul dans une grande maison un soir d'orage, il y a quelques années. Mais c'était oublier à quel point l'histoire est pour le moins incohérente: tout laisse à croire que le frère sain d'esprit sait qui est Sappho lorsqu'elle tente de le vamper, mais on nous apprend par la suite que non; l'héroïne oscille par ailleurs entre extrême sympathie de repentante et vénalité au gré des séquences, et les acteurs surjouent beaucoup trop par moments, même pour un film muet. Ceci dit, ça me fait toujours beaucoup d'effet, en particulier pour certaines séquences très inspirées (l'apparition de dos de l'héroïne, les yeux funestes d'Alfred Abel, le voyage en automobile, Sappho foulard au vent sur la jetée, les cercles concentriques sur les hommes assis, le balancement général entre folie angoissante et sérénité), et pour l'ambiance effrayante à l'opéra, où Pola passe par toutes sortes d'émotions de façon convaincante lors d'un gros plan, bien que ce soit très joué. Bref, je ne pense plus que ce soit un chef-d’œuvre, et c'est une histoire qui accuse vraiment son temps, mais ça me parle toujours beaucoup. A l'origine, Pola était ma gagnante cette année-là pour ce rôle, et Mary Pickford en 1927 pour My Best Girl, mais je me demande si je ne vais pas inverser les votes entre Little Lord Fauntleroy et Barbed Wire/Hotel Imperial. Negri reste mon actrice du muet favorite, mais je la préfère finalement avec un peu plus de sobriété.

Pour rester dans les films muets, j'ai également découvert Scaramouche de Rex Ingram (1923) cet automne, et honnêtement, ça n'arrive pas à la cheville du remake coloré de 1952. Certes, ça n'a pas l'avantage d'avoir une flamboyante Eleanor Parker dans un rôle dynamique puis nuancé, Edith Allen n'étant ici qu'une intrigante des plus communes, mais force est de reconnaître que le tout laisse quand même sur sa faim. Déjà, c'est beaucoup plus long que le remake, puisque la révélation finale de 1952 n'est ici qu'un rebondissement central, et le dernier acte sur la Révolution traîne un peu en longueur, même s'il est toujours captivant d'haleter en compagnie d'Alice Terry et Julia Swayne Gordon coincées dans leur hôtel particulier à mesure que la foule déchaînée se rapproche de leur quartier, en coupant la tête de tout ce qui a une particule: le héros arrivera-t-il à temps? Quoi qu'il en soit, ça reste très bon sur le plan visuel, entre la reconstitution du village XVIIIe avec son moulin, du château et du théâtre, et les costumes sont également assez sensationnels. Mais il manque un je-ne-sais-quoi qui aurait pu me faire mieux aimer tout ça. Ça tient peut-être aux tentatives maladroites d'insérer de l'humour dans l'histoire, avec plein de gros personnages grimaçants et trop maquillés censés faire rire, où ça tient peut-être aux acteurs qui manquent un peu de relief, mais ce qui aurait pu être un chef-d’œuvre n'est en définitive qu'un honnête divertissement.

Par ailleurs, j'ai également revu la version de 1940 de Waterloo Bridge de Mervyn LeRoy, et alors que j'avais souvenance d'un bon film un peu moins captivant que la version de 1931, je me suis finalement laissé emporter par l'histoire, malgré une fin très problématique: autant la décision de Mae Clarke était logique étant donné la dose de dédain contenu dans l'accueil néanmoins courtois de sa possible belle-mère, autant celle de Vivien Leigh est impossible à prendre au sérieux vu la chaleur de ses relations avec les membres de la maisonnée. Mais si l'on accepte l'idée que de tels rebondissements étaient à la mode dans les années 1940, rien n'empêche d'aimer l'histoire, qui est d'ailleurs filmée avec beaucoup de délicatesse. Quant à l'interprétation, elle vient de faire un grand bond dans mon estime: Robert Taylor n'est jamais fade, mais au contraire touchant; Virginia Field confirme ma première impression très favorable en crevant l'écran dans un second rôle nuancé, et Vivien Leigh n'a en définitive absolument rien à envier à Mae Clarke. La scène d'ivresse au restaurant m'a dérangé mais dans le bon sens du terme, et la séquence à la gare, oscillant entre tapin et retrouvailles improbables, est criante de vérité dans chaque émotion. J'avais même oublié que le rôle est en fait plus riche que dans la première version, puisque l'évolution du personnage se dessine en direct sous nos yeux. Je peux tout à fait considérer de lui donner l'Orfeoscar cette année-là si d'aventure je change d'avis en 1939.

D'ailleurs, en parlant de remises de prix, je crois que ma meilleure actrice 1942 sera quand même Ginger Rogers. Je n'arrête pas d'hésiter entre elle et Greer Garson, et j'estime assez la deuxième pour avoir envie de la couronner une fois, mais après avoir revu les deux performances (Major et Random Harvest) dans la foulée, je suis finalement plus séduit par la première. A vrai dire, ç'a toujours été le cas, mais comme dans un système oscarien je n'avais pas mieux à proposer que Ginger en 1952, ça ouvrait une place pour Greer dix ans plus tôt. Mais internationalement, j'ai une autre gagnante pour la décennie suivante, aussi vais-je probablement revenir vers Ginger pour The Major, où elle me fait hurler de rire à chaque plan avant de me toucher en toute sincérité dans la dernière séquence. J'admire toujours énormément Garson, mais il est vrai qu'elle ne fait pas grand chose de plus que d'habitude dans Random Harvest: c'est surtout le film, sublime, qui me donne envie de la récompenser.

