Bonsoir,
J'ai fini de faire mes choix pour les Orfeoscar 1930, et ceux qui ont accès à mon profil Imdb ont pu les découvrir en exclusivité, mais il me reste à présent à les justifier, et dieu sait si l'article me prend du temps à écrire. Alors en attendant, voici quelques réflexions sur les films qui m'ont le plus marqué récemment.
D'abord réalisé par George Hill, puis presque intégralement retourné par Clarence Brown à la demande du studio, The Cossacks vient de s'ajouter à la liste déjà très longue de chefs-d’œuvre de 1928, certainement la meilleure année de cinéma pour moi, avec La Passion de Jeanne d'Arc, The Wind, The Crowd, The Last Command, The Wedding March, A Woman of Affairs, The Mysterious Lady, The Man Who Laughs, The Patsy, The Docks of New York, Street Angel, Our Dancing Daughters et Sadie Thompson. En effet, le film est très excitant, regorgeant de somptueux costumes, de beaux décors turcs, de cascades impressionnantes lors des cavalcades et d'effets spéciaux fort crédibles, et l'histoire se suit avec grand intérêt entre comédie maritale et guerre dans la steppe, au point qu'on ne fera qu'un unique reproche à cet ensemble divertissant à souhait, à savoir sa tonalité clairement antiféministe, quoique Renée Adorée ait assez de répondant pour faire passer la pilule. Malgré tout, le plus bel atout du film reste la performance d'Ernest Torrence en patriarche bourru, un morceau de bravoure si comique qu'il est d'ores et déjà hors de question d'envisager ne serait-ce qu'un embryon de concurrence pour mon Orfeoscar du meilleur second rôle masculin 1928. 8/10.
Possiblement le film qui a le mieux vieilli sur l'ensemble des 70's, et dont le message résonne encore avec clarté aujourd'hui. En effet, l'histoire est absolument captivante, en étant judicieusement centrée sur un monde de parents bien rangés qui n'osent s'avouer leur furieuse envie de retrouver l'intrépidité de leur vingt ans tandis que leurs enfants s'évaporent dans la nature. Chaque séquence vaut ainsi son pesant d'or, à commencer par une première partie sur l'inquiétude des parents mêlée à l'histoire d'une jeune fille déterminée à passer une audition, avant de voir les adultes parfois prêts à céder à la tentation lors des recherches et des réunions de groupe, le tout pour déboucher sur la séquence la plus drôle de l'univers lors de la (re)découverte de certaines substances illicites.
Pour lier tout ça, le montage est absolument éblouissant, accentuant souvent le comique d'une situation, comme Lynn Carlin se retournant, à moitié ivre, souriant à son mari sans avoir vu la scène ridicule à laquelle celui-ci vient d'assister dans leur chambre d'hôtel; et le film est également porté par une bande-son à tomber par terre, entre la jolie ballade hippie de la future Kathy Bates sur la fin de l'enfance, et le rock enflammé de Tina Turner qui vient faire là un plaisant caméo, à l'époque où elle était encore bien coiffée. Quant aux performances, rien ne sert de mentir, chacune est sensationnelle, notamment du côté de Buck Henry, Audra Lindley et Paul Benedict, sans qu'aucun ne parvienne cependant à égaler la prodigieuse Lynn Carlin, dont l'interprétation est si énorme que le film vaudrait le coup d’œil rien que pour elle. Mention spéciale, également, à la grosse dame en jaune lors de la séquence la plus mémorable. 9/10.
Cloris Leachman, Teri Garr, Madeline Kahn, et des messieurs célèbres que je ne connaissais que de nom, sont dans un château. Que se passe-t-il? Pas grand chose, malheureusement. En effet, le film m'a perdu au bout de vingt minutes à cause d'un énorme problème de rythme, puisque le scénario n'est en fait qu'une succession de blagues douteuses devant lesquelles on tente de se forcer à sourire au début, pour se mettre dans l'ambiance, avant de réaliser que ça n'en vaut même pas la peine. Sans mentir, les chevaux qui hennissent à la moindre mention de Frau Blücher? Cloris Leachman qui s'excite sur son violon? Teri Garr qui propose à Gene Wilder de se rouler avec elle dans le foin sans qu'ils aient été encore présentés? Peter Boyle aussi captivant qu'une armoire suédoise? Madeline Kahn en diva capricieuse obsédée par son maquillage? Tout ça aurait pu être drôle mais chaque blague tombe constamment à plat, et aucun des acteurs n'est jamais parvenu à m'arracher le moindre rire. Dommage, car les décors et la photographie en noir et blanc sont pour leur part alléchants, et donnent une idée de ce que cette parodie aurait pu être. 4/10.
