jeudi 24 août 2023

40°C à Lalinde



Depuis un an que je circule le long de la Dordogne, je n'avais jamais pris le temps de m'arrêter à Lalinde. Idem pour Beaumont-du-Périgord, autre ville sans cesse traversée mais finalement jamais visitée, souvent parce que je suis pressé de rentrer et que je ne suis pas toujours motivé pour faire des arrêts. Cela dit, ma mission à Limeuil touche à sa fin, et j'ai réalisé que je n'allais pas repasser à Lalinde avant un bon moment : malgré la canicule, hier soir était le seul jour de libre pour y faire quelques pas, ce que je ne regrette pas.


Ce qui m'a totalement décidé à errer une petite heure dans les ruelles de l'ancienne bastide par une température absolument insoutenable, c'est cette vue sur les rives du fleuve, typiquement parsemé de cygnes en cet endroit, le long des îlots émergés entre la grande commune évoquée et sa voisine Pontours. Lorsque l'on arrive de Sarlat, le reflet de l'affreuse église Saint-Pierre-ès-Liens qui se découpe à contre-jour au milieu des oiseaux blancs revêt un charme singulier qui m'évoque, dans une certaine mesure, l'introduction d'Alice au pays des merveilles de Walt Disney, une image qui m'a toujours fasciné. Le cadre est tout de même moins apaisant à Lalinde, puisque le débit de la Dordogne y est autrement tumultueux que dans ce village anglais, mais les cygnes et les algues dans les flots bleus rendent le paysage vraiment bucolique.


Côté ville, le rivage est également peuplé de maisons pittoresques qui se laissent agréablement admirer depuis le pont, passage obligé pour gagner le Périgord noir par la rive sud. J'avais même failli habiter à Lalinde, puisqu'en cherchant un hébergement en Périgord pourpre l'année dernière, j'avais postulé pour une cohabitation chez une habitante de la place, qui n'était cependant pas disponible avant septembre, ce qui ne faisait pas mes affaires. Pas de regret de toute manière, car Bergerac est une ville autrement animée, et plus proche de ma région natale qui plus est.


Ancienne bastide fondée par Henri III Plantagenêt, le cœur du bourg se démarque par son quadrillage presque parfait. Dans l'un des carrés centraux se situe une halle construite en 1865, où les habitants aiment s'arrêter prendre un rafraîchissement.


Ce n'est cependant pas le plus beau monument de Lalinde : on est en droit de lui préférer ce bel édifice médiéval qui accueille aujourd'hui l'office de tourisme intercommunal des Bastides Dordogne-Périgord, dont Lalinde est justement le siège.


Aménagé le long de la Dordogne, cet édifice offre une vue imprenable sur le pont, ce qui rappelle le rôle joué par la ville dans le commerce d'antan entre l'Auvergne et l'Aquitaine.


Trois pas plus loin, la place du souvenir permet elle aussi d'admirer le célèbre fleuve, bordé en cet endroit par une jolie balustrade ajourée. Sur la colline d'en face à Couze-et-Saint-Front, la petite église Saint-Front-de-Colubri s'élève avec discrétion au milieu des bois, ce qui ne l'empêche nullement de faire ombrage au vilain clocher de Lalinde qui lui répond depuis la rive nord.


Pour être franc, les bâtiments les mieux mis en valeur au bord de l'eau ne sont pas les plus charmants de la cité. Loin s'en faut. En témoignent les vestiges du château de Lalinde, dit de la Bastide : deux tourelles d'angle du XIIIe siècle se retrouvent désormais intégrées à ce pastiche du XIXe siècle. L'ensemble est à la fois très laid et complètement fascinant, ce qui est assez troublant.


Mieux vaut tout de même revenir dans les ruelles du centre-bourg pour y collectionner les fenêtres d'un bien meilleur goût : linteaux en accolade…


… fenêtres à meneau…


… façades à colombages…


… ou fenêtres Renaissance, il y en a pour tous les goûts, pour peu que l'on prenne de la hauteur.


Toutefois, le clou du spectacle lindois n'est pas une fenêtre mais une porte. Il s'agit de la bien nommée porte de Bergerac, évidemment ouverte sur l'occident, et dernier témoignage des remparts édifiés autour de la ville au XIVe siècle. La partie haute fut cependant rebâtie deux siècles plus tard, après les guerres de Religion.


Ces quelques vues font de Lalinde une étape agréable sur la route de sites autrement pittoresques dans la vallée de la Dordogne, vallée qui mériterait d'ailleurs d'être classée à l'Unesco vu toutes les beautés naturelles et patrimoniales que l'on peut y admirer tous les dix mètres. Lalinde souffre un peu de la comparaison avec des villages justement plus célébrés, mais la découverte de l'ancienne bastide fut loin d'être indigne en cette chaude soirée d'août. En regagnant Bergerac, je n'ai pas manqué de suivre le canal de Lalinde, difficile à photographier au bord de la grand route, mais absolument ravissant au soleil levant ou déclinant, lorsque les rayons dorent les feuilles des platanes dans la pénombre. De curieux aménagements hydrauliques en aval de la Dordogne seront évoqués prochainement, de même que de nouvelles découvertes cinématographiques qui m'ont permis de passer des soirées au frais devant l'écran d'argent, de l'effervescente Barbie à la plus solennelle Anatomie d'une chute. Stay tuned !

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