Pour finir, j'ai également effectué quelques changements parmi la liste officielle. En fait, je suis totalement d'humeur "Julie Andrews" depuis un mois, je n'arrête pas de chanter Feed the Birds quand je marche en ville, et My Favorite Things en faisant mon ménage, si bien que j'ai fini par revoir The Sound of Music pour la troisième fois en un an et demi (même pas honte!), et j'avoue, je la trouve absolument délicieuse dans ce rôle. J'ai longtemps trouvé qu'il lui manquait un petit surplus d'émotions dramatiques à jouer, mais elle est tout de même exquise dans la gravité, les scènes d'humour sont également abordées avec beaucoup de sérieux, et le tout me ravit absolument. Victor Victoria reste son sommet, mais ça fait tellement sens de la récompenser pour The Sound que j'ai finalement changé mon vote en sa faveur en 1965, ce qui me permet de récompenser Meryl Streep pour son chef-d’œuvre en 1982, n'ayant jamais beaucoup aimé Silkwood malgré sa réussite interprétative incontestable. Du coup, c'est actuellement Julie Walters qui gagne en 1983, et j'ai également choisi Vanessa Redgrave l'année suivante. Je ne suis pas sûr de pouvoir récompenser Judy Davis dans la liste officielle, mais c'est aussi que les Oscars ne l'ont pas distinguée pour les rôles où je la préfère, alors pas d'inquiétudes et patience, patience! Susan Sarandon a quant à elle toujours été ma favorite en 1991 et vient de remporter la mise comme il se devait, et j'ai finalement complété ma collection "2014" en dénichant Still Alice pour rien à la campagne. Le film est franchement médiocre et ne permet pas à Julianne Moore de briller, malgré une assez bonne performance dans l'absolu, de telle sorte que Marion Cotillard est bel et bien ma gagnante officielle en titre. Le point le plus litigieux actuellement? 2006: Judi Dench et Penélope Cruz sont très très bien (Meryl Streep aussi), mais j'adore Helen Mirren en reine d'Angleterre, même si l'actrice m'a terriblement déçu par la suite. Je me demandais si je ne pouvais pas la faire gagner comme second rôle 2001 afin de laisser la place à une autre en 2006, mais impossible de me décider.

Autrement, impossible d'avoir un avis sur la saison en cours, n'ayant pu voir aucun des films qui se retrouveront très probablement aux Oscars le mois prochain. En lisant un peu ce qui se dit ça et là, j'ai l'impression que l'année ne compte pas de frontrunner particulier, ce qui excite davantage les esprits. J'ai l'impression que Cate Blanchett dans Carol, Saoirse Ronan dans Brooklyn et Charlotte Rampling dans 45 Years pourraient beaucoup me plaire et ce sont celles-là que j'attends en priorité. Je ne connais pas Brie Larson dont tout le monde parle comme d'une déesse descendue de son socle, mais son film a l'air intéressant. Et Rooney Mara me laisse de marbre en temps normal mais il semble qu'elle ait très bonne presse cette fois-ci. Par contre, Alicia Vikander ne m'inspire pas du tout. Vraiment pas du tout. Et je me demande s'ils ne finiront pas par nommer Jennifer Lawrence par défaut: je ne cherche pas à lui être systématiquement défavorable, mais c'est une personnalité qui m'ennuie, elle est vulgaire et sa bonhomie calculée (jurer par-ci par-là, tomber 150 fois devant une caméra etc) sonne faux. Ça ne me donne dès lors pas très envie de voir Joy, mais pourquoi pas? Bref, 2015 pourrait être une année quitte ou double: beaucoup de projets intéressants sur le papier (beaucoup plus qu'en 2014 à mes yeux), mais on risque de se retrouver avec un palmarès qui pourrait m'ennuyer (le quartet de l'horreur: DiCaprio, Lawrence, Stallone et Vikander, pitié non, même si le premier semble inéluctable, ne serait-ce que pour en finir une bonne fois pour toutes). On verra ce que tout ça donnera, j'espère simplement ne pas être déçu par Carol, Brooklyn et 45 Years, mes attentes étant très (trop?) hautes actuellement.

samedi 12 décembre 2015

Je suis stupide!


Ce midi, j'ai découvert que j'étais profondément stupide et, pire que tout, carrément inculte. Et tout ça grâce à Monsieur et Madame Roger et Françoise Caratini, qui ont apparemment supervisé l'édition d'une encyclopédie (Bordas) dans les années 1970, dont le tome sur le cinéma m'a enfin ouvert les yeux sur mes profondes lacunes intellectuelles, au point que j'hésite fortement à m'inscrire en CP l'année prochaine enfin d'apprendre à lire, ce que je ne sais apparemment pas faire d'après ces délicieuses personnes. Extraits:

Luis Buñuel: "[...] ses films français (Le Journal d'une femme de chambre, 1963, Le Charme discret de la bourgeoisie, 1972, et quelques autres) sont d'un intérêt médiocre."

Jean Cocteau: "Le Sang d'un poète (1930) est au programme de toutes les rétrospectives de cinéma "d'avant-garde" (l'avant-garde de nos grands-parents). Les autres films de Cocteau sont des divertissements plus ou moins précieux, plus ou moins commerciaux, sans grands rapports avec le cinéma."

George Cukor: "Un des moins médiocres réalisateurs commerciaux hollywoodiens; il tourne depuis 1930 des œuvres qui n'ont absolument aucun intérêt."

Victor Fleming: "Réalisateur commercial, spécialiste du navet à grand spectacle. Il a été l'exécuteur des hautes œuvres du producteur David Selznick en terminant Gone with the Wind (Autant en emporte le vent, 1939), qu'avait commencé Cukor, une superproduction bêtifiante destinée à un public d'analphabètes."

Greta Garbo: "surnommée "la Divine" et qui n'a tourné qu'un seul bon film dans sa carrière, La Rue sans joie de Pabst, en 1925 (tous ses autres films sont des œuvres commerciales sans intérêt)."

Lillian Gish: "La plupart du temps, [les vedettes] n'avaient guère que les qualités que leur prêtaient les agents de publicité ou celles que parvenaient à leur faire exprimer des directeurs d'acteurs efficaces. Leur place, dans la mythologie du XXe siècle, est énorme et, à notre avis, scandaleuse, sinon ridicule. Voici Lillian Gish (née en 1896), qui fut, avec sa soeur Dorothy, l'interprète favorite de D. W. Griffith (à gauche), [...] et à droite, Mary Pickford (née en 1893), "la petite fiancée du monde" dans Sparrows en 1926)."