Un film qui a assez mauvaise réputation, certains lui reprochant une certaine artificialité et un rythme trop lent, mais que j'ai pour ma part plutôt bien aimé. C'est en effet très bien filmé, à grand renfort de décors, de costumes et d'images de qualité, et l'histoire, loin de m'avoir ennuyé, m'a au contraire donné une constante envie de suivre l'évolution d'une héroïne coincée dans une vie modèle insipide, et prête à tout abandonner pour trouver l'exaltation qui lui fait cruellement défaut chez elle. La première partie, centrée sur la montée du désir envers le prisonnier, reste captivante et bien détaillée, tandis que la seconde, plus aventureuse, comporte assez de rebondissements pour divertir à chaque instant. Après, ça n'est pas un chef-d’œuvre pour autant, mais ça reste un film aimable qui ne sera pas une perte de temps s'il vous prend l'envie de vous y adonner. Atout suprême: Diane Keaton, excellente dans le rôle dramatique où je la préfère, rôle où elle sait comment s'effacer derrière une héroïne d'abord terne mais jamais dénuée de charisme, puis illuminée par de petites touches d'émotion et d'autorité qui la nuancent à merveille. Voilà en tout cas une bonne alternative aux fermières des grandes plaines qui ont curieusement dominé la catégorie des meilleures actrices aux Oscar 1984. 6/10.
Le film argentin le plus célèbre à travers le monde est à la hauteur de sa réputation. Les deux aspects de l'histoire, à la fois une critique politique, d'ailleurs tournée en grand secret avant la chute de la dictature, et un drame intimiste touchant de plein fouet une famille de notables a priori très convenables; sont sans surprise traités avec un soin et une précision toujours parfaits, ne faisant pas l'économie de moments lumineux malgré une tonalité sombre, et les performances d'acteurs sont également précises et mémorables à souhait, en particulier celles d'Héctor Alterio et Chunchuna Villafañe. Malgré tout, c'est bel et bien la légendaire Norma Aleandro qui trône au sommet de l'édifice, grâce à une interprétation qui couvre à peu près tous les registres possibles et imaginables avec toujours beaucoup de charisme et de nuance, au point de s'imposer comme l'une des trois meilleures performances qu'il m'a été donné de voir sur l'ensemble des années 1980. Jusqu'alors, j'ai toujours eu quelque hésitation quant à mon prix de la meilleure actrice 1985: je n'en ai plus. Le film a par ailleurs très bien vieilli. 8/10.
J'avais beaucoup oublié ce film depuis le premier visionnage, et après redécouverte, je n'en reviens pas de réaliser à quel point ça reste incroyablement frais et fascinant, sans jamais accuser ses vingt ans. Sans mentir, ça pourrait sortir aujourd'hui que les personnages seraient toujours aussi justes et adaptés à notre époque, et les réflexions seraient toujours d'actualité. Il est également fort plaisant de se remémorer le brillant des répliques et du scénario, auquel ont beaucoup contribué les deux interprètes bien qu'ils ne soient pas mentionnés dans les crédits, si bien que ce parcours, tout de dialogues subtils et de jolies images de la capitale autrichienne, captive à chaque recoin et n'ennuie pas une seule seconde malgré le caractère somme toute banal de ces personnages. Ethan Hawke et Julie Delpy sont pour leur part toujours aussi bons que dans mon souvenir, mais leurs performances ne sont néanmoins pas l'atout principal d'un film essentiellement très bien écrit. J'avais mis 8/10 la première fois, et je maintiens totalement cette note.
Allons, un film qui reste à ce jour le plus cher de l'histoire de son pays, élu par les Néerlandais comme le plus grand film batave de tous les temps, ayant fait grand bruit à l'époque de sa sortie en salles entre 2006 et 2007, ayant manqué de peu la nomination à l'Oscar du meilleur film étranger, et contenant une performance d'actrice que plusieurs cinéphiles que je lis mentionnent comme absolument digne d'une nomination, ça doit être un bon film, non? Eh bien non, précisément. C'est même une œuvre atrocement manipulatrice puisque sous ses airs de film hautement divertissant (en toute honnêteté, je ne me suis pas ennuyé une seule seconde), ce n'est rien d'autre qu'un ramassis d'âneries en tous genres qu'on pourrait classer en trois catégories.
