samedi 28 mars 2015

Traumatismes

Je n'arrive pas à dormir. L'occasion de parler des scènes qui m'ont le plus traumatisé dans mes récents visionnages, afin de conjurer le mauvais sort et de trouver le sommeil le plus rapidement. L'exercice est d'ailleurs intéressant car j'ai appris depuis des années à intérioriser toutes mes émotions et à ne surtout rien montrer en public, si bien que je reste parfois de marbre devant pas mal de films qui en choquent beaucoup d'autres, de quoi donner encore plus de force à mes propres traumatismes cinématographiques. Parmi les exemples contre-productifs, on notera entre autres que The Shining me fait mourir de rire, que The Silence of the Lambs m'angoisse davantage pour la déco intérieure très kitsch du meurtrier et moins pour son goût douteux en matière de vêtements, et que le massacre de la Saint Barthélemy dans La Reine Margot ne me fait absolument par sourciller. Heureusement, je sais aussi être sensible, et voilà donc les dix traumatismes les plus éprouvants qui m'ont affecté, par ordre chronologique.

Stella Dallas (1937)

Ce n'est pas forcément l'œuvre qu'on attendrait dans cette liste, mais Stella Dallas n'en contient pas moins la séquence la plus éprouvante de la décennie à mes yeux, lorsque l'héroïne, vêtue de façon proprement scandaleuse, s'avance au milieu de la bonne société en vacances. On pressent tellement les moqueries à venir qu'il m'a fallu mettre le film sur pause un moment avant d'affronter la scène en question.

The Collector (1965)

Je n'avais jamais été claustrophobe avant cette expérience. Maintenant si, et malgré mon goût prononcé pour les pervers en tous genres, le joli minois glacial de Terence Stamp n'est pas fait pour me rassurer. Et tout ça est d'autant plus angoissant qu'on a toujours la sensation qu'une porte est ouverte non loin, sans pouvoir l'atteindre cependant. A vrai dire, le film a beau divertir constamment lors du visionnage, le recul fait vraiment froid dans le dos, au point de m'avoir conduit à entrouvrir ma fenêtre en pleine nuit d'hiver de peur qu'on ne bloque ma porte.

The Towering Inferno (1974)

D'accord, l'histoire est totalement bidon (avec en point d'orgue la chaise-téléphérique entre deux immeubles) et les personnages ont la profondeur d'esprit de Playmobils dégénérés, mais il n'empêche, ce film est un traumatisme notoire malgré sons aspect divertissant à souhait. Pourquoi? Mais parce que faites-le descendre cet ascenseur bon sang, avant que... Trop tard. A la limite, j'aurais presque pu supporter que ce soit quelqu'un d'autre qui y passe, n'importe qui mais pas...

Blue Velvet (1986)

Alors là, on entre dans l'année qui bat tous les records, et qui sera la mieux représentée dans la liste. Et si j'ai pu tenir péniblement pendant la première partie avec oreille arrachée et masque à oxygène, le tout dernier tiers à bien failli m'achever entre cache-cache dans un placard, lobotomie et cette tête horrifiante de Dennis Hopper dans les escaliers. L'acteur est sans doute mon choix pour le prix du meilleur second rôle cette année-là, mais pas sûr que je pourrai revoir le film pour analyser sa performance en détail.

The Fly (1986)

Autre traumatisme de l'époque, The Fly est l'un des premiers films dont j'ai entendu parler, car c'était passé à la télé dans mon enfance. Evidemment, on m'avait interdit d'y jeter un coup d’œil, mais la bande-annonce était restée gravée dans ma mémoire jusqu'à ce que j'hérite du DVD il y a quatre ans. Résultat: j'ai tenu le coup sans jamais être horrifié, ni par le hachis parmentier de babouin, ni par le maquillage de Jeff Goldblum, ni par l'enfant terrible de Geena Davis, ni par les vomissements acides sur le bras du collègue. Mais c'était sans compter sur la transformation finale, une expérience si traumatisante que j'en ai tremblé toute la nuit sous la couette, et comme, pour couronner le tout, mon ami d'alors était en stage cette semaine-là, la seule solution de secours a été de regarder un film débile avec Pierce Brosnan à 4h du matin pour me calmer, c'est dire à quel point ça m'avait retourné. D'ailleurs, je ne remercie pas les éditions Découvertes Gallimard qui ont eu la bonne idée de coller la seule image du film que je n'étais pas disposé à revoir sur la quatrième de couverture consacrée à leur tome "Monstres". Merci, vraiment. J'ai découvert ça il y a deux jours et j'ai actuellement peur de me lever avant l'aube pour aller chercher un verre d'eau. Merci bien.

Schindler's List (1993)

Un film traumatisant pour des milliers de raisons, et principalement pour l'erreur d'aiguillage du train vers Auschwitz, avec la scène de la douche consécutive. J'en étais pétrifié, comme tout le monde j'imagine. A cela s'ajoute le recul qui rend encore plus marquantes les effusions de sang lors des fusillades.

Temptress Moon (1996)

On le sait que les films avec Gong Li se finissent rarement sur une ronde du bonheur au milieu de fleurs des champs, mais quand c'est cette fois-ci l'arsenic qui vient s'acharner contre l'un des meilleurs personnages du film, le résultat est si effroyable que finir fou à lier dans une demeure glauque passerait pour un sort très enviable en comparaison.

The Pianist (2002)

A peu de choses près, une œuvre aussi choquante que La Liste de Schindler, mais plus particulièrement pour la séquence des haricots renversés sur le sol, et sur lesquels se jette un homme affamé: insoutenable. Je ne pourrai jamais revoir ce film.

Maria Full of Grace (2004)

Une expérience si terrifiante sur la façon de faire passer la drogue en Colombie qu'il est littéralement impossible de déglutir pendant tout le film, tant ce qu'on voit semble aberrant.

Zero Dark Thirty (2012)

Certes, le montage est si bien fait qu'on sait déjà ce qui va arriver avant même que ça n'ait lieu, mais cette séquence dans le camp américain n'en reste pas moins mon dernier traumatisme en date.

Au tableau d'honneur, j'ajouterais: La Passion de Jeanne d'Arc, avec ces gros plans, ces murs dénudés et le visage torturé de Renée Falconetti qui donnent la sensation d'être coincé dans une situation insupportable sans issue de secours; Un chien andalou, pour ces deux secondes irritantes à glacer le sang; What Ever Happened to Baby Jane?, pour cet enfouissement dans le pathétique si douloureux qu'on a envie de prendre Bette Davis dans ses bras pour la consoler; The Trojan Women, pour le cri de Vanessa Redgrave qui donne le sentiment d'une désolation la plus absolue; A Woman Under the Influence, pour le retour dévastateur de Gena Rowlands chez elle; ou encore Zodiac, avec ces meurtres en série et une ambiance bien chargée en tension.

C'est tout ce qui me vient à l'esprit pour le moment.

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