David Lean: "Technicien honnête et patient, sans imagination, qui a d'abord tourné les films à l'idéologie simpliste de Noël Coward, et qui s'est révélé avec Brief Encounter (1945), un film sentimentalo-intimiste où l'on parle beaucoup trop. Après quelques réalisations commerciales sans intérêt, David Lean a réalisé The Bridge on the River Kwai (1957), dont l'intérêt cinématographique est quasi nul, mais qui a connu un énorme succès commercial. Les autres films de David (Lawrence d'Arabie, Dr. Jivago) sont plus que médiocres."

Mervyn Le Roy: "Ses premiers films, tournés pendant la grande dépression américaine, donnaient à penser qu'un grand cinéaste été né. [...] Puis Le Roy s'établit négociant en superproductions."

Louis Malle: "A participé au mouvement de la Nouvelle vague française, mais son œuvre reste froide, et pleine de concessions commerciales."

Joseph Mankiewicz: "Un sous-Lubitsch, abusivement admiré pour ses œuvres qui relèvent du pur négoce."

Billy Wilder: "Réalisateur commercial de qualité, mais sans plus."

Sam Wood: "On le cite ici non pour son Goodbye, Mr. Chips (1939), bêtifiant à souhait, mais pour avoir mis en scène deux films dont les frères Marx étaient les auteurs [...]."

William Wyler: "Réalisateur sérieux, qui fit avec conscience son métier de cinéaste, surtout entre 1940 et 1950. Mais ses qualités semblent avoir été surestimées."

Et encore, je peux m'estimer heureux d'être un spectateur et non une spectatrice, ces dernières étant systématiquement définies comme soit des "Margot" tout juste bonnes à se pâmer devant Rudolph Valentino, soit des dactylos ne sachant faire autre chose que "se poudrer le nez comme Mary Pickford, danser comme Pola Negri, pleurer comme Lillian Gish, ou vamper un collègue de bureau en lui disant, comme Theda Bara dans ses grandes scènes d'amour sophistiquées: "Kiss me, you fool!"" Il n'y a apparemment plus eu de femmes sur Terre après 1926, toutes s'étant suicidées à la mort de Valentino, et seule madame Caratini ayant survécu.

Le semblant de confiance en moi qu'il me restait vient de se jeter par la fenêtre. Je n'ai plus qu'à faire de même.

samedi 28 novembre 2015

Inventaire 2014


Le mois dernier, je me suis enfin décidé à compléter mes lacunes les plus récentes parmi les films de 2014 manqués au cinéma. L'occasion pour moi d'établir un début d'inventaire avant d'oublier la moitié des titres lorsque viendra le temps de me pencher sur les remises de prix de l'année... dans dix ans! Pour info, je listerai les films selon leur date de sortie originelle, même si j'en compterai certains pour les remises de prix de 2015, à l'image de Little Chaos, sorti hors festivals un an après. Par contre, je m'excuse d'avance, mais j'ai vu énormément de navets pour cette année, mea culpa. Enfin, les paragraphes ornés d'une photo désignent les films qui constituent mon top 10.
[Mise à jour: 33 films vus en septembre 2017.]


Allemagne

Phoenix: écrit et réalisé par Christian Petzold, produit par Florian Koerner von Gustorf et Michael Weber, avec Nina Hoss, Nina Kuzendorf et Ronald Zehrfeld. Coécrit par Harun Farocki, d'après Le Retour des cendres d'Hubert Monteilhet.
Remarques: Je suis légèrement mitigé sur celui-là. J'ai indéniablement suivi l'histoire avec intérêt, mais je ne suis pas sûr d'avoir vu un grand film à la fin, malgré une conclusion en apothéose, excellente de tensions et de mise en scène inspirée. Nina Hoss est très bien à mesure qu'on apprend à connaître son personnage, mais celui-ci accepte si facilement les choses qu'elle se fait tout de même voler la vedette par Nina Kuzendorf et Ronald Zehrfeld dans une large partie du film. La fin, et ses talents de chanteuse, en font tout de même une candidate de choix pour une nomination, mais elle ne se démarque pas tout à fait de la masse des performances potentiellement nommables non plus.
Distinctions possibles: Nina Hoss.


Australie

The Babadook: écrit et réalisé par Jennifer Kent, produit par Kristina Ceyton et Kristian Moliere, avec Essie Davis.
Remarques: C'est très bien fait, mais je suis las de ces films d'horreur où l'on va crescendo dans la possession et où l'on est censé avoir peur, hélas sans succès. Essie Davis livre cependant une bonne performance, qui me touche peu mais qui révèle bien les travers d'un personnage pas franchement sympathique au fond.
Distinctions possibles: Essie Davis.


Belgique

Deux jours, une nuit: écrit et réalisé par Luc et Jean-Pierre Dardenne, coproduit par Denis Freyd, avec Marion Cotillard.
Remarques: Comme on pouvait s'y attendre, un film ultra réaliste mais contrairement à ses cousins français listés plus bas, je suis totalement captivé. Vraiment. Le scénario ne tourne jamais en rond bien que ce soit peu ou prou la même histoire d'une séquence à l'autre: Sandra réussira-t-elle à convaincre ses collègues? Chaque personnage a ses motifs propres, le suspense est à son comble à chaque porte, et l'on ne s'ennuie absolument jamais. Marion Cotillard est excellente, sans aucun effet, et chacun de ses regards en dit toujours très long: c'est un remarquable travail d'actrice qui apporte énormément à l'histoire. Dès lors, la nomination est assurée comme meilleure actrice, et je me demande honnêtement si dans l'état actuel des choses je n'irais pas jusqu'à nommer le film dans la catégorie la plus prestigieuse.
Distinctions possibles: film, frères Dardenne, Marion Cotillard, scénario.


Chine

Le Retour (歸來) (Guīlái): réalisé par Zhang Yimou, scénario de Zou Jingzhi d'après un roman de Gelin Yan, avec Gong Li, Chen Daoming et Zhang Huiwen.
Remarques: Un grand retour en forme de la part du maître chinois et de sa muse. D'aucuns reprochent pourtant au film sa relative fadeur politique au profit d'une histoire intime, mais les choix opérés me semblent au contraire judicieux: en se recentrant sur les conséquences de la dictature sur une simple famille, le tout en devient absolument bouleversant, en évitant chaque piège du mélodrame tout en faisant bel et bien sentir la portée politique du message, de façon discrète, à travers les détails du quotidien. L'histoire est ainsi captivante, la mise en scène inspirée, le montage éblouissant lors de la séquence de la gare, et le clou du spectacle, c'est bien entendu l'interprétation, notamment Gong Li, très convaincante et délicatement touchante en amnésique, et peut-être plus encore exceptionnelle dans les séquences précédant sa maladie: rien que son tout premier regard est extraordinaire à observer.
Distinctions possibles: film, Zhang Yimou, Gong Li, montage, musique.