La première tient à un scénario totalement improbable, qui trop obnubilé par l'idée d'avoir un rebondissement inattendu à chaque séquence en oublie la cohérence du récit et la fidélité à la psychologie de l'héroïne. Ainsi, Rachel voit son unique cachette bombardée? Bof, pas bien grave, j'en avais marre de rester là, de toute façon. Elle voit sa famille se faire fusiller sous ses yeux (ce n'est pas un spoiler, ça intervient dès le début)? Moui, on passe directement à la scène suivante et l'on dirait qu'elle s'en fiche. La voilà empoisonnée à l'insuline? Oh, ce n'est rien, sautons vite du balcon en sachant qu'on sera portée par la foule comme une rock star, au nez et à la barbe du grand méchant. Sa collègue, accoquinée avec les nazis, la soupçonne de quelque chose? Bah oui, je suis une espionne, je pensais que tu le savais (non, ce n'est pas ironique!). Bref, pas la peine de pointer toutes les incohérences sans quoi nous en avons pour la semaine, mais c'est à peu près le même refrain tous les quarts d'heure, ce qui reste assez effarant quand on sait que les scénaristes ont mis plus d'une vingtaine d'année pour pondre une telle histoire!
La seconde, c'est la beauferie crasse consistant à montrer des femmes à poil dès que possible, entre la secrétaire qui se fait prendre par une bonne dizaine de soldats dans les couloirs de l'hôtel au vu et au su de tous, et l'héroïne qui va jusqu'à se teindre le sous-bois en blond vénitien pour se donner l'air germanique, sans même penser à colorer les racines apparentes de ses cheveux... Voyant cela, j'ai regardé le nom du réalisateur pour voir à quel genre de films le type était habitué, tout ça pour découvrir qu'il s'agit en fait de l'illustre metteur en scène de Basic Instinct. Tout s'est alors illuminé d'une lueur nouvelle: à défaut d'avoir Sharon Stone sans culotte, offrons des scènes de nudité gratuites et vulgaires à une pauvre Hollandaise qui attend de percer...
La troisième, et de loin la plus dangereuse, est un ensemble de libertés prises avec l'Histoire, chose qui n'aurait pas été un problème si le scénario avait été bien ficelé, mais qui reste accablante d'indécence dans sa représentation du peuple hollandais pendant la guerre. Le summum, c'est l'attroupement qui se forme pour accueillir en héros l'un des résistants lors des célébrations de la fin de la guerre, avec tous ces gens représentés comme des moutons campant sous les fenêtres de leur idole comme des minettes à un concert de Justin Bieber, et incapables de réagir autrement que de taper dans les mains à chaque mouvement du type qu'ils acclament. Il est vrai qu'après un tel conflit, les gens n'avaient pas d'autres sujets de préoccupation...
Et Carice van Houten dans tout ça? Eh bien la pauvre fait tout ce qu'elle peut pour émerger de la flaque de vomi dans laquelle elle est littéralement plongée pendant trois heures, et il faut reconnaître qu'elle porte le film par son énergie et son aisance à manier plusieurs langues comme si de rien n'était, mais elle est loin de parvenir à sauver son héroïne de ce naufrage scénaristique puisqu'elle ne pense tout simplement pas à suggérer la douleur et le regret d'avoir perdu sa famille, ce qui, malgré l'absence de scène prévue à cet effet, aurait pu être rattrapé lors du premier dialogue suivant cette tragédie. Bref, on fera un geste pour une actrice somme toute dynamique mais le film ne vaut guère plus de 3/10, tout divertissant soit-il. Mes connaissances en cinéma hollandais sont actuellement très limitées, mais j'ose espérer que ce n'est pas réellement le plus grand film de ce pays-là.
J'ai fini de faire mes choix pour les Orfeoscar 1930, et ceux qui ont accès à mon profil Imdb ont pu les découvrir en exclusivité, mais il me reste à présent à les justifier, et dieu sait si l'article me prend du temps à écrire. Alors en attendant, voici quelques réflexions sur les films qui m'ont le plus marqué récemment.