Etats-Unis

Before I Go to Sleep: écrit et réalisé par Rowan Joffe, produit par Mark Gill, Avi Lerner, Liza Marshall et Matthew O'Toole, avec Nicole Kidman, Mark Strong et Colin Firth. D'après un roman de S.J. Watson.
Remarques: Aussitôt vu, aussitôt oublié, encore que ça se suive avec intérêt sur le moment. On sent en tout cas que c'est ultra mineur et l'on comprend pourquoi le film est passé totalement inaperçu, mais Nicole Kidman n'est pas mal en amnésique qui doit repartir à zéro à chaque réveil alors qu'elle mène une enquête.
Distinctions possibles: /


Big Eyes: réalisé par Tim Burton, écrit par Scott Alexander et Larry Karaszewski, avec Amy Adams et Christoph Waltz.
Remarques: Un film qui ne me faisait pas du tout envie, mais que j'ai réussi à voir par télévision. C'est comme prévu extrêmement médiocre mais cependant pas catastrophique, en grande partie grâce à Amy Adams, une actrice qui m'inspire généralement peu mais qui livre une honnête performance suscitant une certaine dose d'empathie pour l'héroïne, à laquelle on souhaite un dénouement positif. En revanche, Christoph Waltz cabotine tellement que c'en devient gênant. Quoi qu'il en soit, ce n'est pas recommandable, mais c'est moins pire que ce que la bande-annonce ou la filmographie récente du réalisateur auraient pu laisser croire.
Distinctions possibles: /


Birdman (or The Unexpected Virtue of Ignorance): écrit, produit et réalisé par Alejandro González Iñárritu, coproduit par John Lesher , Arnon Milchan et James W. Skotchdopole; avec Michael Keaton, Emma Stone, Edward Norton et Naomi Watts. Coécrit par Nicolás Giacobone, Alexander Dinelaris et Armando Bo, d'après une pièce de Raymond Carver.
Remarques: Je suis de ceux pour qui l'Oscar du meilleur film est plutôt mérité, en particulier pour cette mise en scène virtuose toute de plans-séquences, ce qui étonne de la part d'un réalisateur capable de pondre des choses comme Babel. Ceci dit, je ne me roule pas non plus par terre pour revoir le film avant longtemps, mais je peux absolument considérer des nominations pour Iñárritu, pour Michael Keaton pour qui la notion de "rôle de sa vie" semble avoir été inventée, et pour plusieurs seconds rôles: au moins Edward Norton pour sûr avec son portrait d'acteur imbuvable et autocentré, et peut-être pour Emma Stone et Naomi Watts, en fonction des places disponibles. J'ai également adoré le caméo de Lindsay Duncan en critique dépressive, mais elle a trop peu de temps d'écran!
Distinctions possibles: film, Alejandro Iñárritu, Michael Keaton, Edward Norton, scénario.


Boyhood: écrit, produit et réalisé par Richard Linklater, coproduit par Jonathan Sehring, John Sloss et Cathleen Sutherland, avec Ethan Hawke et Patricia Arquette.
Remarques: J'ai mis du temps avant de me décider à tenter l'expérience, n'étant pas du tout sûr au départ de pouvoir tenir près de trois heures devant des gens dont la seule préoccupation est de manger des frites et de s'habiller en t-shirt an quotidien. Pourtant, la surprise fut plutôt bonne, en grande partie grâce à la conception très originale du projet. Le seul défaut: une énorme erreur de casting pour le héros, puisqu'on part d'un gamin insipide pour aboutir à un jeune homme amorphe et inexpressif. Les parents sont en revanche très bien, et c'est très intéressant pour moi de découvrir ce que sont des parents considérés comme "normaux" par la société. Après, je sais que l'Oscar de Patricia Arquette reste controversé, certains arguant qu'elle ne fait rien de spécial, mais elle donne beaucoup de chaleur au film, et son dernier monologue où elle tente de pousser sa progéniture hors du nid révèle qu'elle est bien un personnage à part entière, et pas juste une mère aimante de soutien. Bref, un projet rare que je suis content d'avoir découvert même si les protagonistes ne me parlent pas du tout. J'aurais au moins nommé Richard Linklater comme réalisateur pour sa prouesse d'avoir créé un film très cohérent sur douze ans, et peut-être aurais-je également cité les parents comme seconds rôles. Vu le concept de départ, le montage reste aussi une catégorie non négligeable.
Distinctions possibles: Richard Linklater, montage.


Gone Girl: réalisé par David Fincher, produit par Ceán Chaffin, Joshua Donen, Arnon Milchan et Reese Witherspoon; avec Ben Affleck, Rosamund Pike, Carrie Coon et Kim Dickens. Scénario de Gillian Flynn d'après son propre roman.
Remarques: Ok, ça se suit avec un plaisir relatif, mais ça reste l'archétype du polar tout juste bon à faire frémir le lecteur du dimanche sur la plage abandonnée, ce qui ne me donne pas particulièrement envie de le revoir. Autrement, Rosamund Pike est captivante mais elle rate quelque peu son troisième acte, à cause d'une scène où elle parle de ses aventures devant sa maison, avec un geste de la main qui sonne archi faux. Certains rôles secondaires sont quant à eux assez croustillants, en particulier du côté de Carrie Coon en sœur émotive et concernée et de Kim Dickens en détective qui voit l'affaire lui échapper de plus en plus. Éventuellement des nominations pour Rosamund Pike et Carrie Coon mais j'ai finalement découvert bien plus intéressant depuis, même si le suspense reste assez bien mis en scène pour rendre le film au moins digne d'intérêt.
Distinctions possibles: Rosamund Pike, Carrie Coon.


Grace of Monaco: réalisé par maestrrrrro Olivier Dahan, écrit et produit par on s'en fiche, avec Nicole Kidman et Tim Roth.
Remarques: Ahem. J'ai vu ça à la télévision cet été, juste pour vérifier si c'était vraiment aussi apocalyptique qu'on le dit. Honnêtement, c'est tout juste bon à provoquer des choses pas propres sous la ceinture de Stéphane Bern, mais notons qu'à la différence de La Môme, le scénario se tient au moins à un laps de temps assez court, sans avoir à maquiller son actrice principale en momie pour ses vieux jours (le sujet ne s'y prêtait pas, certes). Mais ça n'a aucun intérêt: c'est bidon, l'on s'ennuie ferme, le récit est totalement linéaire avec pour seul but de faire défiler tous les grands noms de l'époque histoire d'amuser la galerie, et même Nicole Kidman échoue à dynamiser l'ensemble. La seule piste qui aurait pu m'intéresser, c'est celle avec la méchante belle-sœur qui complote dans le dos du prince, et encore.
Distinctions possibles: /


The Grand Budapest Hotel: écrit, produit et réalisé par Wes Anderson, coproduit par Jeremy Dawson, Steven Rales et Scott Rudin, coécrit par Hugo Guinness, avec Ralph Fiennes, Tony Revolori et plein de beau monde.
Remarques: je ne suis pas le plus grand fan de Wes Anderson, dont les univers décalés, qui devraient me parler très fort, m'ont tout de même toujours un peu déçu hormis pour les Tenenbaum, encore que celui-là reste un bon cru. A vrai dire, rien que les mots du titre me faisaient très envie, et même si l'histoire ou les personnages peinent à me captiver, les décors sont tellement merveilleux que l'éblouissement visuel est au rendez-vous: entre les tons pastels des chambres et le rose léger des boîtes à pâtisseries, chaque image ressemble à un gâteau qui met l'eau à la bouche. Dès lors, plein de citations sont à prévoir dans les catégories techniques, surtout pour les décors et la musique d'Alexandre Desplat, mais peut-être également pour les costumes, le maquillage, le montage et la photographie; tandis que le film reste un candidat de choix dans les catégories prestigieuses, au moins pour la mise en scène de Wes Anderson, parce que j'aime cette atmosphère d'Europe centrale, et pour l'interprétation de Ralph Fiennes, que j'ai très légèrement moins aimée la seconde fois malgré une réussite comique inégalable.
Distinctions possibles: Wes Anderson, Ralph Fiennes, photographie, décors, costumes, maquillage, musique.


The Homesman: écrit, interprété et réalisé par Tommy Lee Jones, produit par Luc Besson, Peter Brant et Brian Kennedy, avec Hilary Swank. Coécrit par Kieran Fitzgerald  et Wesley Oliver d'après un roman de Glendon Swarthout.
Remarques: Un western qui se tire une balle dans le pied à mi-parcours, en faisant disparaître l'un des deux protagonistes comme si de rien n'était, si bien qu'on a l'impression d'avoir deux films différents avant et après ce revirement inattendu. Mais la photographie reste bien travaillée, tandis qu'Hilary Swank donne probablement la meilleure performance de sa carrière, puisqu'elle parvient tout à fait à nous faire croire qu'elle est une future vieille fille pas attirante. Par contre, que vient faire Meryl Streep dans un caméo qui n'apporte rien à l'histoire? Le point fort: la musique de Marco Beltrami, qui présente peu de variations mais renforce parfaitement l'état d'esprit tragique des personnages.
Distinctions possibles: Hilary Swank, musique.


The Hundred-Foot Journey: réalisé par Lasse Hallström, produit par Juliet Blake, Steven Spielberg et Oprah Winfrey, avec Helen Mirren et Manish Dayal. Scénario de Steven Knight d'après un livre de Richard Morais.
Remarques: Argh. Je n'avais plus que deux jours pour convertir mes points de fidélité UGC, j'accompagnais un proche à un congrès, j'ai pris le premier truc venu en me disant: "tiens, Helen Mirren dans le Quercy, ça peut être sympa", et... je me suis fait avoir en beauté. Après coup, j'ai regardé les autres "œuvres" du réalisateur, tout ça pour réaliser que le type était l'auteur du nullissime Chocolat et de l'apocalyptique vidéographie d'ABBA. Bref, ça m'apprendra à aller voir un film juste pour l'actrice sur l'affiche, et ça me convainc surtout qu'Helen Mirren est une grosse arnaque depuis bientôt dix ans: adieu la composition, Helen Mirren se pointe dans un film pour manger une omelette et... c'est tout.
Distinctions possibles: /


Into the Woods: produit et réalisé par Rob Marshall, coproduit par John DeLuca, Marc Platt et Callum McDougall, avec Emily Blunt, Meryl Streep et compagnie. Scénario de James Lapine d'après sa comédie musicale de 1986.
Remarques: Un discours de départ plutôt alléchant, mais l'enchevêtrement des contes de fées choisis n'est hélas pas des plus heureux, avec certains personnages totalement sacrifiés qui n'ont même pas le mérite de servir de prétextes (Raiponce et son prince par exemple), tandis que ceux dont on se soucie le plus disparaissent au fur et à mesure sans laisser de traces, précisément au moment où l'on attend un dénouement à leur sujet, si bien que ne reste à la fin qu'une poignée de personnes totalement quelconques qui intéressent peu. Quoi qu'il en soit, Emily Blunt et Meryl Streep dominent la distribution mais leur intérêt décroît dangereusement au second essai, idem pour James Corden et Lilla Crawford qui restent corrects mais sans plus, tandis qu'Anna Kendrick a beau savoir très bien chanter, elle n'en reste pas moins absolument lisse et impersonnelle. Chris Pine me laisse quant à lui indifférent, et Johnny Depp est à nouveau une gigantesque catastrophe. Si le film se découvrait avec un plaisir relatif grâce à ses décors et aux deux airs attendus qui passent malgré tout très bien sur grand écran, Agony et Stay with Me, ça ne soutient hélas pas un second visionnage. C'est creux et décevant, sans rien de réellement fameux à célébrer.
Distinctions possibles: /