The Cossacks, de Clarence Brown et George Hill (1928)
D'abord réalisé par George Hill, puis presque intégralement retourné par Clarence Brown à la demande du studio, The Cossacks vient de s'ajouter à la liste déjà très longue de chefs-d’œuvre de 1928, certainement la meilleure année de cinéma pour moi, avec La Passion de Jeanne d'Arc, The Wind, The Crowd, The Last Command, The Wedding March, A Woman of Affairs, The Mysterious Lady, The Man Who Laughs, The Patsy, The Docks of New York, Street Angel, Our Dancing Daughters et Sadie Thompson. En effet, le film est très excitant, regorgeant de somptueux costumes, de beaux décors turcs, de cascades impressionnantes lors des cavalcades et d'effets spéciaux fort crédibles, et l'histoire se suit avec grand intérêt entre comédie maritale et guerre dans la steppe, au point qu'on ne fera qu'un unique reproche à cet ensemble divertissant à souhait, à savoir sa tonalité clairement antiféministe, quoique Renée Adorée ait assez de répondant pour faire passer la pilule. Malgré tout, le plus bel atout du film reste la performance d'Ernest Torrence en patriarche bourru, un morceau de bravoure si comique qu'il est d'ores et déjà hors de question d'envisager ne serait-ce qu'un embryon de concurrence pour mon Orfeoscar du meilleur second rôle masculin 1928. 8/10.
Taking Off, de Milos Forman (1971)
Possiblement le film qui a le mieux vieilli sur l'ensemble des 70's, et dont le message résonne encore avec clarté aujourd'hui. En effet, l'histoire est absolument captivante, en étant judicieusement centrée sur un monde de parents bien rangés qui n'osent s'avouer leur furieuse envie de retrouver l'intrépidité de leur vingt ans tandis que leurs enfants s'évaporent dans la nature. Chaque séquence vaut ainsi son pesant d'or, à commencer par une première partie sur l'inquiétude des parents mêlée à l'histoire d'une jeune fille déterminée à passer une audition, avant de voir les adultes parfois prêts à céder à la tentation lors des recherches et des réunions de groupe, le tout pour déboucher sur la séquence la plus drôle de l'univers lors de la (re)découverte de certaines substances illicites.
Pour lier tout ça, le montage est absolument éblouissant, accentuant souvent le comique d'une situation, comme Lynn Carlin se retournant, à moitié ivre, souriant à son mari sans avoir vu la scène ridicule à laquelle celui-ci vient d'assister dans leur chambre d'hôtel; et le film est également porté par une bande-son à tomber par terre, entre la jolie ballade hippie de la future Kathy Bates sur la fin de l'enfance, et le rock enflammé de Tina Turner qui vient faire là un plaisant caméo, à l'époque où elle était encore bien coiffée. Quant aux performances, rien ne sert de mentir, chacune est sensationnelle, notamment du côté de Buck Henry, Audra Lindley et Paul Benedict, sans qu'aucun ne parvienne cependant à égaler la prodigieuse Lynn Carlin, dont l'interprétation est si énorme que le film vaudrait le coup d’œil rien que pour elle. Mention spéciale, également, à la grosse dame en jaune lors de la séquence la plus mémorable. 9/10.
Young Frankenstein, de Mel Brooks (1974)
Cloris Leachman, Teri Garr, Madeline Kahn, et des messieurs célèbres que je ne connaissais que de nom, sont dans un château. Que se passe-t-il? Pas grand chose, malheureusement. En effet, le film m'a perdu au bout de vingt minutes à cause d'un énorme problème de rythme, puisque le scénario n'est en fait qu'une succession de blagues douteuses devant lesquelles on tente de se forcer à sourire au début, pour se mettre dans l'ambiance, avant de réaliser que ça n'en vaut même pas la peine. Sans mentir, les chevaux qui hennissent à la moindre mention de Frau Blücher? Cloris Leachman qui s'excite sur son violon? Teri Garr qui propose à Gene Wilder de se rouler avec elle dans le foin sans qu'ils aient été encore présentés? Peter Boyle aussi captivant qu'une armoire suédoise? Madeline Kahn en diva capricieuse obsédée par son maquillage? Tout ça aurait pu être drôle mais chaque blague tombe constamment à plat, et aucun des acteurs n'est jamais parvenu à m'arracher le moindre rire. Dommage, car les décors et la photographie en noir et blanc sont pour leur part alléchants, et donnent une idée de ce que cette parodie aurait pu être. 4/10.