Magic in the Moonlight: écrit et réalisé par Woody Allen, produit par Letty Aronson, Edward Walson et Stephen Tenenbaum, avec Emma Stone et Colin Firth.
Remarques: Comme toujours depuis bientôt vingt ans, un nouveau Woody Allen, un nouveau fiasco. D'ailleurs, je n'avais même pas prévu d'aller le voir, mais pour ne pas faire le rabat-joie en soirée, j'ai finalement cédé. Evidemment, ça ne raconte rien, on devine le dénouement au bout de cinq minutes, Colin Firth télégraphie son texte sans lui donner de consistance particulière, Emma Stone en transe est ridicule, Marcia Gay Harden et Jacki Weaver frôlent la bêtise dans de minuscules caméos, et le seul point positif dans tout ça, c'est l'ambiance "Riviera des années 1920", somme toute agréable avec ces jolies villas en bord de mer.
Distinctions possibles: /


Maleficent: réalisé par Robert Stromberg, produit par Joe Roth, avec Angelina Jolie et Elle Fanning. Scénario adapté par Linda Woolverton, d'après Disney et Charles Perrault.
Remarques: Bon, je l'avoue, j'ai bien aimé Angelina Jolie dedans, malgré ses cent cinquante mille regards en coin pour bien signifier que "oulala, je suis censée te faire peur, mais au fond je suis gentille, attention!" Autrement, le film est d'une laideur sans nom, les effets spéciaux rendent les images translucides, les gnomes sortent de n'importe où parce que plus personne à Hollywood ne semble capable de faire un film fantastique sans caser des trolls tous les cinq mètres, les fées sont totalement crétines, Elle Fanning est insipide à pleurer, et le scénario, relativement séduisant dans sa lutte contre le patriarcat, manque cruellement de subtilité, sans compter que la bataille finale avec les pantalons en latex est un sommet de ridicule embarrassant. Bref, Angelina Jolie rend le tout à peu près regardable, mais autrement...
Distinctions possibles: Angelina Jolie.


A Most Violent Year: écrit, produit et réalisé par J.C. Chandor, coproduit par Anna Gerb et Neal Dodson, avec Oscar Isaac et Jessica Chastain.
Remarques: C'est un bon film, mais ce n'est pas franchement ma tasse de thé, de telle sorte que je n'ai pas grand chose à dire: l'histoire me parle peu, Oscar Isaac et Jessica Chastain sont corrects mais je ne décèle aucun génie particulier dans leurs performances, et la photographie était de mémoire réussie. Je suis vraiment navré, ça mériterait davantage de louanges, mais ce n'est pas un film pour moi, je ne sais qu'ajouter...
Distinctions possibles: à revoir.


Nightcrawler: écrit et réalisé par Dan Gilroy, produit par plein de monde, avec Jake Gyllenhaal et Rene Russo.
Remarques: Absolument pas mon style, mais c'est captivant. Une surprise très agréable qui tient constamment en haleine (jusqu'où ira le protagoniste?) et parodie excellemment le problème des chaînes d'info en continu. Jake Gyllenhaal livre un très bon exercice de composition, sans jamais rien appuyer hormis dans l'épisode du miroir, et il réussit parfaitement l'exploit de nous intéresser à un sociopathe n'ayant aucun problème avec son travail. Rene Russo est également très intéressante en femme sûre d'elle dont les fêlures sont très vite démasquées, et l'on regrettera seulement que dès qu'il s'agit de s'énerver dans l'école d'interprétation actuelle aux Etats-Unis, tout le monde se sente obligé de ponctuer ses phrases par des "goddam" et "fucking", ce qui colle toutefois bien au monde assez vulgaire de ces personnages. Mais vraiment, l'ensemble est contre toute attente passionnant.
Distinctions possibles: Jake Gyllenhaal, Rene Russo, scénario.


Selma: réalisé par Ava DuVernay, produit par Christian Colson, Dede Gardner, Jeremy Kleiner et Oprah Winfrey, avec David Oyelowo. Scénario original de Paul Webb.
Remarques: Désolé, mais je ne pense jamais retenter l'expérience, et je n'avais pas du tout aimé à l'époque. J'avais trouvé ça bâclé et bourré de clichés, et j'ai toujours pensé que le film aurait gagné à être peaufiné plutôt que de sortir en catastrophe dans le but de récolter des Oscars. Et vraiment, le montage lors des scènes de violence m'avait semblé très confus, tandis que les multiples ralentis sur les visages m'avait paru bien lourds, comme si la réalisatrice tentait de se chercher un style. A sa décharge, j'étais de mauvaise humeur ce soir-là, alors comment évaluer la part de mauvaise foi dont j'étais prêt à user à ce moment?
Distinctions possibles: /


Still Alice: écrit et réalisé par Richard Glatzer et Wash Westmoreland , produit par James Brown, Pamela Koffler et Lex Lutzus, avec Julianne Moore, Alec Baldwin et Kristen Stewart.
Remarques: Un film sur une déchéance physique qui peine à captiver, qui n'a nullement la force cinématographique d'un Amour ou la grâce d'un Away from Her, et dont le scénario écarte en partie la problématique la plus importante, en créant un personnage de mari pas franchement concerné. Julianne Moore est très bien au début lorsqu'elle lutte tout en étant encore lucide, mais après coup, ça devient une performance ultra technique peu inspirante, malgré un tout dernier plan frappant de justesse. Mais vraiment, Julie Christie en disait nettement plus avec moins de temps d'écran en 2007.
Distinctions possibles: /


The Two Faces of January: écrit et réalisé par Hossein Amini, produit par Tim Bevan, Eric Fellner, Robyn Slovo et Tom Sternberg, avec Viggo Mortensen, Kirsten Dunst et Oscar Isaac.
Remarques: Et bam! Encore un film où l'un des protagonistes disparaît sans laisser de traces à mi-parcours. Mais franchement, comment voulez-vous qu'on se passionne pour une histoire où dès que les personnages commencent à prendre de l'épaisseur, il faille passer à autre chose sans autre forme de procès? En outre, il y avait déjà assez de tensions dans la première partie pour développer un second acte très correct, sans avoir besoin de se priver d'un des membres du trio. La photographie donne en tout cas envie de voyager, et les costumes rétro sont distingués.
Distinctions possibles: costumes.