Mrs. Soffel, de Gillian Armstrong (1984)
Un film qui a assez mauvaise réputation, certains lui reprochant une certaine artificialité et un rythme trop lent, mais que j'ai pour ma part plutôt bien aimé. C'est en effet très bien filmé, à grand renfort de décors, de costumes et d'images de qualité, et l'histoire, loin de m'avoir ennuyé, m'a au contraire donné une constante envie de suivre l'évolution d'une héroïne coincée dans une vie modèle insipide, et prête à tout abandonner pour trouver l'exaltation qui lui fait cruellement défaut chez elle. La première partie, centrée sur la montée du désir envers le prisonnier, reste captivante et bien détaillée, tandis que la seconde, plus aventureuse, comporte assez de rebondissements pour divertir à chaque instant. Après, ça n'est pas un chef-d’œuvre pour autant, mais ça reste un film aimable qui ne sera pas une perte de temps s'il vous prend l'envie de vous y adonner. Atout suprême: Diane Keaton, excellente dans le rôle dramatique où je la préfère, rôle où elle sait comment s'effacer derrière une héroïne d'abord terne mais jamais dénuée de charisme, puis illuminée par de petites touches d'émotion et d'autorité qui la nuancent à merveille. Voilà en tout cas une bonne alternative aux fermières des grandes plaines qui ont curieusement dominé la catégorie des meilleures actrices aux Oscar 1984. 6/10.
La historia oficial, de Luis Puenzo (1985)
Le film argentin le plus célèbre à travers le monde est à la hauteur de sa réputation. Les deux aspects de l'histoire, à la fois une critique politique, d'ailleurs tournée en grand secret avant la chute de la dictature, et un drame intimiste touchant de plein fouet une famille de notables a priori très convenables; sont sans surprise traités avec un soin et une précision toujours parfaits, ne faisant pas l'économie de moments lumineux malgré une tonalité sombre, et les performances d'acteurs sont également précises et mémorables à souhait, en particulier celles d'Héctor Alterio et Chunchuna Villafañe. Malgré tout, c'est bel et bien la légendaire Norma Aleandro qui trône au sommet de l'édifice, grâce à une interprétation qui couvre à peu près tous les registres possibles et imaginables avec toujours beaucoup de charisme et de nuance, au point de s'imposer comme l'une des trois meilleures performances qu'il m'a été donné de voir sur l'ensemble des années 1980. Jusqu'alors, j'ai toujours eu quelque hésitation quant à mon prix de la meilleure actrice 1985: je n'en ai plus. Le film a par ailleurs très bien vieilli. 8/10.
Before Sunrise, de Richard Linklater (1995)
J'avais beaucoup oublié ce film depuis le premier visionnage, et après redécouverte, je n'en reviens pas de réaliser à quel point ça reste incroyablement frais et fascinant, sans jamais accuser ses vingt ans. Sans mentir, ça pourrait sortir aujourd'hui que les personnages seraient toujours aussi justes et adaptés à notre époque, et les réflexions seraient toujours d'actualité. Il est également fort plaisant de se remémorer le brillant des répliques et du scénario, auquel ont beaucoup contribué les deux interprètes bien qu'ils ne soient pas mentionnés dans les crédits, si bien que ce parcours, tout de dialogues subtils et de jolies images de la capitale autrichienne, captive à chaque recoin et n'ennuie pas une seule seconde malgré le caractère somme toute banal de ces personnages. Ethan Hawke et Julie Delpy sont pour leur part toujours aussi bons que dans mon souvenir, mais leurs performances ne sont néanmoins pas l'atout principal d'un film essentiellement très bien écrit. J'avais mis 8/10 la première fois, et je maintiens totalement cette note.