Wild: réalisé par Jean-Marc Vallée, produit par Bruna Papandrea et Bill Pohlad, coproduit et interprété par Reese Witherspoon. Avec Laura Dern. Scénario de Nick Hornby d'après Wild: From Lost to Found on the Pacific Crest Trail de Cheryl Strayed.
Remarques: Pour clore cet inventaire, encore un film que je ne regrette pas d'avoir vu, mais vers lequel j'ai peu de chances de revenir. Le point fort: Reese Witherspoon dans sa performance la plus réussie, où elle met bien en lumière les conflits qui se bousculent dans la tête du personnage. Comme je la trouve généralement sympathique et que je n'ai jamais de place pour elle dans ma liste, j'ai envie de mettre cette année à profit pour la nommer au moins une fois. Par contre, clairement déçu pour Laura Dern, pas à cause de son interprétation, à laquelle je n'ai rien à reprocher, mais à cause de son temps d'écran réduit au strict minimum. Dommage, car après sa nomination aux Oscars, j'avais imaginé que le rôle était plus conséquent.
Distinctions possibles: Reese Witherspoon.


France

Astérix: Le Domaine des dieux: écrit et réalisé par Louis Clichy et Alexandre Astier, produit par Philippe Bony et Thomas Valentin, avec la voix de Roger Carel. D'après René Goscinny et Albert Uderzo.
Remarques: Hum. Ça commence mal pour le cinéma français. Je n'ai tenu que vingt minutes: le rythme s'étend en longueur, les voix ne collent pas du tout aux personnages et je n'ai jamais beaucoup aimé l'univers d'Astérix en outre, encore moins l'album de départ qui nous occupe.
Distinctions possibles: /


Bande de filles: écrit et réalisé par Céline Sciamma, produit par Bénédicte Couvreur, avec Karidja Touré et Assa Sylla.
Remarques: L'intention de Céline Sciamma est toujours louable, en l'occurrence donner la parole à ceux qu'on ne voit jamais au cinéma, mais son approche à la limite du documentaire m'empêche systématiquement de rentrer dans ses films. Ici, j'ai l'impression d'être allé me promener une heure en banlieue, mais lorsque je vais au cinéma, j'ai besoin de m'évader, sans quoi je suis incapable d'apprécier une œuvre, quoique Deux jours, une nuit reste une divine exception. Néanmoins, le film a beau ne pas me toucher, ça reste très intéressant à décortiquer, ne serait-ce que pour donner enfin la parole à celles que l'on ne voit jamais au cinéma. Assa Sylla est quant à elle très prometteuse, tandis que la séquence "Diamonds" reste à juste titre un grand moment de mise en scène.
Distinctions possibles: Céline Sciamma.


Clouds of Sils Maria: écrit et réalisé par Olivier Assayas, produit par Charles Gillibert, avec Juliette Binoche et Kristen Stewart.
Remarques: Je suis très partagé sur celui-là. D'un côté, c'est captivant, de l'autre, j'ai constamment l'impression que le réalisateur ne sait pas trop où il veut en venir, à grand renfort d'effets se partageant entre usage abondant de musique baroque, de regards intenses et de nuages mystérieux. Mais à la fin, où arrive-t-on? Le sujet, honnêtement vu et revu, s'essouffle dès la première partie, et le twist final n'apporte rien à l'affaire. Autrement, Juliette Binoche est comme souvent au minimum intéressante, et Kristen Stewart signe un retour en grâce plutôt prometteur. Finalement, je ne suis pas mécontent d'avoir découvert ce film, mais je ne suis pas assez convaincu par une histoire beaucoup trop floue pour croire que l'ensemble soit réellement maîtrisé.
Distinctions possibles: /


Les Combattants: écrit et réalisé par Thomas Cailley, produit par Pierre Guyard, avec Adèle Haenel. Coécrit par Claude Le Pape.
Remarques: L'archétype du film français naturaliste jusqu'à l'extrême dans lequel je suis incapable de rentrer, même en faisant tous les efforts du monde. Dommage, car je soutiens Adèle Haenel depuis Naissance des pieuvres, et je suis sincèrement content qu'elle ait percé.
Distinctions possibles: /


Israël

L'Institutrice (הגננת) (Haganenet): écrit et réalisé par Nadav Lapid, avec Sarit Larry.
Remarques: Ç'avait l'air alléchant sur le papier, mais le résultat est franchement inconsistant, voire un peu glauque dans la mesure où l'on n'arrive jamais à se prendre de sympathique pour cette institutrice par trop déterminée. Je n'ai découvert ce film que récemment, mais il m'est difficile d'expliciter plus avant mon ressenti.
Distinctions possibles: /


Le Procès de Viviane Amsalem (גט - המשפט של ויויאן אמסלם) (Gett): écrit et réalisé par Ronit et Shlomi Elkabetz, interprété par Ronit Elkabetz et Simon Abkarian.
Remarques: Un peu déçu par ce film dont j'attendais beaucoup. Ça reste tout de même de qualité, en particulier grâce à un scénario brossant des portraits complexes sur fond d'extrémisme religieux, le tout à huis clos. Les deux acteurs sont également bons, quoiqu'un peu trop sur la même note à mon goût.
Distinctions possibles: scénario.


Mauritanie

Timbuktu: écrit et réalisé par Abderrahmane Sissako, produit par Etienne Comar et Sylvie Pialat, avec Abel Jafri. Coécrit par Kessen Tall.
Remarques: L'aspect documentaire est peut-être un peu trop prononcé pour me séduire, mais c'est très intéressant dans le détail, le film faisant bien sentir le poids des extrémismes sur une société paisible qui n'avait rien demandé. Les images des enfants jouant avec un ballon imaginaire sont attendues mais fonctionnent très bien en ce contexte, et l'on craint vraiment pour les personnages, notamment la dame aux vêtements multicolores que rien ne semble pouvoir affecter. Bref, j'aimerais nommer le film quelque part, mais je ne sais pas encore où.
Distinctions possibles: Abderrahmane Sissako.