Zwartboek, de Paul Verhoeven (2006)
Allons, un film qui reste à ce jour le plus cher de l'histoire de son pays, élu par les Néerlandais comme le plus grand film batave de tous les temps, ayant fait grand bruit à l'époque de sa sortie en salles entre 2006 et 2007, ayant manqué de peu la nomination à l'Oscar du meilleur film étranger, et contenant une performance d'actrice que plusieurs cinéphiles que je lis mentionnent comme absolument digne d'une nomination, ça doit être un bon film, non? Eh bien non, précisément. C'est même une œuvre atrocement manipulatrice puisque sous ses airs de film hautement divertissant (en toute honnêteté, je ne me suis pas ennuyé une seule seconde), ce n'est rien d'autre qu'un ramassis d'âneries en tous genres qu'on pourrait classer en trois catégories.
La première tient à un scénario totalement improbable, qui trop obnubilé par l'idée d'avoir un rebondissement inattendu à chaque séquence en oublie la cohérence du récit et la fidélité à la psychologie de l'héroïne. Ainsi, Rachel voit son unique cachette bombardée? Bof, pas bien grave, j'en avais marre de rester là, de toute façon. Elle voit sa famille se faire fusiller sous ses yeux (ce n'est pas un spoiler, ça intervient dès le début)? Moui, on passe directement à la scène suivante et l'on dirait qu'elle s'en fiche. La voilà empoisonnée à l'insuline? Oh, ce n'est rien, sautons vite du balcon en sachant qu'on sera portée par la foule comme une rock star, au nez et à la barbe du grand méchant. Sa collègue, accoquinée avec les nazis, la soupçonne de quelque chose? Bah oui, je suis une espionne, je pensais que tu le savais (non, ce n'est pas ironique!). Bref, pas la peine de pointer toutes les incohérences sans quoi nous en avons pour la semaine, mais c'est à peu près le même refrain tous les quarts d'heure, ce qui reste assez effarant quand on sait que les scénaristes ont mis plus d'une vingtaine d'année pour pondre une telle histoire!
La seconde, c'est la beauferie crasse consistant à montrer des femmes à poil dès que possible, entre la secrétaire qui se fait prendre par une bonne dizaine de soldats dans les couloirs de l'hôtel au vu et au su de tous, et l'héroïne qui va jusqu'à se teindre le sous-bois en blond vénitien pour se donner l'air germanique, sans même penser à colorer les racines apparentes de ses cheveux... Voyant cela, j'ai regardé le nom du réalisateur pour voir à quel genre de films le type était habitué, tout ça pour découvrir qu'il s'agit en fait de l'illustre metteur en scène de Basic Instinct. Tout s'est alors illuminé d'une lueur nouvelle: à défaut d'avoir Sharon Stone sans culotte, offrons des scènes de nudité gratuites et vulgaires à une pauvre Hollandaise qui attend de percer...
La troisième, et de loin la plus dangereuse, est un ensemble de libertés prises avec l'Histoire, chose qui n'aurait pas été un problème si le scénario avait été bien ficelé, mais qui reste accablante d'indécence dans sa représentation du peuple hollandais pendant la guerre. Le summum, c'est l'attroupement qui se forme pour accueillir en héros l'un des résistants lors des célébrations de la fin de la guerre, avec tous ces gens représentés comme des moutons campant sous les fenêtres de leur idole comme des minettes à un concert de Justin Bieber, et incapables de réagir autrement que de taper dans les mains à chaque mouvement du type qu'ils acclament. Il est vrai qu'après un tel conflit, les gens n'avaient pas d'autres sujets de préoccupation...
Et Carice van Houten dans tout ça? Eh bien la pauvre fait tout ce qu'elle peut pour émerger de la flaque de vomi dans laquelle elle est littéralement plongée pendant trois heures, et il faut reconnaître qu'elle porte le film par son énergie et son aisance à manier plusieurs langues comme si de rien n'était, mais elle est loin de parvenir à sauver son héroïne de ce naufrage scénaristique puisqu'elle ne pense tout simplement pas à suggérer la douleur et le regret d'avoir perdu sa famille, ce qui, malgré l'absence de scène prévue à cet effet, aurait pu être rattrapé lors du premier dialogue suivant cette tragédie. Bref, on fera un geste pour une actrice somme toute dynamique mais le film ne vaut guère plus de 3/10, tout divertissant soit-il. Mes connaissances en cinéma hollandais sont actuellement très limitées, mais j'ose espérer que ce n'est pas réellement le plus grand film de ce pays-là.
A Little Chaos, d'Alan Rickman (2014)
C'est un film qui semble avoir été écrit pour moi, qui n'aime rien tant que dessiner des plans de châteaux et de jardins pour ma future maison, et je dois avouer qu'il y a tant de bons aspects dans cet ensemble que je ne suis pas mécontent du tout d'avoir passé deux heures de ma vie dans le Versailles en construction de Louis XIV. En effet, les décors et costumes sont splendides, la photographie vraiment soignée (les fleurs dans les bois, lors de la promenade, notamment), et la musique reste assez divertissante pour que le tout fasse passer un très agréable moment, et ce d'autant plus que même les coiffeuses et maquilleuses sont à féliciter pour avoir su rendre Matthias Schoenaerts sincèrement séduisant avec ses cheveux longs, et dieu sait si je ne suis précisément pas friand de cheveux longs chez les garçons, en général.
Dommage, néanmoins, que l'histoire ne tienne pas les promesses que la forme laissait présager. En effet, de quoi parle ce film, à la fin? De jardinage ordonné, pour faire ombrage à Angelina Jolie et ses ronces qui se transforment en dragons? Pas vraiment, la question des jardins et de la réussite personnelle s'estompant de plus en plus au fur et à mesure de l'histoire. Est-ce un film d'amour alors? Un soap opera avec rivale jalouse prête à inonder les fondations tout juste posées? En partie, mais alors, pourquoi diluer le propos dans un exposé scolaire sur les grands personnages de la cour à cette époque? Est-ce en définitive un film sur les rapports humains, avec certaines idées peu novatrices mais toujours captivantes, telle l'héroïne, de modeste extraction, papotant d'amour et de remariage avec le roi? Ou alors, la ligne générale est-elle ce fameux secret que renferme Sabine, secret dont la révélation, certainement le clou du spectacle, laisse clairement sur sa faim? Est-ce un parcours psychologique pour aider l'héroïne à se débarrasser de ses démons? En fait, l'histoire tire dans toutes ces directions à la fois, au point que tout ça semble finalement assez confus, dépassant allègrement la petite touche de chaos autorisée pour éclaircir un ensemble trop ordonné.
Il est également dommage que les personnages secondaires, souvent tous l'occasion de créations mémorables et croustillantes, n'apparaissent que le temps d'une scène avant de disparaître comme des pages disgraciés. En effet, chacun a droit à sa vignette pour prendre le contrepied des préjugés historiques qu'on peut avoir sur eux (La favorite n'est pas qu'une mégère, elle est aussi humaine! Le frère du roi n'est pas qu'un cliché homosexuel ambulant, etc.), mais chaque apparition a l'air sincèrement plaquée, sans vraiment apporter un regard nouveau sur l'intrigue ou sur l'héroïne. Il est surtout extrêmement frustrant, voire criminel, d'avoir Kate Winslet et Jennifer Ehle dans le même plan et ne leur faire échanger que deux répliques! Sans compter qu'il faudrait donner de vrais rôles à la seconde et arrêter de la cantonner à de la figuration, surtout qu'elle joue ici la favorite du roi, personnage brillant s'il en est, qui aurait mérité d'avoir un temps d'écran plus conséquent. Après, ça reste tout de même plaisant d'avoir cette galerie de grands noms de l'époque pour les voir s'échanger quelques bons mots, quitte à sacrifier allègrement la réalité historique pour plus de fun, à l'image du lever du roi filmé comme une pub Ricoré ou de la Montespan en émouvante mécène qui tient une cour secrète composée de femmes ayant perdu un enfant, encore qu'on imagine mal la favorite se présenter à la belle-sœur du roi, techniquement plus haute qu'elle dans la hiérarchie, en s'exclamant "Copiiiiiine!" comme si elle parlait à sa coloc de cellule au couvent, avant leurs débuts dans le monde.
L'histoire est donc un peu décevante, mais le voyage reste joli, sans jamais ennuyer. Et c'est toujours un plaisir de retrouver Kate Winslet, l'une de mes très rares idoles contemporaines que je pourrais aller voir dans tout, même si, toute parfaite soit-elle, sa performance n'est pas aussi brillante que certaines de ses compositions d'autrefois. Tout du moins reste-t-on en terrain connu. C'est en fait Stanley Tucci qui emporte le film avec lui, et ce avec en tout et pour tout une unique séquence, mais j'attends avec impatience de retrouver Kate Winslet dans The Dressmaker. 5/10.
Et vous? Des découvertes intéressantes récemment?
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