Royaume-Uni

A Little Chaos: écrit, interprété et réalisé par Alan Rickman, coécrit par Jeremy Brock et Alison Deegan, avec Kate Winslet et Matthias Schoenaerts.
Remarques: Encore une douloureuse déception, celle-ci étant d'autant plus cruelle que ce chaos me faisait très envie sur le papier, entre jardins à la française, héroïne dépressive et cour flamboyante du Roi-Soleil. Hélas, le scénario ne conduit nulle part, s'égarant entre romance convenue, leçon d'histoire prémâchée avec les grands personnages du royaume défilant à la suite sans rien apporter à la trame principale, anachronismes pesants (le lever du roi filmé comme une pub Ricoré!) et soap opera de la pire espèce, avec rivale jalouse qui ouvre les vannes au sens propre comme au figuré. Peine supplémentaire, Kate Winslet n'a pas le centième du mordant qui fit sa renommée vingt ans plus tôt, et, affront suprême, Alan Rickman nous prive du plaisir de voir la brillante Jennifer Ehle en Montespan, en la reléguant à un glorieux caméo totalement improbable. Par bonheur, le film reste agréable à observer, mais surtout à écouter, la superbe partition de Peter Gregson me donnant de furieuses envies érotiques dans une orangerie printanière sous un ciel gris.
Distinctions possibles: musique.


Mr. Turner: écrit et réalisé par Mike Leigh, produit par Georgina Lowe, avec Timothy Spall, Dorothy Atkinson et Marion Bailey.
Remarques: J'ai apprécié les premières minutes grâce à l'éblouissement visuel et auditif créé par une superbe photographie qui pour le coup sert absolument le propos, de ravissants costumes et décors et une musique très agréable. Mais après ça, et quelle déception! Une fois l'effet de découverte passée, on se rend compte que ça ne raconte pas grand chose, et l'on s'ennuie ferme. En outre, c'est vraiment trop long. Timothy Spall et Marion Bailey ont pour leur part de bons échanges et mériteraient considération.
Distinctions possibles: photographie, décors, costumes.


Pride: réalisé par Matthew Warchus, produit par David Livingstone, avec Ben Schnetzer, Bill Nighy et Imelda Staunton. Scénario original de Stephen Beresford.
Remarques: Pour le moment, mon film préféré de l'année, cette rencontre improbable entre un syndicat de mineurs et une association LGBT étant l'une des choses les plus divertissantes que j'ai vues ces derniers temps. C'est à la fois drôle et touchant, l'histoire prend également bien soin de ne se focaliser sur personne afin de couvrir le plus de problématiques possibles à travers ces parcours très différents, et l'on comprend vraiment l'importance de faire entendre sa voix dans un système défavorable. En tout cas, je nommerais volontiers cette très agréable découverte comme meilleur film et comme meilleur scénario, mais je regrette que ce ne soit pas vraiment un film d'acteurs, bien qu'Imelda Staunton soit très cool, que Ben Schnetzer, Jessica Gunning et Faye Marsay soient des révélations prometteuses qu'il serait de bon ton de retrouver par la suite, et que Bill Nighy bénéficie de la plus jolie scène du film. Bref, le seul défaut dans tout ça, c'est que la bande-son m'a mis en tête cette horrible chanson disco qu'on entend à mi-parcours, ce qui est fort peu pratique pour s'endormir alors que ce refrain entêtant vous bourdonne dans le crâne...
Distinctions possibles: film, scénario.


The Theory of Everything: réalisé par James Marsh, produit par Eric Fellner, Tim Bevan et Lisa Bruce, avec Eddie Redmayne et Felicity Jones. Ecrit et coproduit par Anthony McCarten, d'après Travelling to Infinity: My Life with Stephen de Jane Hawking.
Remarques: D'accord, c'est moins pire que je ne l'imaginais et ça reste beau et soigné, avec plein de jolies images qui donnent envie d'en voir plus. Certes. Malheureusement, l'histoire n'a aucun intérêt: on raconte la vie de Stephen Hawking de A à V sans jamais prévenir quand on change d'époque (on est censé le deviner avec les nouveaux appareils, mais les personnages ne vieillissent pas), et finalement, c'est davantage un film sur le handicap qu'un film sur un esprit scientifique brillant. En effet, la science est à peine effleurée, sauf pour dire que la relativité est une patate et la physique quantique un petit pois (merci bien), de telle sorte qu'on tombe bel et bien dans le film ultra démonstratif et touchant calibré pour les Oscars. Ça ne veut pas dire que c'est mauvais, et ça se suit réellement sans déplaisir (les scènes avec Maxine Peake), mais à la fin ça n'est ni ambitieux, ni très intéressant. Eddie Redmayne se repose exclusivement sur le mimétisme mais a au moins le mérite d'ajouter un brin de malice dans ses regards, et c'est de toute façon le parcours de son épouse qui intéresse (vivra-t-elle enfin sa vie?), bien qu'on tombe dans l'un des thèmes les plus éculés de l'interprétation féminine destinée à finir aux Oscars. Felicity Jones n'est donc pas mal en soi, mais ça reste un rôle à clichés qui ne sort pas assez de l'ordinaire pour mériter distinction. Autrement, il est effrayant de réaliser qu'en une quinzaine d'années, Emily Watson est passée d'actrice de premier plan à figurante avec à peine plus de deux répliques par film...
Distinctions possibles: /


C'est tout pour le moment. Mais vraiment, 2014 m'inspire très peu. J'espère que les films majeurs de 2015 relèveront le niveau, quand on y aura enfin accès dans cinquante ans (sérieusement, pourquoi n'y a-t-il qu'en France qu'il faille attendre aussi longtemps pour voir les films américains? Brooklyn n'a toujours pas de date prévue ici à ce jour)... J'attends avec impatience Carol, Brooklyn et 45 Years en priorité, et j'aimerais également voir The Dressmaker, qui semble mal parti pour être distribué en Europe... Je me demande seulement si mon désamour pour le cinéma contemporain vient de moi ou s'il y a une vraie baisse de qualité. Mais il est vrai que j'ai de plus en plus de mal à me laisser emporter par un film de nos jours. Peut-être que j'aime trop les années 1930 et que la modernité m'intéresse moins.

Bonne soirée!